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dimanche 16 février 2014

L' Ecologie n' est pas un luxe...

Que pouvons nous apprendre du Sud ?


L’écologie serait-elle un « luxe » reservé aux pays développés, une question qui ne concerne que la population aisée du monde industrialisée ? Un minimum d’attention à ce qui se passe dans les pays du Sud en général et l’Amérique Latine en particulier nous enseigne à tordre le cou à ce lieu commun de la pensée conforme. 1) Le Sud à l’avant-garde des luttes
En réalité, les peuples du Sud se trouvent à la tête de mobilisations importantes pour la défense de l’environnement. Ces mobilisations sont d’autant plus nécessaires que c’est vers la périphérie du système que sont exportées les formes de production les plus brutalement destructrices de la nature et de la santé des populations. Peu importe si les mobilisations contre la pollution de l’eau, les luttes en défense des forêts ou les résistances aux activités nuisibles des industries chimiques se font ou non au nom de l’« écologie » – terme que ne connaissent pas la plupart des acteurs populaires engagés dans ces mouvements ; l’essentiel est que ces luttes ont lieu, et qu’elles touchent très souvent à des questions de vie ou de mort pour les populations concernées.

Dans mon intervention, je vais me référer à un mouvement spécifique, celui des communautés indigènes d’Amérique Latine, qui se trouvent au cœur de luttes socio-écologiques dans plusieurs pays du continent. Non seulement par les mobilisations locales de défense des rivières ou des forêts, contre les multinationales pétrolières et minières, mais aussi en proposant un mode de vie alternatif à celui du capitalisme néo-liberal globalisé. Ces luttes peuvent être surtout indigènes, mais elles ont lieu très souvent en alliance avec des paysans sans terre, des écologistes, des socialistes, des communautés de base chrétiennes, avec le soutien de syndicats, de partis de gauche, de la pastorale de la terre et de la pastorale indigène.
La dynamique du capital exige la transformation en marchandise de tous les biens communs naturels, ce qui conduit, tôt ou tard, à la destruction de l’environnement. Il est donc parfaitement compréhensible que les populations qui vivent en contact le plus direct avec la nature soient les premières victimes de cet écocide, et tentent de s’opposer, parfois avec succès, à l’expansion destructrice du capital. Ces résistances indigènes ont donc des motivations très concrètes et immédiates – sauver leurs forêts ou leurs ressources en eau – dans une bataille pour la survie. Mais elles correspondent aussi à un antagonisme profond entre la culture, le mode de vie, la spiritualité et les valeurs de ces communautés, et « l’esprit du capitalisme » tel que l’a défini Max Weber : la soumission de toute activité au calcul du profit, la rentabilité comme seul critère, la quantification et réification (Versachlichung) de tous les rapports sociaux. Entre l’éthique indigène et l’esprit du capitalisme, il existe une sorte d’ « affinité négative » – à l’inverse du rapport d’affinité élective entre éthique protestante et capitalisme – une opposition socio-culturelle profonde. Certes, on peut trouver des communautés indigènes, ou métisses, qui s’adaptent au système, et tentent d’en tirer profit. Mais on ne peut que constater qu’une série ininterrompue de conflits caractérise les rapports entre les populations indigènes et les entreprises agricoles ou minières capitalistes modernes. Ce conflit a une histoire ancienne ; il est admirablement décrit dans un des romans mexicains de l’écrivain libertaire B. Traven, La Rose Blanche (1929)1, qui raconte comment une grande entreprise pétrolière nord-américaine s’est emparée des terres d’une communauté indigène, après avoir assassiné son dirigeant. Cependant, il s’est beaucoup intensifié lors des dernières décennies, comme résultat à la fois de l’intensité et de l’extension de l’exploitation de l’environnement par le capital, mais aussi par la montée du mouvement altermondialiste – qui s’est saisi de ce combat – et des mouvements indigènes du continent.
2) L’ecosocialisme dans les cultures indigènes
Nous avons beaucoup à apprendre, en tant que écosocialistes, du mode de vie des communautés indigènes, qui se trouve à la racine de leur résistance anti-capitaliste.
