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lundi 31 janvier 2011

Où va la Tunisie ?

Tunisie : Entretiens avec une feministe et avec un militant universitaire
Tunisie : Entretien avec Sana Ben Achour
Présidente de l’Association Tunisienne des Femmes Démocrates le jeudi 27 janvier 2011 pour le journal d’actualié critique Diagonal
Diagonal : Depuis plusieurs jours il y a des manifestants qui campent devant le siège du gouvernement. Quelle est la position de votre association par rapport à ce gouvernement ?
Sana Ben Achour : Pour l’Association Tunisienne des Femmes Démocrates, vous savez, comme toute association, nous sommes plurielles tout d’abord, nous n’avons pas toutes la même position par rapport à la composition de ce gouvernement d’union nationale. Par contre il y a un certain nombre de critiques que nous faisons toutes à ce gouvernement. Nous pensons qu’il aurait mieux valu parler d’un gouvernement de transition ou d’un gouvernement provisoire et non pas d’un gouvernement d’union nationale puisque toutes les tendances et toutes les sensibilités ne sont pas représentées dans ce gouvernement. Qu’il est absolument nécessaire que tous les symboles et tous les représentants, tous ceux qui ont été dans l’ancien système de Ben Ali soient évacués de ce gouvernement. Ce n’est pas un problème de personnes mais c’est un problème de système. Quand on a été ministre de Ben Ali, quand on a été 1er Ministre de Ben Ali, bien sûr que la suspicion est grande, surtout que le régime de Ben Ali a utilisé un peu les mêmes techniques, c’est-à-dire que le RCD (Rassemblement Constitutionnel Démocratique – parti de l’ex-Président Ben Ali) est devenu un des appareil, le plus grand appareil de répression du rémige de Ben Ali. L’autre idée, l’espoir qui est en nous toutes en tant que féministes, c’est véritablement d’aller vers la démocratie, de pouvoir asseoir de vraies institutions démocratiques, d’aller vers des élections libre au suffrage universel direct et surtout que les femmes tunisiennes puissent trouver leur place dans la construction de cette démocratie.
D : Justement, quelles éléments favorables, quelles forces vous donnent espoir pour construite une Tunisie avec de réels droits sociaux et politiques ? Qu’est-ce qui vous donne espoir en Tunisie aujourd’hui ?
SBA : Ce qui nous donne espoir c’est véritablement la révolution et ce qui se passe dans la rue aujourd’hui. C’est vrai que les Tunisiens n’ont pas eu l’occasion de s’exprimer par des élections et donc de manière, disons institutionnelle et démocratique, mais la pression de la rue, à notre sens, est salutaire. C’est-à-dire qu’aujourd’hui après avoir vu le sang couler, après avoir vu des jeunes s’immoler par le feu, plus personne n’est prêt à renoncer à cet idéal et à la démocratie. Véritablement, je pense que c’est ça notre force, c’est que aujourd’hui on n’a plus peur, il n’y a plus cette chappe de plomb et je pense que les associations des droits des femmes, les associations des droits de l’homme et les association, au-delà de la société civile, qui ont résisté pendant des années à Ben Ali, je pense qu’elles vont constitué une sorte de réseau de vigilence démocratique, en lien avec la jeunesse, parce que la jeunesse a eu un rôle extraordinaire et justement je pense que l’espoir nous vient de voir cette jeunesse, qu’on a considéré pendant des années comme une jeunesse amorphe ou indiférente à l’espace public, et bien finalement elle est là, présente, et veut construire et veut aller de l’avant.
D : Pour terminer, est-ce que vous pourriez me dire quelle est la situation aujoud’hui des droits de l’homme et, surtout, des droits de la femme en Tunisie, et quel va être le rôle de votre organisation dans les mois à venir ? Qu’est-ce que vous allez faire dans cette situation de transition ?
SBA : Bon, ce qui est intéressant ici c’est que depuis que le mouvement a commencé, ça a été un mouvement social, les femmes ont été présentes. Vraiment, les femmes de la classe moyenne, les femmes du peuple, les universitaires, les jeunes, tout le monde était là et a participé à cette vague, qui a commencé le 17 décembre après que le jeune Bouazizi se soit immolé par le feu, et qui est montée jusqu’à Tunis, ce qui nous rassure c’est qu’il n’y a pas eu des solgans où il y avait exclusion des femmes ou des slogans contre les femmes. C’est vrai qu’il y a aujourd’hui, c’est clair et net, il y a une tendance politique qui peut-être remettrait en cause les acquis des femmes tunisiennes mais les femmes tunisiennes se mobilisent et nous organisons d’ailleurs demain une marche, une belle manifestation, enfin samedi, une marche que nous avons appelé une Marche des Femmes pour la Citoyenneté et l’Egalité en soutien à la Révolution, que nous allons organiser samedi à 15h à la Place de l’Indépendance sur l’avenue Habib Bourguiba à Tunis et où on va lever un certain nombre de slogans sur les acquis des Tunisiennes, sur la volonté et la détermination qu’il faut les faire évoluer davantage pour aller à l’égalité juridique, à la citoyenneté pleine et entière sans exclusif, sans restrictions, sans réducation. Et voilà on compte jouer notre rôle aussi bien en tant que femmes dans les associations à occuper l’espace public, à mobiliser, à faire des campagnes de sensibilisation, à faire des campagnes pour faire évoluer les textes. Et puis aussi les femmes qui sont dans les partis politiques, et je pense qu’on jouera un rôle politique très important.
