Information Participative

Médias Citoyens Diois continu !

Retrouvez-nous sur notre nouveau site :

http://mediascitoyens-diois.info

jeudi 11 avril 2013

Enfers Fiscaux...



Enfers Fiscaux
C’était en 1999, deux jeunes députés socialistes travaillaient d’arrache-pied à la tête d’une mission parlementaire sur la «délinquance financière et le blanchiment de capitaux en Europe». Vincent Peillon et Arnaud Montebourg, aujourd’hui ministres, consacrent alors des monographies à différents pays, parfois nos voisins, où l’argent circule en toute opacité. C’était en 2009, alors qu’en pleine crise bancaire il s’agissait encore et toujours de moraliser le capitalisme. Nicolas Sarkozy : «Il n’y a plus de paradis fiscaux. Les paradis fiscaux, le secret bancaire, c’est fini.» Trois ans plus tard, la lutte contre l’argent sale reste devant nous. François Hollande, hier : «Les paradis fiscaux doivent être éradiqués en Europe et dans le monde.»
Lassante rengaine. Désespérant sentiment que la libéralisation des échanges et la financiarisation de l’économie s’enracinent dans une part d’ombre inexpugnable et requièrent ces zones de non-droit off-shore pour prospérer. Espérons, pleins d’entrain, que cette économie soit enfin démantelée. Restera alors la lutte contre des pratiques légales mais, au risque du gros mot, immorales : l’optimisation fiscale, le fait de localiser ses biens et ses avoirs dans de clémentes contrées où l’impôt est une si légère caresse. Avant la loi qui pourrait interdire ces pratiques ou harmoniser l’impôt, réjouissons-nous que la honte publique retienne certains candidats à l’exil fiscal d’échapper aux formes élémentaires de la solidarité.
NICOLAS DEMORAND
«L’évasion fiscale est une menace de plus pour le pacte républicain»
Conseiller économique de Jersey devenu militant, John Christensen dénonce l’imbrication des pouvoirs politique et financier en Europe :
John Christensen est directeur exécutif de Tax Justice Network, un centre de recherche indépendant, basé à Londres (1). Ex-conseiller économique du gouvernement de l’île de Jersey, où il est né, cet ex-infiltré (Libération du 13 mai 2009) connaît parfaitement les rouages de la finance internationale hors-sol. Les actuelles révélations sur les 2,5 millions de fichiers et les 120 000 firmes et trusts basées dans des paradis fiscaux peuvent-elles être décisives dans la lutte contre l’évasion...
CHRISTIAN LOSSON
Paris, Berlin, Londres, Rome et Madrid demandent à l’UE que les comptes des ressortissants européens soient surveillés. Une mesure efficace déjà appliquée par les Etats-Unis.
 «Les paradis fiscaux, le secret bancaire, c’est fini», claironnait Nicolas Sarkozy en 2009. On sait ce qu’il est advenu… Hier, François Hollande a déclaré vouloir «éradiquer» ces territoires «en Europe et dans le monde». Ces paroles auront-elles plus de portée que celles de son prédécesseur ? A écouter les ONG, l’espoir est là, en tout cas. «Les mesures présentées sont celles portées depuis des années par la société civile. On ne peut que s’en féliciter», commente Mathilde Dupré, du CCFD-Terre Solidaire. Et l’initiative française n’est pas isolée : au niveau Européen, tout bouge très vite.
Vis-à-vis des banques, les mesures annoncées par l’Elysée reprennent les propositions des ONG. Hollande veut que les établissements rendent publique la liste de toutes leurs filiales, pays par pays, avec le détail du chiffre d’affaires, des effectifs, des résultats et des impôts payés. Mais le Président arrive après la bataille : la mesure a déjà été adoptée en mars par le Sénat, dans le cadre de la loi bancaire. Et, pour l’histoire, le gouvernement s’opposait alors à une telle transparence…
Volonté politique
Deuxième axe d’offensive de Hollande, les territoires offshore. «La France établira chaque année une liste de paradis fiscaux», a déclaré le chef de l’Etat. Là encore, rien de neuf. Une liste noire d’Etats et territoires «non coopératifs» existe depuis 2010. Mais aucun des vrais paradis fiscaux ne s’y trouve (la liste est composée du Botswana, Montserrat, Brunei, Nauru, le Guatemala, Niue, les îles Marshall et les Philippines). Tout l’enjeu est de savoir si la France aura la volonté politique d’y intégrer des places comme les îles Caïman, la Suisse ou le Luxembourg.
