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lundi 28 novembre 2011

Adieu Danièle...

CLUNY (SAÔNE-ET-LOIRE) le dernier hommage unanime à Danielle Mitterrand
Des fleurs, tant de fleurs, pour Danielle Mitterrand qui a été enterrée, samedi 26 novembre, à Cluny. Devant l'ancienne abbaye, où a eu lieu cette cérémonie toute laïque, elles sont disposées de part et d'autre de l'allée centrale, sous un ciel de bruine.
D'un côté celles des politiques, les roses jaune pâle de Martine Aubry, première secrétaire du PS, les lys et les pâquerettes d'une absente, Ségolène Royal, la couronne du PCF, celles des élus locaux.De l'autre, celles des amis Kurdes de la présidente de France-Libertés, roses rouges sang de Massoud Barzani, "président de la région du Kurdistan, A la mère des Kurdes", celles de Maryam Radjavi, chef du conseil national de la résistance iranienne "A l'icône de la Résistance".
SOLIDES CONVICTIONS
Deux facettes de la vie de la présidente de France-Libertés, disparue mardi 22 novembre à 87 ans. La femme, pendant cinquante-et-un ans, de l'ancien président François Mitterrand et l'infatigable militante des droits de l'homme. Même s'il y manquait quelques figures, comme les deux anciens premiers ministres Lionel Jospin et Laurent Fabius, la famille socialiste était présente pour accompagner une dernière fois cette personnalité qui a traversé le XXe siècle, lestée de solides convictions.
Ces dernières furent plus proches de l'extrême gauche que de la gauche mais, samedi, chacun en voyait l'actualité. Des fleurs, tant de fleurs. Pour le candidat socialiste à la présidentielle, François Hollande, qui l'avait vue cet été à Latché, la résidence des Mitterrand dans les Landes, ce fut presque un soutien. Danielle Mitterrand ne s'était jamais privée de dire pourtant tout le mal qu'elle pensait des dirigeants de la gauche – "pas la tripe socialiste". "Je l'avais trouvée très encourageante. Non pas par rapport à moi, nous étions encore dans la primaire, mais par rapport à la suite, à l'espoir d'un retour de la gauche au pouvoir", confie-t-il.
Le candidat, qui montait vers le cimetière de Cluny avec sa compagne, la journaliste Valérie Trierweiler, en tirait aussi une leçon sur le rôle de la "première dame" : "Elle a eu la force de s'en libérer et d'utiliser cette situation pour porter ses causes". Au moment de jeter une rose sur le cercueil tout simple de bois blanc, on lui tend une fleur blanche. Il en a déjà une rouge. Puis c'est au tour de Mazarine, la fille de François Mitterrand, avec laquelle il vient d'échanger quelques mots d'amitié.
Les Lang, Monique et Jack, et Pierre Bergé, qui subventionna France-Libertés, lancent la leur d'un même geste. Des fleurs encore pour Mme Mitterrand de la part d'Arnaud Montebourg, auréolé de son bon score à la primaire : "Son message est celui d'un combat qui ne finit jamais. Il est très actuel, il s'est même aggravé et finalement je l'ai trouvée bien seule".
"L'ARGENT REND FOU. LES HOMMES SONT FOUS."
Sur les deux écrans géants placés devant l'abbaye, Danielle Mitterrand a livré ses leçons, à travers un documentaire réalisé avec l'actrice Mélanie Laurent, en voix off."Pour obtenir le minimum, il faut être très radicale", a-t-elle dit. Avec ses mains, elle scande ces trois phrases, ponctuées de silences : "L'argent rend fou. Le profit rend fou. Les hommes sont fous."
A cette militante, qui n'a pas été "la dame patronnesse de la charité elyséenne", comme l'a dit Michel Joli le secrétaire général de France-Liberté, son fils Gilbert a rendu un émouvant hommage, familial et intime. Il a évoqué la rebelle, la mère généreuse, l'épouse d'un homme duquel elle avait dit en 1996, tout proche de la fin : "Nous respectons sa façon de sortir de la scène. François ne meurt pas". Gilbert Mitterrand, la voix chargée d'émotion, a dit à son tour : "Maman ne meurt pas, Danielle ne meurt pas. Au revoir ma Lolo".
Pétrie de laïcité depuis l'enfance, croyait-elle, comme son mari "aux forces de l'esprit" ? Elle voulait "un minuscule hommage posthume". Elle aura peut-être su qu'il était couvert de fleurs.
L'adieu en préludes du pianiste Miguel Angel Estrella à Danielle Mitterrand
Ses mains, capables de voler sur le clavier pour faire exulter Chopin, sont pour l'heure emmitouflées dans des gants en polaire, tachetées façon panthère. Il les frotte l'une contre l'autre, dans l'humidité glaciale qui enveloppe les jardins de Cluny. Miguel Angel Estrella sourit : "C'est à une copine".
Le pianiste argentin, qui fut emprisonné et torturé par la junte militaire dans les geôles uruguayennes à la fin des années 1970, est là pour une amie très chère, Danielle Mitterrand, enterrée ce samedi 26 novembre. C'est pour elle, rencontrée à sa libération en 1980, que Miguel Angel Estrella a joué deux préludes, les numéros 20 et 22 de Chopin, sur le piano Yamaha placé sur une estrade.
"TU VERRAS QUE L'ESPOIR VIENDRA DE L'AMÉRIQUE LATINE"
Ancien élève de Nadia Boulanger et de Marguerite Long, le pianiste de 71 ans a été naturalisé à son retour en France, au sortir d'une captivité qui avait fait l'objet d'une mobilisation internationale. Lors du 25e anniversaire de la fondation France-Libertés, le 21 octobre, il s'était longuement isolé avec Danielle Mitterrand. "Nous avons parlé pendant plus d'une heure, c'était un moment béni".
Depuis la première hospitalisation de Mme Mitterrand au mois de septembre, il l'appelait chaque jour. Avec l'accent qui ne l'a pas quitté, il évoque cette "militante insoumise" et son message d'optimisme. "Nous avons parlé de tout ce que nous avons fait ensemble depuis plus de trente ans. Elle m'a dit : 'Tu verras que l'espoir viendra de l'Amérique latine.'" Elle en connaissait chacun des chefs d'Etat et avait noué, raconte le militant des droits de l'homme, une relation privilégiée avec Cristina Kirchner, la présidente de l'Argentine, rencontrée grâce à lui.
Il a un regard doux et profond, une grande bienveillance. C'est à lui. Il enlève les gants de panthère, monte sur son tabouret, ferme les yeux. Chopin s'envole.
Béatrice Gurrey

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