Maintenant, en cette phase transitoire, qu’est-ce que nous comptons faire ? Et bien il est clair que notre rôle vis-à-vis de la commission de réforme des institutions va être très important. Nous avons travaillé sur les droits, sur la Constitution, sur l’égalité, la citoyenneté, depuis 20 ans sous le règne de Ben Ali. Nous avons passé au scanner l’ensemble des lois qui organisent les libertés publiques en Tunisie. Nous avons notre mot à dire pour aller vers des lois démocratiques qui reconnaissent les droits de la personne, qui reconnaissent l’égalité, qui permettent une vie publique digne, de la démpocfratie et de la citoyenneté. Et bien nous allons être en contact permanent avec eux. Nous avons commencé déjà à travailler, nous allons leur envoyer notre mémorendum, nous allons les rencontrer pratiquement toutes les semaines. Donc nous allons être très vigilentes. Nous avons la volonté de participer, peut-être pas directement mais en tout cas par la pression, à la rédaction des textes dans le sens que nous voulons c’est-à-dire la non-discrimination à l’égard des femmes, l’égalité des droits mais aussi l’égalité de chances, la reconnaissance des droits politiques mais aussi la reconnaissance des droits économiques et sociaux. Vous savez que les femmes c’est elles qui paient le plus grand tribu au chômage, les femmes diplômées, nous avons 60 % de femmes à l’université mais dans la vie active on n’en trouve que 20 %. Et donc les femmes ont payé aussi le tribu du chômage. Il y a beaucoup de menaces qui pèsent sur la position des femmes en société, sur leurs droits, mais je pense qu’on ne va pas se laisser faire. Et moi j’ai beaucoup d’espoir parce que c’est une très belle révolution qu’on a eu en Tunisie, très civilisée comme on dit, les gens se mobilisent, parlent, discutent dans la rue, et je pense que même si pour l’instant c’est un peu chaotique, moi je n’ai pas peur, j’ai confiance dans cette révolution, j’ai confiance dans le peuple tunisien.
Tunisie : Entretien avec Ahmed Amine Ben Saad
Artiste, comédien, du syndicat étudiant UGET, chercheur en 3ème cycle en art dramatique. Mercredi 26 janvier
Diagonal : Bonjour, qu’est-ce que vous demandez au gouvernement de transition ?
Ahmed Amine Ben Saad : On demande aux ministres qui étaient avec Ben Ali de quitter le gouvernement parce que le peuple n’a pas confiance en eux. Ce sont des gens qui ont travaillé avec le dictateur, ce sont aussi des criminels, soit par des crimes concrets soit par leur silence pendant 23 ans.
D : Est-ce qu’il y a des grèves dans le pays actuellement ?
AABS : Il y a des grèves partout. Il y a un grand rassemblement devant le siège du gouvernement. Il y a des citoyens qui viennent de toute la Tunisie, qui dorment là, qui ne bougeront pas jusqu’à ce que ces ministres quittent le gouvernement. Et il y a aussi des grèves dans l’éducation nationale. Demain il y a un appel officiel au retour des étudiants dans les universités mais les étudiants commenceront aussi des grèves demain.
D : A part le départ des ministres liés au RCD (Rassemblement Constitutionnel Démocratique – parti de l’ex-président Ben Ali), qu’est-ce que vous demanderiez au gouvernement de transition ? Quelles mesures politiques et sociales faudrait-il prendre dans l’immédiat ?
AABS : Maintenant je ne pose plus de questions sociales, pour moi il y a une nécessité politique. Ce gouvernement n’a pas la confiance du peuple. Ce gouvernement ne peut pas être un gouvernement de transition de la dictature vers la démocratie. Ce que noudemandons maintenant c’est un gouvernelment qui puisse avoir la confiance du peuple, après on discutera les détails politiques, tout ce qui est social. C’est vrai que cette révolution est une révolution sociale mais c’est aussi une révolution de liberté, une révolution politique, une révolution de société civile. Alors on doit retrouver la vie politique normale, on doit retrouver l’Etat, on doit retrouver la vie normale de citoyen, et après chaque parti, chaque syndicat pourra rédiger clairement ce qu’ils demandent socialement.
D : Ce que vous demandez, c’est la séparation de l’Etat et du parti RCD, qui étaient très liés ?
AABS : Non, ce n’est pas seulement la séparation. Nous on demande que le parti RCD n’existe plus parce que pour nous ce n’est pas un parti politique. Pour nous les Tunisiens on sait très bien que ce n’est pas un parti politique, on sait très bien que c’est vraiment le grand criminel. On sait que les membre du parti sont à des postes de pouvoir. C’est impossible de reconstruire la Tunisie avec eux, c’est impossible.
D : Après la fuite de Ben Ali, on a vu l’apparition de comités de quartier. Quels peut être selon vous le rôle de ces comités de quartier à l’avenir ?
AABS : A la base c’était des comités dasn chaque quartier pour défendre le quartier contre les milices de Ben Ali, les milices du RCD, contre quelques policiers aussi. Maintenant il y a aussi quelques comités de quartier qui se sont développés vers des comités d’auto-direction mais il y a aussi des comités qui n’existent plus, des comités qui ont organisé la défense mais qui n’existent plus maintenant. Pour moi c’est vraiment une très bonne idée. Ça donne une idée, ça donne une intuition sur la possibilité d’auto-direction d’un peuple, mais aujourd’hui ils ne sont pas un vrai projet politique qui a des perspectives à mon avis.
D : Est-ce que les Tunisiens craignent une ingérence étrangère des pays occidentaux ou des pays du Maghreb ?
AABS : Les Tunisiens ne partagent pas la grande peur des pays du Maghreb. On partage la grande peur de l’impérialisme américain parce que nous ne sommes pas bêtes, nous savons que le régime qui existait précédemment était très près du gouvernement des Etats-Unis et surtout de la France. On a peur de ça. On n’a pas peur de la Libye ou du Maroc, ça me fait rire des histoires pareilles. On a peur des Etats-Unis d’Amérique, on sait très bien qu’ils sont là, on sait très bien qu’ils ont soutenu Ben Ali pendant des années et des années mais ce n’est pas une grande peur parce que moi je sais qu’un peuple qui a fait de la résistance civile contre un dictateur comme Ben Ali est un peuple qui est prêt à faire de la résistance miliatire contre n’importe quelle armée. Moi, un artiste, je peux très bien arrêter de faire de l’art et m’entraîner pour défendre l’indépendance de la Tunisie.
D : D’ailleurs, en parlant d’armée, quel est le rôle de l’armée actuellement et quel va être son rôle dans les jours et les mois à venir selon vous ?
AABS : Jusqu’à maintenant, l’armée est très respectée de la part des Tunisiens parce qu’elle défend les Tunisiens et qu’elle refuse encore d’entrer dasn l’équation politique. Elle est neutre. Elle joue son rôle d’armée et elle refise d’entrer dans l’équation politique. Nous respectons l’armée si l’armée reste dans sa position , si elle refuse toujours d’entrer dans l’équation politique, elle sera toujours respectée des Tunsiens. Et je pense qu’elle doit rester adsn les rues de la Tunsie jusqu’au départ des problèmes parce que là il n’y a pas vraiment de policiers comme d’habitude. Les Tunisiens n’ont pas confianca dans le Ministère de l’Intérieur, n’ont pas confiance dans le gouvernement, on ne distingue plus les Tunisiens qui manifestent des milices du RCD qui essaient de semer la violence pour créer des problèmes. On a besoin de notre armée nationale.
D : Quels éléments sont porteurs d’espoir pour construire une véritable démocratie en Tunisie ?
AABS : Pour commencer il faudrait que le Président Foued Mbazaâ demande à une autre personnalité, indépendante, de former un gouvernement. Ce n’est plus possible de demander à un membre ou un ex-membre du RCD de former un gouvernement, le peuple Tunisien ne l’accepte pas. Deuxièmement il faut revoir toutes les lois, dans des comités spécialisés, pour reconstruire toutes les institutions de la démocratie tunisienne. Parce que ces institutions existent, théoriquement la Tunisie a toujours été une démocratie mais en pratique elle a toujours été une dictature. Alors il faut revoir toutes ses instituions pour arriver à commencer à installer une démocratie de la Tunisie prochaine.
D : Pour terminer, quelles sont les perspectives pour les jours et les mois à venir, comment vous voyez l’avenir ?
AABS : Moi je dirais qu’il faut que le gouvernement comprenne que ce peuple n’a plus rien à perdre et que ce peuple demande tout simplement de ne plus voir devant ses yeux les symboles du régime de Ben Ali. Il y a aujourd’hui des institutions juridiques libres et indépendantes et c’est à elles de décider qui est le criminel et qui n’a rien à se repprocher devant le peuple tunisien, devant la Tunisie. Finalement je voudrait dire à n’importe qui qui pense que c’est possible d’arnaquer le peuple tunisien, que ce soit de l’intérieur ou de l’extérieur, que ce peuple-là est un peuble cultivé, est un peuble démocratique, est un peuple fort, et ce n’est plus possible, ça y est c’est fini.
Albert Idelon

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