La première chose notable ce sont les traditions collectivistes de beaucoup de communautés indigènes, qui remontent à la période pré-colombine. C’est ce que José Carlos Mariategui appellera le « communisme inca ». Partant de cette analyse historique et d’observations anthropologiques sur la survivance des pratiques collectivistes, Mariategui propose une stratégie politique qui fait des communautés indigènes le point de départ d’une voie socialiste propre aux pays indo-américains. C’est cette stratégie novatrice qu’il présentera dans les thèses envoyées à la Conférence Latino-américaine des Partis Communistes (Buenos Aires, juin 1929), où elle sera bien entendu rejettée comme hérétique :
"Les ’communautés’, qui ont démontré sous la plus dure oppression des conditions de résistance et persistance réellement étonnantes, représentent un facteur naturel de socialisation de la terre. L’indigène a des habitudes de coopération enracinées…La ’communauté’ peut se transformer en coopérative, avec un minimum d’efforts. L’attribution aux ’communautés’ de la terre des latifundia est, dans la sierra, la solution que réclame le problème agraire". 2
Une autre caracteristique importante des cultures indigènes c’est leur rapport de symbiose avec la nature, leur infini respect pour l’intégrité de la « Mère Terre ». Rien n’est plus éloigné des traditions et pratiques indigènes que le pillage écocide de l’environnement pratiqué par les compagnies petrolières et minières, ou par l’agrobusiness capitaliste, qui laissent derrière eux des rivières polluées, des sols empoisonnés, des forêts saccagées.
En fait, c’est tout le mode de vie, désigné par le terme quechua Kawsay Sumak, ou Buen Vivir, qui nous intéresse comme alternative à la devastation suscitée par la civilisation industrielle occidentale. Il s’agit d’opposer au culte capitaliste de la croissance, de l’expansion et du « développement » – accompagné de l’obsession consommatrice du « toujours plus » – une conception qualitative de la « bonne vie », fondée sur la satisfaction des vrais besoins sociaux et du respect de la nature. Les concepts de « droits de la Mère Terre » et de Buen Vivir se sont rapidement répandus non seulement dans les courants indigénistes et écologiques, mais dans tout le mouvement altermondialiste, et ils ont fini par être intégrés, par décision des gouvernements progressistes de Bolivie et de l’Équateur, dans la constitution de ces pays.
Si l’on prend en compte tous ces aspects d s cultures indigènes, on ne peut que donner raison à Hugo Blanco, quand il déclarait, lors de la rencontre ecosocialiste internationale de 2009 à Belem do Para (Brésil), que les « nous les indiens, nous pratiquons l’ecosocialisme depuis des siècles »….
3) La rencontre entre indigènes, altermondialistes et ecosocialistes dans le Forum social mondial (FSM) de Belém, en Amazonie brésilienne (2009)
Les mouvements indigènes latino-américains ont souvent participé aux initiatives altermondialistes et aux Forum sociaux mondiaux qui se réalisaient à Porto Alegre. Mais la Conférence de Belém de janvier 2009 dans l’État du Pará – deuxième ville millionnaire de l’Amazonie brésilienne – a été un moment clefs. Pour la première fois, et c’était une volonté des organisateurs du Forum3, on a assisté à une irruption massive des communautés indigènes et des populations traditionnelles dans le mouvement altermondialiste. Les demandes des populations autochtones et leur diagnostic de « crise de la civilisation » capitaliste occidentale ont été au centre de tous les débats du Forum. Leur mot d’ordre face à la destruction accélérée de la forêt Amazonienne par les exportateurs de bois, les grands propriétaires fonciers producteurs de bétail ou de soja, ou les entreprises pétrolières était adopté par le FSM : « Déforestation Zéro Maintenant ! » .
Une assemblée générale des délégués indigènes présents au Forum a approuvé un document important, l’Appel des peuples indigènes au FSM de Belém face à la crise de civilisation"4. Cet appel est signé par des dizaines d’organisations paysannes, indigènes ou altermondialistes, essentiellement des Amériques (Nord et Sud), sur la proposition des organisations andines du Pérou, d’Équateur et de Bolivie – pays où la majorité de la population est d’origine amérindienne. Ce document rompt avec les réponses « progressistes » dominantes, qui veulent valoriser et renforcer le rôle de l’État et s’appuient sur les plans de relance économique. Son ambition est de lutter contre la marchandisation de la vie en défense de la « mère terre » et de se battre pour les droits collectifs et la décolonisation comme réponses à la crise de la civilisation capitaliste occidentale.
