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samedi 16 juillet 2011

Le tour de France, une affaire d' argent...

Un Tour de France asservi à l'argent
Le monde du sport est double. Il se présente comme les deux faces d'une même médaille. D'un côté, les valeurs olympiques, qui ne cessent d'affirmer depuis Coubertin que le sport est vertueux. De l'autre, les valeurs financières des contrats mirifiques que signe une élite sportive fortunée et dont on sait qu'elle n'est guère vertueuse.
En travaillant sur le terme shadow banking (la "banque de l'ombre"), qui permit de rassembler en une seule expression des dérives systémiques liées aux subprimes, nous avons proposé de qualifier de shadow sporting cette face obscure de l'activité économique issue du sport. C'est un véritable baril de poudre. Il a pour nom : dopage, fraude, corruption, blanchiment, détection trop précoce, surentraînement, instrumentalisation des corps. Il se traduit par des carrières gâchées, des réputations entachées, des athlètes vieillis avant l'âge, des déficits comptables invraisemblables.
Le shadow sporting avance masqué. Contre toutes les évidences, il se renforce à l'ombre portée des symboles olympiques qu'il exploite sans vergogne. Au prétexte qu'ils véhiculeraient des valeurs positives : l'éducation, l'intégration, la santé, l'effort gratuit, le fair-play, il s'en délecte et regorge ainsi de bons sentiments. Cette attitude est aujourd'hui devenue une véritable posture. Une position de principe inscrite dans l'ADN du sport business.
Elle conduit les acteurs du shadow sporting à produire des éléments de langage qui sont en permanence des dénis de réalité. Cela est devenu tellement habituel que plus personne ne relève la rupture entre le réel, le patent, l'évident et le commentaire qu'ils en font. S'est ainsi instauré un discours qui constitue un double langage quasi, institutionnel.
De ce point de vue, le Tour de France 2011 ne déroge pas à la règle. A peine avait-il débuté qu'il multipliait dès le premier jour les dénis de réalité. Qu'on en juge.
Alors que la presse s'interroge sur l'avenir judiciaire d'Alberto Contador, la caravane part. Alors que la ministre des sports, Chantal Jouanno, considère comme "gênante" sa participation, elle la cautionne par sa seule présence au départ de la première étape. Gageons que, quoi qu'il arrive - même l'inacceptable -, elle sera à l'arrivée sur les Champs-Elysées. Alors que les gendarmes ont intercepté le car de l'équipe Quick-Step à des fins de fouilles approfondies, son directeur sportif considère qu'il "s'agit d'un contrôle de routine ".
Explications alambiquées
Reste que c'est la première fois que les forces de l'ordre procèdent ainsi et prennent soin de médiatiser une opération menée en mode commando. Alors que des produits dopants très sophistiqués - devant être réceptionnés par le chauffeur de l'équipe Omega Pharma-Loto - furent interceptés par les douaniers belges, celui-ci affirma qu'ils étaient destinés à son usage personnel.
Malgré une remarquable similitude avec l'origine de l'affaire Festina en 1998, l'équipe prit le départ comme si de rien n'était. Il y a fort à parier que cette 98e édition nous réservera bien d'autres cas de décalage entre le réel et ces explications alambiquées dont la seule raison d'être est la préservation des intérêts de certains acteurs du shadow sporting.
Ce type de comportements serait qualifié de non-éthique dans n'importe quel autre milieu et sanctionné illico. Pas dans le sport, la récente affaire des quotas du football en est la preuve. Dès lors, plus personne ne s'émeut de l'expansion de ce code implicite qui permet de plier la réalité à l'aune d'intérêts économiques bien compris.
Pour autant, malgré une maîtrise réelle de la langue de bois par le milieu du cyclisme, il arrive que des coureurs se mélangent les pédales révélant ainsi certains arcanes insoupçonnés. Souvenons-nous de la phrase fameuse prononcée en 1998 par Richard Virenque au plus fort de l'affaire Festina.
Perdu, ne sachant plus où se situait la vérité, incapable d'identifier le comportement approprié, abandonné de tous, Virenque exploita un registre narratif que d'aucuns s'empressèrent de ridiculiser. Ils eurent tort, car il était révélateur. Impuissant devant les questions des journalistes parce que les réponses n'existaient pas, acculé, tout compte fait, le coureur expliqua que s'il s'était dopé c'était "à l'insu de son plein gré".
Virenque voulut signifier qu'il n'était pas coupable, plus exactement qu'il n'y avait pas de coupable... à l'exception d'un système qui oblige les acteurs à agir contre leur gré. Reste qu'ils le font aussi dans leur intérêt. La situation est donc complexe, qui résulte d'une double contrainte : comment agir contre son gré mais dans son intérêt. Dans l'affaire Festina, les patrons du Tour ne furent pas inquiétés. Les coureurs, par contre, ne franchirent jamais la ligne d'arrivée.
Alain Loret, directeur de la faculté des sciences du sport de l'université de Rouen

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