La France estime en fait qu’elle ne peut agir qu’à la marge à l’échelle nationale et que le niveau européen est le bon terrain de jeu. Cela tombe bien, ses partenaires européens sont, pour une fois, sur la même longueur d’onde. Ainsi, hier, les cinq poids lourds de l’UE (Allemagne, France, Grande-Bretagne, Italie et Espagne) ont écrit à la Commission pour demander que soit mis en place, au sein de l’Union, un échange automatique d’informations sur les comptes bancaires détenus par les ressortissants européens. Surtout, afin de contraindre les pays tiers à mettre fin au secret bancaire, ils demandent que l’Union adopte l’équivalent du «Foreign Account Tax Compliance Act» américain (Facta) de 2010. Une législation particulièrement efficace, qui permettra à Washington, à compter de janvier 2014, de sanctionner durement (via une surtaxe de 30% sur leurs activités locales) les banques présentes sur leur territoire qui ne déclareraient pas les avoirs détenus à l’étranger par des citoyens américains.
Cette mobilisation a déjà eu un premier effet : le Luxembourg et l’Autriche, les deux derniers Etats membres de l’UE à pratiquer le secret bancaire (en échange d’une taxe sur les intérêts reversé au pays du ressortissant qui y possède un compte), ont annoncé qu’ils allaient y mettre partiellement fin. L’Autriche envisage de le faire pour les seuls étrangers, le secret bancaire étant inscrit dans sa Constitution. Mais cela risque de ne pas passer la barre de la Cour de justice européenne, qui veille à interdire toute discrimination entre Européens.
«Cerise sur le gâteau»
Les efforts du Luxembourg sont encore plus limités : le Premier ministre, Jean-Claude Juncker, a accepté l’échange automatique d’informations à partir du 1er janvier 2015, mais seulement pour les personnes physiques ressortissantes d’un Etat membre de l’UE, qui ne résident pas fiscalement au Grand-Duché. Autrement dit, cette levée du secret bancaire ne s’appliquera ni aux entreprises, ni aux non-Européens… Là aussi, ses partenaires risquent de ne pas trouver cela suffisant.
Ce branle-bas de combat européen ne doit rien à l’affaire Cahuzac. «C’est la cerise sur le gâteau, mais pas l’élément déclencheur», s’amuse Olivier Bailly, l’un des porte-parole de la Commission. «En réalité, ce sont les Etats-Unis qui, avec le Facta, sont en train de faire sauter le verrou au sein de l’Union, poursuit-il. Les Britanniques ont aussi sérieusement évolué depuis l’été dernier lorsqu’ils ont découvert que les grandes compagnies américaines installées chez eux, comme Google ou Amazon, réussissaient à ne payer quasiment aucun impôt.» Si l’on ajoute à cela le sauvetage de Chypre, qui a montré le danger que représentait pour la zone euro un trou noir de la finance, on comprend que les temps soient mûrs pour mettre en œuvre les résolutions prises en 2007-2008 par la communauté internationale afin de lutter contre les paradis fiscaux. Et qui étaient restées depuis lettres mortes.
NICOLAS CORI, JEAN QUATREMER
Repères. Paradis fiscaux
72  C’est le nombre des paradis fiscaux dans le monde, multiplié par 3 en trente ans. Ils abritent 2 fonds spéculatifs sur 3 et hébergent 2 400 000 sociétés écrans.
Lexique
Un paradis fiscal, législatif et réglementaire se caractérise par 5 critères non cumulatifs : l’opacité ; la fiscalité très basse, voire nulle ; des facilités législatives pour créer des sociétés écrans ; l’absence de coopération avec les administrations fiscales, douanières et/ou judiciaires des autres pays ; la faiblesse ou l’absence de la régulation financière.
La fraude fiscale suppose une intention délibérée de frauder en contournant l’impôt et des éléments matériels pour le prouver. A l’inverse,
L’optimisation fiscale est l’utilisation légale (mais pas forcément légitime) de failles du système fiscal pour réduire au maximum le montant de l’imposition.
L’évasion fiscale est l’évitement de l’impôt en déplaçant tout ou partie d’un patrimoine ou d’une activité vers un autre pays (le plus souvent un paradis fiscal), sans que le citoyen ou la société s’expatrient eux-mêmes. En pratique, la frontière est ténue : la fraude fiscale peut facilement n’être que le versant illégal de l’évasion fiscale. Inversement, l’évasion fiscale peut n’être qu’une forme d’optimisation…
ICIJ, c’est l’International Consortium of Investigative Journalists, une initiative du Center for Public Integrity à Washington.
L’enquête Offshore Leaks a commencé à être publiée le 4 avril par 36 médias : 2,5 millions de fichiers, sur 170 Etats et territoires, 120 000 trusts et sociétés écrans-voyous.
Rappels : «Au G20 de Londres, la France s’est battue pour que les paradis fiscaux, le secret bancaire, la fraude organisée, ça soit terminé. Les paradis fiscaux, le secret bancaire, c’est fini...» Nicolas Sarkozy  le 23 septembre 2009. Et «Les paradis fiscaux doivent être éradiqués en Europe et dans le monde parce que c’est la condition pour préserver et protéger l’emploi.» : François Hollande, hier, à l’Elysée.
On attend…
MCD

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire