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vendredi 31 décembre 2010

Nos amis de Saint Martin d' Hères 38



Chroniques de la Barbarie Ordinaire N° 1 : L’histoire de la famille Varga, avec ses 4 enfants de moins de 5 ans, dont un bébé de 2 mois, à la rue depuis le 20 Décembre


1) Expulsion du Camp des Roms de Saint Martin d’Hères – le Camp du Rondeau

Victimes du racisme, des conditions de vie misérables qui sont faites aux Roms en Roumanie, ils sont arrivés en France en Octobre 2009 avec leurs enfants. Demandeurs d’Asile, ils ont vécu depuis dans l’agglomération grenobloise. D’abord dans le Camp des Roms Ikea / Saint Martin d’Hères, coincé entre la Rocade Sud et la voie ferrée. Les 3 ainés des enfants seront scolarisés.

Le 19 Août 2010 leur camp est détruit au bulldozer et tous les Roms qui y vivent en sont expulsés lors d’une opération musclée qui mobilise 150 CRS. Expulsion spectaculaire faite après le fameux Discours de Grenoble, suite à une demande du Maire communiste de Saint Martin d’Hères, M. René Proby (cf : http://grenoble.indymedia.org/2010-...).

Parqués ensuite par La Métro et la Ville de Grenoble (une agglomération majoritairement socialiste) sur l’Aire de Grand Passage des Gens du Voyage, au Rondeau, ils se voient obligés de renvoyer en Roumanie les 2 ainés de leurs enfants. Restent 2 garçons et une fille qui ont entre 2 et 5 ans. Les conditions sanitaires sur ce camp sont épouvantables. Des feux de palettes servent à cuire la nourriture. Des tentes Quechua, font fonction d’habitat. Ce sont des tentes pour 3 places, ils sont 5 ; impossible d’y faire autre chose que dormir, on ne peut même pas s’y tenir tous assis. De plus elles sont numérotées, histoire d’éviter l’appel d’air. Mais c’est l’été l’herbe est encore verte et les oiseaux chantent.

2) Changement de situation : l’hôtel Lux

Mi-Octobre, la mère enceinte depuis 8 mois et demi est prise de contractions. Elle n’avait jamais vu de médecins autre que ceux de la maraude de Médecins du Monde sur le camp, ni eu d’échographie ni aucune rencontre médicale pré-natale (anésthésiste,...). Un membre du Collectif Solidarité Roms l’amène aux Urgences Gynécologie de la Maternité de La Tronche. C’était une fausse alerte, des examens sont faits et elle rentre au camp retrouver la vie sous la tente en cet automne pluvieux qui transforme le camp en une zone boueuse.

Mais là, les choses changent, les autorités alertées, ont tout d’un coup mis en place une solution pour la mère et les enfants au titre de la Protection mère / enfants dont la responsabilité relève du Conseil Général de l’Isère. Un responsable de Médecins du Monde est présent au moment même où la mère est ramenée au camp par le membre du Collectif. Il veut emmener mère et enfants, mais pas le père. Ce n’est qu’après de laborieuses tractations qu’il pourra être hébergé avec eux à l’hôtel social Lux, vers la gare. Nous sommes vendredi 15 Octobre au soir vers 19h.

Cependant le lendemain, surprise : on retrouve la famille au grand complet sous la tente au Camp du Rondeau. En effet l’hôtelier a refusé la famille, un fax étendant l’accueil à toute la famille n’étant pas arrivé, Médecins du Monde a ramené la famille au camp. C’est le week-end et tout est bloqué.

3) Un hébergement inadapté et qui devient vite problématique.

Lundi matin tout est arrangé, la famille s’installe dans les 2 chambres qui lui sont destinées par le Conseil Général de l’Isère. Mais quand le père se rend sur le camp pour récupérer toutes leurs affaires personnelles, surprise, les barbares sont déjà passés. Un cadre des Services Techniques du CCAS de Grenoble a déjà envoyé une équipe pour arracher la tente et en jeter tout le contenu dans la boue du camp.

La vie continue, la mère enceinte revient chaque jour au camp pour pouvoir se faire à manger avec ses enfants. Chose impossible à l’hôtel ; le camp est bien le seul lieu où l’on peut le faire, d’abord sur les feux de palettes, comme avant, puis, à partir du 10 novembre, sur l’une des 3 cuisinières à gaz de la Salle Commune qui avait été construite.(cf. http://grenoble.indymedia.org/2010-...)