Notons, que pendant le Forum social, une déclaration ecosocialiste internationale concernant le changement climatique, signée par des centaines de personnes de plusieurs pays, a été distribuée aux participants. Au lendemain de la conclusion du FSM s’est réuni à Belém, le 2 février 2009, une Conférence écosocialiste internationale, avec la participation d’une significative délégation d’indigènes péruviens, coordonnée par Hugo Blanco, dirigeant historique des luttes paysannes et indigènes au Pérou (ex-député de l’Assemblée Constituante péruvienne) et Marcos Arana, prêtre associé à la théologie de la libération et aux mouvements indigènes. Dans son intervention Hugo Blanco a rappelé que les communautés indigènes se battent depuis toujours pour les mêmes objectifs que l’écosocialisme, à savoir l’organisation agricole collective et le respect pour la Mère Terre.
4) Que peut-on apprendre de l’expérience des gouvernements de gauche en Amerique Latine ?
Beaucoup de pays de l’Amérique Latine ont des gouvernements de gauche ou centre-gauche ; la plupart – Brésil, Uruguay, Nicaragua, El Salvador, etc. – ne dépasse pas les limites du social-libéralisme, c’est-à-dire d’une politique qui reste dans les limites de l’orthodoxie néo-libérale, et favorise les intérêts des banques, des multinationales et de l’agro-négoce, mais qui opère, en même temps, une certaine redistribution de la rente au profit des couches les plus défavorisées. L’écologie n’est pas du tout une priorité pour ces gouvernements, dont le principal objectif reste « la croissance » et « le développement » ; c’est ainsi qu’en 2010 Marina Silva – une amie de Chico Mendès – démissionne de son poste de Ministre de l’environnement dans le gouvernement brésilien du Président Lula, constatant son incapacité à obtenir un minimum de garanties pour la protection de la forêt Amazonienne. Notons que l’un des symboles de ces choix nocifs pour l’environnement et les populations traditionnelles du gouvernement brésilien est la construction du barrage de Belo Monte, futur troisième barrage de la planète, construction qui a lieu malgré trente ans de luttes farouches et extrêmement structurées des populations traditionnelles habitants sur le bassin versant du fleuve Xingu5.
Certains pays cependant, comme le Venezuela, la Bolivie et l’Équateur, ont tenté de rompre avec les politiques néo-libérales et ont affronté les intérêts de l’oligarchie et des multinationales. Tous ces gouvernements reconnaissent l’importance des défis écologiques, et se déclarent disposés à prendre des mesures pour sauvegarder l’environnement. Mais ils restent tous les trois totalement dépendants, pour leur budget, des rentrées résultant d’énergies fossiles (le gaz et le pétrole), c’est-à-dire des carburants responsables du changement climatique. Le gouvernement vénézuélien est celui où la question reste peu posée ; l’absence d’une population indigène importante ou organisée sur les lieux d’exploitation étant une des raisons de cette absence. Certes, en interdisant la pêche industrielle – destructrice de toute la faune maritime – au profit des petits pêcheurs artisanaux, le gouvernement de Chavez a pris une mesure écologique importante. Mais l’exploitation du pétrole – y compris sous ses modalités les plus « sales » – continue sans interruption, et on ne voit pas beaucoup d’efforts pour développer des énergies alternatives.
Voyons de plus près les deux expériences les plus avancées du point de vue eco-social : l’Equateur et la Bolivie, avec leurs contradictions et leurs limites.
Equateur : le Projet Parc Yasuni (2007-2013)
Une des plus importantes initiatives des mouvements indigènes et des écologistes en Amérique Latine fut le Projet Parc Yasuní, proposé depuis des années par les mouvement sociaux et assumé en 2007 par le nouveau président de l’Équateur, Raphael Corrêa et mise en œuvre par l’alors Ministre de l’Energie et des Mines, Alberto Acosta. Le parc naturel du Yasuni est une vaste région de 9.820 km carrés de forêts vierges, d’une extraordinaire richesse en termes de biodiversité – des botanistes ont calculé qu’un seul hectare contient plus d’espèces d’arbres que tous les États-Unis – habitées surtout par des communautés indigènes et délimitée par trois petites villes : Ishpingo, Tambococha et Tiputini – d’où le raccourci ITT pour désigner cet ensemble. Différentes compagnies pétrolières – dont notamment la Maxus Energy Corporation (Texas) – ont trouvé, lors de forages à Yasuni, trois grandes réserves de pétrole avec une capacité estimée à 850 millions de barils. Les gouvernements équatoriens antérieurs avaient, dans les années 1980 et 1990 accordé de concessions à la compagnie texane, mais la résistance des indigènes avait limité les dégats en empêchant la plupart des forages.
Le Projet Parc Yasuni consistait à laisser ce pétrole sous le sol – évitant ainsi 400 millions de tonnes d’émissions de CO2 – en échange d’une indemnisation par la communauté internationale ; concrètement, les pays riches devraient prendre en charge l’équivalent de la moitié des recettes attendues : environ 3 milliards et demi de dollars sur treize années. L’argent devrait être versé à un Fonds géré par le PNUD (Programme des Nations Unies pour le développement) et serait exclusivement destiné à préserver la bio-diversité et à développer les énergies renouvelables. Les pays du Nord, censés prendre des mesures pour restreindre les émissions de gaz à effet de serre ne se sont pas beaucoup intéressés à la proposition hétérodoxe de l’Équateur. Quelques pays européens – Espagne, Italie, Allemagne – ont versé un total de 3 millions de dollars : on est loin du compte ! En outre, certains pays – notamment l’Italie et la Norvège – ont annulé 100 millions de dollars de la dette externe de l’Équateur.
Le Projet Parc Yasuni a été une des seules initiatives, à l’échelle internationale, qui réponde effectivement à l’urgence du combat contre le changement climatique par une mesure radicale : laisser le pétrole sous la terre…Cette mesure était autrement plus efficace que le « marché des droits d’émissions » et autres « mécanismes de développement propre » des accords de Kyoto, qui se sont révélés parfaitement incapables de réduire significativement les émissions de gaz à effet de serre. Dans le cas du Parc Yasuní – comme dans beaucoup de luttes indigènes, notamment dans la région Amazonienne – le combat des communautés locales pour défendre leur environnement de la voracité destructrice de l’oligarchie fossile a coïncidé pleinement avec la grande cause écologique du 21ème siècle : la prévention du réchauffement global, l’une des plus grande menaces qu’a jamais connue la vie humaine sur la planète.
Si les pays riches ont manifesté si peu d’enthousiasme pour le projet, c’est non seulement parce qu’il n’a rien à voir avec les « mécanismes de marché » qui ont leur préférence, mais surtout parce qu’ils craignent l’effet d’entraînement de cette initiative. Accepter de financer Yasuni serait ouvrir la porte à des centaines de projets de la même nature, projets en parfaite contradiction avec les politiques choisies par les pays capitalistes avancés .
Pretextant la faible réponse des pays riches au Projet, le Président Correa a décidé, fin 2013, d’ouvrir le Parc Yasuni aux entreprises petrolières. Cette capitulation à l’oligarchie fossile est décevante, et montre le poids de l’idéologie « developmentiste » dans la gauche latino-américaine. Les écologistes et les mouvements indigènes n’ont pas accepté cette décision rétrograde et exigent une consultation populaire.
Bolivie ; La Conférence des Peuples de Cochabamba (2010).
Lors de la Conférence des Nations unies sur le climat à Copenhague (2009), Evo Morales, le président indigène de Bolivie, a été le seul chef de gouvernement à se solidariser avec les manifestations de protestation dans les rues de la capitale danoise, sous le mot d’ordre « Changeons le système, pas le climat ! ».
En riposte à l’échec de la Conférence de Copenhague, a été convoquée, par initiative d’Evo Morales, une Conférence des peuples sur le changement climatique, destinée à se réunir en avril 2010 dans la ville bolivienne de Cochabamba – siège, au début des années 2000, de combats victorieux des populations locales contre la privatisation de l’eau (la « Guerre de l’Eau »). Plus de 20 000 délégués ont participé, venus du monde entier, mais en majorité des pays andins de l’Amérique Latine, avec une très substantielle représentation indigène. La résolution adoptée par la Conférence, qui a eu un considérable retentissement international, exprime – y compris dans sa terminologie – la thématique écologique et anti-capitaliste des mouvements indigènes. Voici quelques extraits de ce document :
« Le système capitaliste nous a imposé une logique de concurrence, de progrès et de croissance illimitée. Ce régime de production et de consommation est la recherche du bénéfice sans limites, tout en séparant l’être humain de l’environnement, établissant une logique de domination sur la nature, convertissant tout en marchandise : l’eau, la terre, le génome humain, les cultures ancestrales, la biodiversité, la justice, l’éthique, les droits des peuples, la mort et la vie elle même.
Sous le capitalisme, la Mère-Terre ne constitue qu’une source de matières premières et en ce qui concerne les êtres humains, en moyens de production et en consommateurs, en personnes qui importent pour ce qu’elles ont et non pour ce qu’elles sont.
Le capitalisme requiert une industrie militaire puissante pour étayer son processus d’accumulation ainsi que le contrôle de territoires et de ressources naturelles, tout en réprimant la résistance des peuples. Il s’agit d’un système impérialiste de colonisation de la planète.
L’humanité fait face à une grande alternative : continuer dans le chemin du capitalisme, du pillage et de la mort, ou entreprendre le chemin de l’harmonie avec la nature et le respect de la vie.
Nous avons besoin de l’établissement d’un nouveau système qui rétablisse l’harmonie avec la nature et entre les êtres humains. Il ne peut y avoir d’équilibre avec la nature que s’il existe de l’équité entre les êtres humains.
Nous invitons les peuples du monde à la récupération, la revalorisation et au renforcement des connaissances, des pratiques et savoirs-faire ancestraux des Peuples Autochtones, confirmés dans l’expérience et la proposition du « Vivre bien », en reconnaissant la Mère-Terre comme un être vivant, avec lequel nous avons une relation indivisible, interdépendante, complémentaire et spirituelle.6 »
On peut critiquer – comme l’on fait certains intellectuels de gauche latino-américains – l’aspect mystique et confus du concept de « Mère Terre » (Pachamama dans les langues indigènes) ou constater – comme l’ont fait des juristes – l’impossibilité de donner une expression juridique effective aux « droits de la Mère Terre ». Mais ce serait perdre de vue l’essentiel : la puissante dynamique sociale, radicalement anti-systémique, qui s’est cristallisé autour de ces mots d’ordre.
L’engagement conséquent d’Evo Morales pour le combat des peuples contre le changement climatique et en défense des droits de la Mère Terre ne correspond pas toujours à la pratique concrète du gouvernement bolivien, attaché à une stratégie de développement où la production de gaz et les initiatives minières occupent une place importante. Récemment le projet de construction d’une autoroute qui traversait une vaste région de forêts vierges a suscité des énergiques protestations des communautés indigènes locales, provoquant la suspension – provisoire – de cette initiative.
Conclusion :
Les écosocialistes ont beaucoup à apprendre avec les communautés indigènes, qui sont à la pointe du combat en défense de la forêt vierge, des rivières, et de l’environnement en général, contre des adversaires puissants : les multinationales fossiles, l’extraction minière, l’agro-négoce. D’autre part, la culture, le mode de vie des indigènes, qui a marqué le discours et la culture du mouvements sociaux et écologiques, des Forums Sociaux et des réseaux altermondialistes en Amerique Latine, nous concerne directement en tant que ecosocialistes. Enfin, les gouvernements qui se veulent de gauche dans les pays à forte population indigène ont assumé, dans une certaine mesure, le discours socio-écologique indigène, mais continuent à pratiquer un modèle de développement « extractiviste ». Seule la mobilisation sociale autonome des indigènes et des travailleurs et travailleuses des villes et des campagnes pourra faire avancer l’Amérique Latine vers une transition ecosocialiste.
Mickaël Lowy

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