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mardi 13 août 2013

Objectif zéro déchet et zéro carbone...

Objectif zéro déchet et zéro carbone

Enerbois produit de l’électricité, de la chaleur et des pellets à partir d’une nouvelle énergie renouvelable, la biomasse. Un exemple concret d’écologie industrielle en Suisse romande.

 ECONOMIE CIRCULAIRE • Inspirée des écosystèmes naturels, l’écologie industrielle vise à limiter les impacts de la production sur l’environnement.


Les déchets des uns sont les matières premières des autres. C’est sur cette idée simple qu’est née l’écologie industrielle – ou économie circulaire. «A la différence de nos sociétés actuelles, qui épuisent des ressources d’un côté et accumulent des déchets de l’autre, les écosystèmes naturels fonctionnent de façon quasi cyclique. Or, l’idée de l’écologie industrielle est d’amener autant que possible les sociétés industrielles à se rapprocher de ce fonctionnement», expose Jean-Bernard Michel, responsable de l’unité des systèmes industriels de bioénergie de l’Institut de génie thermique de la HEIG-VD, et professeur d’énergétique.
L’écologie industrielle est une notion et une pratique récentes du management environnemental basée sur l’analyse des flux de matière et d’énergie, qui vise à limiter les impacts de l’industrie sur l’environnement. La perspective est celle du développement durable: en partant des limites des démarches traditionnelles qui raisonnent en termes de réduction des pollutions (approches de «bout de chaîne» ou «end of pipe» et, dans une moindre mesure, «à la source»), il s’agit de répondre à des défis plus globaux et intégrés.
Rapport Meadows: première alerte
«Nos sociétés industrielles ont été construites sur l’idée que les matières et l’énergie étaient infinies, sans se préoccuper des impacts. Dans les années 1970, on a commencé à se préoccuper des conséquences sur l’environnement, avec la mort des forêts, l’eutrophisation des lacs, la pollution urbaine, etc. Mais le premier signal d’alerte concernant l’épuisement des ressources remonte au rapport Meadows*, en 1972, qui n’a pas vraiment été pris au sérieux. Dans un monde fini, il arrive un moment où on ne peut plus croître. On se trouve face à deux problèmes: d’un côté on s’étouffe sous nos déchets, de l’autre on épuise les ressources», relate Jean-Bernard Michel
Selon lui, il y a actuellement une prise de conscience de la «finitude» de la Terre, qui doit cependant devenir collective pour atteindre un effet de seuil. «C’est déjà le cas en Chine où, depuis 2009, une loi oblige la création d’une économie circulaire pour la construction de toute nouvelle ville. Il faut dire que ce pays est face à un défi colossal de limitation des ressources en acier, ciment, etc.», analyse-t-il.
Vers le déchet zéro
L’écologie industrielle recherche ainsi une optimisation à l’échelle de groupes d’entreprises, de filières, de régions, et même du système industriel dans son ensemble. L’objectif est d’atteindre progressivement le «déchet zéro» et le «zéro carbone». Pour ce faire, il faut réduire les pertes à tout niveau (production, transformation, stockage, consommation et recyclage) afin d’atteindre une même qualité de service avec moins de matière et d’énergie. Les cycles de matière et d’énergie doivent être bouclés, et les boucles longues remplacées par des boucles courtes (lire ci-dessous l’exemple d’Enerbois).
Il est aussi nécessaire de mutualiser les flux de matière et de d’énergie, comme cela se pratique à Kalundborg (lire ci-dessous). Il faut ensuite augmenter la durée de vie des produits et des services en passant à une économie de la fonctionnalité: achat d’un service plutôt qu’un produit, conception de produits permettant leur réutilisation (ecoconception) et création d’usines de démantèlement et de reconstruction, notamment pour les voitures. Enfin, une économie dite «décarbonée», où seules les énergies renouvelables sont utilisées (y compris pour les transports), les déplacements physiques réduits et les services mutualisés, doit être mise en place.
Changer le système
«Pour effectuer toutes ces transformations, cela demandera beaucoup d’énergie, notamment au niveau humain, pour changer les mentalités, les postes en place, les formations, les compétences, etc. Bref, pour changer le système de fond en comble», analyse Jean-Bernard Michel. Et de conclure: «Le modèle de l’économie industrielle est incompatible avec les valeurs actuelles du capitalisme et de sa société de consommation.» I
*The Limits To Growth, rapport sur les limites de la croissance, est le titre d'un rapport demandé à une équipe du Massachussetts Institute of Technology par le Club de Rome en 1970. Reposant sur un modèle informatique, il est la première étude importante qui a relevé les dangers écologiques de la croissance économique et démographique.

Ecologie industrielle ici et ailleurs
Produire de l’électricité, de la chaleur et des pellets à partir d’une nouvelle énergie renouvelable, la biomasse, c’est le défi que relève depuis 2010 l’entreprise Enerbois, à Rueyres (VD). Lancé en 2007 par la scierie Zahnd, qui cherchait à valoriser ses sous-produits du bois, ce projet a été réalisé en partenariat avec Romande Energie, pour un montant de près de 40 millions de francs. Il s’agit d’une application concrète d’écologie industrielle fondée sur le principe de l’économie circulaire.
Le bois débité à la scierie Zahnd provient des forêts de la région. Les produits finis (planches et poutres) sont produits sur place et exportés en grande partie. Quant aux sous-produits du bois, ils sont désormais valorisés sur place, d’où une baisse du trafic de près de 2000 camions par an.
La sciure est transformée en pellets, qui permettent de chauffer jusqu’à 5000 ménages romands. L’électricité, produite à base de résidus de bois, est injectée dans le réseau électrique local et répond aux besoins de près de 8000 ménages. Grâce à la récupération de la chaleur issue des gaz de fumée de la centrale, le bois de la scierie et la sciure servant à la production des pellets peuvent être séchés, et les bâtiments de l’entreprise et d’une dizaine d’habitations avoisinantes chauffés. Enerbois est aujourd’hui la plus grande centrale romande de production d’énergie à base de biomasse et le seul producteur industriel suisse de pellets produits à partir d’énergie 100% renouvelable et sans émission de CO2.
Ailleurs en Suisse romande, des projets d’écologie industrielle sont aussi en cours, à Bulle et à Romont, ainsi qu’à Fribourg avec le projet «Blue Factory», qui se veut «zéro carbone». «L’écologie industrielle en Suisse et en Europe est surtout basée sur la valorisation des déchets sous forme énergétique. La valorisation ‘matière’, comme à Kalundborg, au Danemark, reste un exemple isolé pour l’instant», relève Jean-Bernard Michel, qui enseigne entre autres l’écologie industrielle à la HEIG-VD et à la HES-SO (master).
C’est dans les années 1970 qu’est apparue, sur le site de Kalundborg, la première expérience significative d’écologie industrielle. Cette expérience est d’autant plus remarquable qu’il n’y a pas eu de planification du site: les symbioses industrielles se sont réalisées de manière spontanée car chaque acteur – la mairie, une centrale énergétique, un fabricant de plâtre, une entreprise pharmaceutique, une entreprise de traitement des sols et une raffinerie du pétrole – y a trouvé un avantage économique.
Aujourd’hui, il existe un réseau dense d’échanges d’eau, d’énergie et de sous-produits issus des activités industrielles et humaines menées sur le site. Les déchets des uns sont utilisés comme matière première par les autres: chaleur et vapeur, eau, gaz issus de la raffinerie, gypse de synthèse, biomasse et engrais liquide, cendres volantes issues de la combustion du charbon dans la centrale, boues d’épuration, etc.
Claude Grimm

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