Les 19 et 20 Octobre le CCAS de Grenoble, épaulé par la Police Municipale et les services de la Propreté Urbaine, mènent par deux fois une tentative d’expulsions illégales sur le Camp des Roms du Rondeau. Le père, pourtant hébergé à l’hôtel social, solidaire de ceux qui sont restés sur le camp, fait partie de ceux qui s’y opposent. Une solidarité qui sera sans doute une des causes de l’acharnement futur des autorités sur cette famille (« Ils sont durs à gérer... ») (cf.http://grenoble.indymedia.org/2010-...). Pèsera sans doute aussi dans la balance la participation pacifique du père aux différentes manifestations de l’automne social grenoblois (cf. http://grenoble.indymedia.org/2010-...).

4) Une nuit mémorable : la naissance d’Aurora.

Dans la nuit du 31 Octobre la jeune femme doit se rendre en urgence à la maternité. Aucun accompagnement n’a été prévu. C’est donc des membres du Collectif, prévenus à 2h du matin par l’hôtelier, qui l’accompagnent à l’Hôpital de La Tronche et s’occupent des enfants en plein milieu de la nuit car le père a du partir précipitamment en Roumanie pour l’enterrement de sa mère. Le CCAS averti de cette situation, n’ayant d’autre solution à proposer que de placer les enfants à la DDASS, ceux-ci sont pris en charge par une autre famille rom sur le camp.

5) La destruction du Camp du Rondeau et ses répercussions.

Le 31 novembre, profitant du Plan Grand Froid, alors que 25 cm de neige tombent sur Grenoble, M. Baïetto, Président de La Métro et M. Destot, Maire de Grenoble, s’accordent avec le Préfet de l’Isère pour fermer le camp en menaçant ses habitants d’une intervention des forces de l’ordre. Le lendemain à 10h les tracto-pelles commenceront leur travail de destruction. Avec la destruction du Camp du Rondeau, la famille n’a plus aucun point de chute, la solidarité collective lentement mise en place ayant été anéantie pour un moment. Les Roms sont dispersés.

6) Plus aucun moyen d’existence.

C’est au même moment que le versement de l’Allocation Temporaire d’Attente leur est supprimée. Le couple percevait cette Allocation, dans le cadre de la circulaire du 13 novembre 2009 qui permettait aux Demandeurs d’Asile inscrits dans le cadre de la Procédure prioritaire de pouvoir eux aussi la toucher. Et ils étaient dans ce cas, citoyens d’un pays de l’Union Européenne, immédiatement déboutés. Cette allocation si elle leur permettait de survivre sur le camp, servait surtout à l’État à palier à son non-respect de la loi, l’obligeant à héberger tout Demandeur d’Asile (cf. http://grenoble.indymedia.org/2010-...).

Pour compléter le tableau, aucune prise en charge réelle et sincère par Roms Action, cette association qui est sensée défendre les Roms et que la quasi totalité des Roms rejette on se demande bien pourquoi. Par exemple, le dossier d’AME de la famille n’a été fait qu’après l’accouchement du bébé en novembre, et ce, par les membres du Collectif Solidarité Roms. Par ailleurs les documents administratifs leur sont envoyés en français. Aucune prise en compte du fait qu’ils ne parlent pas cette langue ; ce qui est pour eux une difficulté de plus, dans le labyrinthe des démarches à accomplir. Et en ce qui les concerne le problème est encore plus grave car ils ne savent pratiquement pas lire ni écrire (cf l’absence de scolarisation des Tziganes de leur génération en Roumanie).

Quant à l’assistance sociale elle reste fantomatique, plusieurs rendez-vous décommandés, le prochain n’est prévu que pour le 13 janvier. Le dossier CAF pour une éventuelle allocation familiale suite à la naissance du bébé en France le 1er Novembre, lui, est bien fait, mais il n’y a toujours pas de réponse ni de versement.

7) Une situation inhumaine.

La famille étant complètement démunie, le père se met à faire la mendicité dans les rues de notre ville prospère. La destruction du Camp du Rondeau (cf. le communiqué de M. Baïetto, Président de La Métro et M. Destot, Maire de Grenoble : http://www.micheldestot.fr/ville-gr...) aura eu au moins un résultat bien visible, des Roms qui n’avaient jamais mendié sont maintenant à tous les coins de rue du Centre Ville de Grenoble.

La situation déjà difficile à l’hôtel avec 4 enfants en bas âge qui vont passer leurs journées dans la boue du camp, ne peut qu’empirer. Sans moyens de déplacements, les parents se résolvent à déposer à l’OFII une demande de « retour volontaire ». Mais l’État, vertement tancé par une opinion publique qui est maintenant passée à autre chose, a suspendu les vols de charters. Aucun charter en direction de la Roumanie, n’a été organisé au départ de Grenoble depuis le 21 Septembre. Les Roms fuient tant bien que mal par leurs propres moyens ; et ils sont de plus en plus nombreux à le faire.

« Ah, vous vouliez nous obliger à les accueillir selon la loi européenne, dans la dignité ! Eh bien, en leur rendant la vie impossible, les conditions climatiques aidant, nous allons tout faire pour qu’ils n’aient qu’une seule ressource, la fuite. Et puis si on en faisait trop pour eux, ça provoquerait un appel d’air. Et puis ce ne sont pas au final les petits gauchos qui se prendront dans les dents le vote FN du prolétariat tenté par le racisme, lors d’une élection qui elle est le sujet de toute notre attention et qui s’annonce vouloir mettre en concurrence les surfeurs virtuoses du Tout Sécuritaire. »

Lundi 20 Décembre au matin, alors que l’hiver, le gel, la neige, sont bien là, durablement, cette famille est priée par le Conseil Général de l’Isère de quitter l’hôtel social. Certes peu habitués à la vie en hôtel avec leurs 4 enfants, ils ont laissé leur chambre se dégrader et n’ont pas toujours eu une attitude bien responsable, mais était-ce une raison suffisante pour les chasser ainsi. L’ordre leur est donné de se rendre par leurs propres moyens au Centre d’Accueil Municipal (CAM) à 14h ; aucune assistance n’est prévue : comment transporter à pied toutes leurs affaires (poussette, lit pour bébé,...) tout en donnant la main aux 3 enfants et le bébé dans les bras ? Seuls ils ne pouvaient le faire. Ce sont des membres du Collectif prévenus par l’hôtelier qui ont dû mettre 2 véhicules à leur disposition.

Arrivés à 14h sur les marches du Cam, alors qu’un vent glacial souffle sur Grenoble, on leur indique à travers une porte qui ne sera qu’entr’ouverte, qu’ils peuvent bénéficier de tickets gratuits et aller attendre en fin d’après-midi un bus qui leur permettra de rejoindre un Centre de Vacances isolé à 1100 m d’altitude, dans le hameau de Bens au Sappey en Chartreuse (dans le cadre du dispositif Edelweiss). Une pièce leur y est destinée.

Arrivés en haut, toujours accompagnés par des gens du Collectif, malgré la qualité de l’accueil et des locaux, la peur de l’isolement total est la plus forte et ce n’est pas l’assurance d’une navette une fois par jour vers Grenoble qui les rassure. Même les membres du Collectif, qui essaient de leur faire comprendre que c’est la seule solution immédiate qui leur est offerte par les autorités, n’arrivent pas à les convaincre de rester là. Triant vaguement quelques affaires essentielles, ils fuient sur la route verglacée avec le bébé d’un mois et demi dans la poussette.

Le soir ils dormiront à Grenoble dans le fameux garage qui a servi à parquer les Roms après la destruction du Camp du Rondeau : il s’agit d’un local industriel, simple hébergement de nuit, qui a été réouvert par le Préfet qui joue au yo-yo avec les niveaux du Plan Grand Froid. Tout le monde à la rue à 8h et réouverture aléatoire chaque soir à 18h. A Grenoble la météo est franchement glaciale. Depuis le 20 Décembre ils dorment là. Chaque matin les membres du Collectif alertent le 115, les médias, allant jusqu’à installer la famille dans le hall de la Maternité de l’hôpital de La Tronche. Quelques radios sensibilisées viendront, alerteront sur leur cas ; un reporter du Dauphiné Libéré viendra, prendra des photos mais aucun article ne sera publié.

- La mère elle aussi, en compagnie des enfants, du bébé de 2 mois, s’est mise à mendier quelques heures par jour. Allant de l’Accueil SDF, au Secours Catholique, à Point d’Eau, le parcours du combattant de cette famille harassée se termine chaque soir dans le garage du 19 de la rue Prosper Mérimée, un lieu gardé par des vigiles, interdit à la presse. Il a été fermé par la Préfecture ce matin 27 Décembre à 8h. Et la Municipalité de Grenoble semble être l’une des seules parmi celles des grandes villes de France a ne pas avoir ouvert d’équipement collectif.

- On en est là, hier c’était Noël, dans quelques jours ce sera le Nouvel An, demain encore, il leur faudra appeler, ou faire appeler plutôt, vu leur méconnaissance de notre langue, pour pouvoir « bénéficier » d’un simple accueil de nuit qui reste problématique à cette heure.

Qu’en est-il des Droits de l’Homme, des Droits des enfants, des Droits des peuples ?

Qu’en est-il de la législation Européenne ?

Qu’en est-il de l’obligation de la protection de l’enfance ?

Qu’en est-il de l’Humanité ?

Jusqu’où ira-t-on dans l’acharnement ? Jusqu’où ira-t-on dans l’abjection ?

On ne peut rester silencieux sans être complices ?

Va-t-on laisser continuer longtemps cette guerre sociale faite aux pauvres, en Europe, en France, ici à Grenoble ?

Grenoble le 27 Décembre 2010 Françoise Navailh, Léo Jégou, Lucien Eymard, Dominique Jégou, membres du Collectif Solidarité Roms

Politics


Pour la plupart des gens, la politique, ça se résume à de foutus combats des chefs entre des Sarko-pas-beaux et des Ségolène-la-vilaine que l'on tranche, de temps à autre, d'un négligent bulletin de vote.
Et après, on s'étonne que le petit peuple se désintéresse de la chose publique !

C'est tellement vrai que mon blog, au départ classé dans les Blogs politiques, a fini dans les blogs sociétés. Parce que je n'y parle pratiquement jamais des petites manœuvres d'appareils, du jeu de chaises musicales mis en scène par les peoplelitiques, les petites phrases assassines, les grandes stratégies d'accès au pouvoir et sa médiocre réalité quotidienne.

Franchement, savoir qui, de la brochette de clowns complaisamment mis en scène depuis des années par des médias serviles, va servir la soupe aux forces de l'argent lors de la prochaine passation de la louche en or, ça intéresse qui ? En quoi les petits soldats de l'économie de marché triomphante et indépassable — que nous sommes tous — sont-ils intéressés par les luttes de pouvoir des laquais des grandes fortunes et des multinationales dont ils reçoivent prébendes et feuilles de route ? Ce n'est pas comme si nous avions le choix de notre société, le choix de notre mode de vie, le choix du monde que nous voulons laisser à nos enfants, le choix du monde que nous voulons ici et maintenant. Sur ces questions centrales, les espaces de discussion et d'information que sont censément les médias ne s'arrêtent pratiquement jamais. Parce que ces questions-là, c'est l'affaire des experts et des professionnels de la chose publique. Pas du petit peuple. Lequel doit surtout s'intéresser à quelques petites choses essentielles pour la bonne marche du monde tel qu'il est : trimer comme des bœufs, consommer comme des porcs et voter comme des moutons quand on lui intime l'ordre de le faire et pour les bonnes personnes, de préférence.

En fait de démocratie représentative, nous sommes passés à une démocratie de représentation, dans le sens théâtral du mot.

La scène politique nous sert le spectacle des turpitudes de son petit personnel, un peu comme la mythologie grecque occupait la plèbe avec les drames et les passions qui déchiraient l’Olympe. Et les grands prêtres de l’info, dépendants de cette théâtralisation de la vie publique, amplifient à dessein la dramaturgie politique, se font les caisses de résonance des petites phrases creuses et des basses manœuvres des acteurs de la vie publique et médiatique. D’où l’importance du tapage autour des questions d’appareils ou du monologue du nabot.

Comment s’intéresser encore aux discours, alors qu’ils sont probablement l’aspect à la fois le plus vain et le plus édifiant de la
peoplelitique ? Sarko parle, parle, parle. Il raconte des choses, en promet d’autres, mais finalement, que reste-t-il de tout ce bruit de fond informe ? Ces actions. Et il y a loin des promesses aux réalisations concrètes. Parce que c’est ça, la politique : du concret, chaque jour, dans nos vies. Sarko et ses petits copains peuvent bien raconter ce qu’ils veulent : nous sommes en mesure de voir quels sont leurs actions, leurs décisions et leurs résultats. Et nous voyons que le programme politique qu’ils suivent est bien loin de celui qu’ils nous vendent chaque jour. Parce qu’il faut bien appâter le chaland pour continuer les petites affaires entre amis.

Tout est politique


J’entends souvent des gens qui m’assurent, la main sur le cœur, comme un gage de bonne santé mentale, que la politique ne les intéresse pas du tout. Ce à quoi je réponds toujours doctement :

Si tu ne t’intéresses pas à la politique, elle, elle s’intéresse toujours à toi.


Se lever tôt est déjà un acte politique.
Ce que l’on mange est politique : malbouffe industrielle, produits de saison, cuisiné main ?
Quand on s’habille : chez H&M ou une boutique de quartier, et est-ce que j’ai vraiment besoin de ce manteau en plus ou de cette paire de pompes ?
Quand on se déplace : ai-je besoin de la voiture pour faire 100 mètres ou est-ce que je peux tolérer de prendre la pluie sur mon visage, quel est le moyen de transport le plus efficace, est-ce que j’ai vraiment besoin de faire ce trajet ou est-ce que je peux faire autrement ?

Même la taille des poils de cul est une affaire politique, comme chaque moment de notre vie, chaque décision de nous prenons ou que nous laissons d’autres prendre pour nous. Est-ce que je vais faire des gosses ? Dans ce monde, dans cette société ? Est-ce que je vais bâtir un foyer, un empire, des châteaux en Espagne ? Est-ce que je traite convenablement chaque personne que je côtoie dans la journée : la caissière, le facteur, le passant, l’autre connard qui conduit si mal ? Est-ce que je consacre mon temps aux choses vraiment importantes ou est-ce que je le gaspille ? Pourquoi n’ai-je pas encore benné la télé et bêché mon jardin ?

Qu’est-ce qui aura le plus de sens dans mon rapport au monde : glisser un bout de papier dans l’urne de temps à autre et laisser d’autres vaquer aux affaires collectives, en râlant abondamment au bistrot du commerce contre leurs petites inaptitudes ou grandes trahisons ou sortir de chez moi, de mon petit confort égoïste et planter allègrement les deux mains dans la merde du monde qui vit, qui bouge et qui évolue ?

La politique, c’est l’action citoyenne, chaque jour, tout le temps. C’est la politique qui a imprégné chacun de nos pas ces derniers mois, pendant que nous exprimions dans la rue notre profond rejet du théâtre des Guignols et de leurs mensonges répétés. C’est la politique qui conditionne forcément le monde dans lequel nous vivons, parce que c’est le politique, le lieu de la décision et de l’action et nulle part ailleurs.

Aujourd’hui, l’essentiel de la force politique dans laquelle nous sommes englués est utilisée à nous convaincre de notre impuissance en tant que citoyen et de la nécessité indépassable de nous soumettre à la loi du Marché. Santé, travail, éducation, vieillesse, tout ne peut plus se penser que comme des activités que l’on doit absolument rentabiliser ou alors réduire à leur plus simple expression, parce que nous devons être COM-PÉ-TI-T-IFS. Cela est notre seul et unique projet de société. Et quels que soient les partis en présence, les conflits de personnes, de structures, ce modèle de société n’est jamais, jamais remis en question. La politique-spectacle devient alors le lieu de la soumission et la seule action autorisée est celle qui permet la soumission de tous à ce modèle-là.
Sans autre forme de discussion.

Nous pouvons pérorer sans fin sur les qualités et défauts supposés de tel ou tel personnage de la
commedia d’ella politica, commenter les paroles de l’un, les vêtements de l’autre, nous extasier ou nous indigner des manœuvres de tout ce petit monde pour approcher sa chaise de la table du banquet, tant que nous ne nous mettons pas en tête de vouloir entrer dans l’action, de critiquer la structure même du pouvoir, la manière dont on y accède et ses objectifs réels.
La polémique stérile : oui ! La remise en question et la refondation de notre modèle de société : non !

La seule
realpolitik que je reconnaisse, c’est celle qui implique l’ensemble des citoyens. C’est celle qui use les semelles, qui bouscule les idées, qui pense des lendemains qui chantent et qui expérimente de nouvelles manières d’y arriver. C’est celle qui se construit jour après jour, même si on n’est jamais, au départ, que trois gus dans un garage.

Bienvenue dans la Vita Activa.

Agnès Maillard

Le Monolecte

http://blog.monolecte.fr


Une mort annoncée.... aprés une forte histoire


Le Parti communiste, nonagénaire sans avenir

Dans la nuit du 29 au 30 décembre 1920 naissait le Parti communiste français. Au terme de débats fiévreux, le vote décisif du congrès de Tours était sans appel : 3 208 délégués approuvaient l'adhésion à l'Internationale communiste, créée par Lénine, à Moscou, un an auparavant ; 1 022 délégués seulement préféraient, avec Léon Blum, garder la "vieille maison" socialiste. S'il mérite le respect dû aux nonagénaires, il faut bien dire que le PCF a connu des anniversaires plus glorieux. Et pour cause. Après avoir dominé la gauche française pendant près d'un demi-siècle, entre les années 1930 et 1970, après avoir constitué un pôle majeur de la vie politique nationale, le PCF décline inexorablement depuis. Comme le notait sans fard L'Humanité, en annonçant les deux journées discrètes de commémoration organisées les 11 et 12 décembre, "le Parti communiste français ne prétend plus depuis longtemps incarner une avant-garde autoproclamée du mouvement ouvrier".

Le contraire serait surprenant. Premier parti de France au lendemain de la guerre (28,6 % des voix aux élections de novembre 1946), encore soutenu par un électeur sur cinq jusque dans les années 1970, le PCF n'a connu, depuis, qu'une longue dégringolade électorale. Il a touché le fond lors de l'élection présidentielle de 2007 : Marie Georges Buffet, alors secrétaire générale, n'a recueilli que 700 000 voix, soit 1,9 % des suffrages, loin derrière le candidat trotskiste, Olivier Besancenot. En trente ans, le parti a également perdu les trois quarts de ses adhérents (officiellement 100 000 cartes, dont 60 000 à jour de cotisation) et la plupart de ses parlementaires (17 députés élus en 2007). Incapable de prendre la mesure des transformations profondes de la société française, le PCF est également en panne de base sociale et il a perdu l'essentiel des relais qui ont longtemps fait sa force. Le "parti de la classe ouvrière" ne l'est plus : 4 % seulement des ouvriers ont soutenu Mme Buffet en 2007. La CGT, ancienne "courroie de transmission" syndicale, a pris ses distances depuis dix ans. Quant aux villes et aux "banlieues rouges" du communisme municipal, elles ne sont guère qu'une survivance : le Parti communiste ne dirige plus que 28 villes de plus de 30 000 habitants (contre 72 il y a trente ans). Enfin, privé de modèle de référence depuis la disparition de l'Union soviétique au début des années 1990, le PCF est, à l'évidence, en panne de stratégie. Ses hésitations à l'approche de l'élection présidentielle de 2012 en témoignent : ou bien il se contente d'être une force d'appoint du Parti socialiste, en espérant sauver ainsi ses derniers bastions ; ou bien il accepte l'OPA que Jean Luc Melanchon entend faire sur ses dernières troupes, ce qui revient à remettre son sort entre les mains d'un tribun venu du PS. Dans les deux hypothèses, on voit mal le PCF capable de "relever le défi d'un nouveau siècle d'émancipation", comme l'y invitait récemment son nouveau secrétaire général, Pierre Laurentt. Sombre alternative. Pour ne pas dire impasse totale.

Eric Fottorino

Moribond le Parti Communiste Français !

Le PCF a traversé les époques en connaissant diverses fortunes. Il s’apprête aujourd’hui à se fondre dans un Front de Gauche pour les présidentielles. Après le faste de ses Trente Glorieuses, le PCF, débordé par sa gauche, ne séduit plus l’électorat qui a fait sa force au sortir de la deuxième guerre. Un long déclin ponctué d’erreurs stratégiques, parfois sourd aux mutations de la société. Etouffé par le programme commun, endormi par les socialistes et un peu long à prendre ses distances avec le grand frère soviétique, le parti communiste français n’a pas réussi sa mue. Et pourtant, dans la deuxième moitié du XX e siècle, le PCF a, un temps, été le premier parti de gauche. A la Libération, en 1946, le parti de Maurice Thorez et Jacques Duclos rassemble plus d’un quart des électeurs (28,6 %) et des centaines de milliers d’adhérents. Aux législatives, jusqu’en 1978, il se stabilise autour des 20 %. Guerres coloniales, Algérie... Il est de tous les grands combats. Puis, c’est le déclin, depuis les presque 16 % de l’emblématique Georges Marchais aux présidentielles de 1981. Le déclin, puis la chute. En 2007, Marie-Georges Buffet ne franchit pas la barre des 2 % alors que le jeune Besancenot enregistre le double. Depuis 1978, (565 000 militants), le PCF a vu le départ de plus de 400 000 adhérents. Pierre Laurent, secrétaire national depuis juin dernier, veut maintenant jouer la relance dans le cadre du Front de Gauche avec un Mélenchon en vraisemblable tête de pont. Impensable pour les orthodoxes que sont André Gerin, député du Rhône ou le bouillonnant Maxime Gremetz, député de la Somme. A 90 ans, le PCF semble aujourd’hui vraiment faire son âge.

Geoffrey Mercier


PREMIER SALON DE LA GRATUITE

Pendant les rencontres de l’Ecologie au quotidien
Donner ce que vous avez en trop, prenez ce qui vous intéresse !
Tous les matins de 10 h a 12 h, du mercredi 26 janvier au mercredi 2 février 2011 inclus, est organisé 
Un espace de dons & de solidarité
Ce premier Salon de la Gratuité aura lieu à l’entrée & à l’accueil
de la Salle Polyvalente, Boulevard du Ballon à Die.
Amener  les objets que vous aimerez donner, ce que vous n’utilisez plus,
ce qui serait réutilisable ou réparable.  
Prenez ce dont vous avez besoin, ce que vous pouvez valoriser.
Il n’est pas nécessaire d’avoir déposé quelque chose pour repartir avec l’objet choisi.
Quelques idées de ce que vous pourrez récupérer, ou donner :
Etagère, table, chaise, fauteuil, canapé, revue, éclairage & lampes, livre, vaisselle, tréteaux, divers outils, appareils de musique, radio, Hifi, informatique, 33 tours, CD, DVD, meuble petit ou grand, ustensiles divers, électroniques, jouet,  etc., etc., etc.
Nous recherchons aussi des objets qui nous intéressent directement pour l’organisation des journées d’Ecologie au quotidien : sapin de Noel encore vert, stylo feutre, crayons, feuille blanche, tous matériels de décorations, papiers cadeaux, guirlandes & rubans.
Journées de dépôts recommandées à la salle polyvalente : tout le dimanche 23 janvier de 10 h à 19 h et le mardi matin 25 janvier à partir de 10 h. Autrement appeler le 06 09 78 55 31 ou le 06 83 11 94 95.
Important : Ce qui est volumineux (plus d’un mètre cube) ou lourd (plus de 20 kg) ne doit pas être amener sur place sans notre accord, merci d’envoyer une description avec si possible une photo, par courriel à ces 2 adresses : espacedegratuite@gmail.com  et  nina.or@free.fr    l’objet sera affiché avec un numéro pour sa gestion, puis récupéré directement après votre accord. 
Table ronde des 4 R : Réduire, Réutiliser, Réparer, Recycler,  le dimanche 30 janvier, à 10 h. 
Plusieurs intervenants nous présenterons des solutions éprouvées en Rhône-Alpes, en coopération avec les déchèteries du Diois nous apprendrons leur fonctionnement, mais aussi ce qui pourrait être envisagé.
Plus de détails & une mise à jour sur le site : http://www.ecologieauquotidien.fr/
                                                                                                                Pour le Salon de la gratuité

Les voeux de résistance de Stéphane Hessel pour 2011



















que chacun peut lire aussi et écouter sur  Mediapart
On trouve le petit livre  de Stéphane Hessel "Indignez vous",
appel à de nouvelles résistances,
déjà vendu à plus de 300 000 exemplaires,
en librairie au prix de 3€.

Mes chers compatriotes,
La première décennie de notre siècle s'achève aujourd'hui sur un échec. Un échec pénible pour la France ; un échec grave pour l'Europe ; un échec inquiétant pour la société mondiale.
Souvenez-vous des objectifs du millénaire pour le développement, proclamés en 2000 par la Conférence mondiale des Nations Unies. On se proposait de diviser par deux en quinze ans le nombre des pauvres dans le monde. A la même date, on entamait une nouvelle négociation pour mettre un terme au conflit vieux de trente ans du Proche Orient – les Palestiniens auraient droit à un Etat sous deux ans. Echec sur toute la ligne! Une plus équitable répartition entre tous des biens communs essentiels que sont l'eau, l'air la terre et la lumière? Elle a plutôt régressé, avec plus de très riches et plus de très très pauvres que jamais.
Les motifs d'indignation sont donc nombreux. Ce petit livre Indignez-vous! – qui a eu un extraordinaire succès auprès des parents, et plus encore de leurs enfants, auxquels il s'adresse –, c'est quelque chose qui me touche profondément. De quoi faut-il donc que ces jeunes s'indignent aujourd'hui? Je dirais d'abord de la complicité entre pouvoirs politiques et pouvoirs économiques et financiers. Ceux-ci bien organisés sur le plan mondial pour satisfaire la cupidité et l'avidité de quelques-uns de leurs dirigeants ; ceux-là divisés et incapables de s'entendre pour maîtriser l'économie au bénéfice des peuples, même s'ils ont à leur disposition la première organisation vraiment mondiale de l'histoire, ces Nations Unies auxquelles pourraient être confiées d'un commun accord l'autorité et les forces nécessaires pour porter remède à ce qui va mal.
Au moins nous reste-t-il une conquête démocratique essentielle, résultant de deux siècles de lutte citoyenne. Elle nous permet de revendiquer le droit de choisir pour nous diriger des femmes et des hommes ayant une vision claire et enthousiasmante de ce que la deuxième décennie qui s'ouvre demain peut et doit obtenir. Voilà la tâche que je propose à tous ceux qui m'écoutent. Qu'ils prennent appui sur les auteurs courageux qui se sont exprimés ces derniers mois, sur Susan George et son beau livre Leurs crises, nos solutions, sur Edgar Morin et son dernier tome L'Ethique, sur Claude Alphandéry et ses propositions pour une économie sociale et solidaire. Avec eux, nous savons ce qu'il est possible d'obtenir.
N'attendons pas. Résistons à un président dont les vœux ne sont plus crédibles.
Vivent les citoyens et les citoyennes qui savent résister !

jeudi 30 décembre 2010

Le pessimisme réaliste...





Nancy Huston

C'est en quittant son Amérique natale qu'elle a pu accomplir son destin d'écrivain, cet «être hautement anormal» qui vit dans une solitude peuplée de personnages. Dans son dernier roman, Nancy Huston a choisi d'être Dieu lui-même!

Dans le contre-jour de la lucarne elle est sylphide, de face mutine, dans la minuscule cuisine sous les toits, copine. A Paris, entre Bastille et Marais, Nancy Huston travaille au sixième étage dans un petit deux-pièces blond et bois. Après un café c'est l'heure de la citronnade, et après la citronnade, l'heure de s'en aller. Il est cinq heures, Paris s'estompe dans les nuages.

Trois heures se sont écoulées, le temps d'une conversation sans rendez-vous obligés. Bien sûr, Nancy Huston est canadienne et bilingue, l'épouse de Tzvetan Todorov et musicienne, ancienne élève de Roland Barthes, active dans le mouvement des femmes. Alors, on aurait pu parler des mérites comparés de la neige à Paris et à Calgary. Ou de la sonorité si particulière du clavecin lorsqu'on n'aime plus le piano. Ou de la situation de la femme dans le monde et dans le roman.

Mais, aux propos édifiants Nancy Huston préfère les propos censés et nuancés. C'est l'un de ses grands charmes... Alors, elle rit souvent. Espiègle ou pudique, sardonique ou mutique. Dans tous les cas, cela fait un joli bruit de flûte traversière.
Dans son neuvième roman, une très belle danse macabre, les lecteurs de
La virevolte retrouveront certains personnages: Sean Farrell, Rachel, Derek... C'est l'histoire d'un repas de fête sans famille, un Thanksgiving qui réunit douze amis et un nouveau-né aussi démuni qu'un jésus dans sa crèche. Il fait froid, les premiers amis préparent le repas, les autres arrivent, il se met à neiger, on passe à table. Tout commence: les conversations, les souvenirs communs ou secrets, l'émotion, les confidences, les éclats de rire, la mélancolie.
Une atmosphère qui pourrait faire songer au cinéma de Robert Altman, n'était la façon dont Nancy Huston a décidé d'introduire dans l'histoire un personnage rarissime: Dieu soi-même qui, au terme de chaque chapitre, nous raconte sans vergogne comment il va récupérer chacun des invités qui s'agitent sous notre nez. Mort violente le plus souvent, paisible à l'occasion. Plutôt que chez Altman, nous sommes chez Bergman...

C'est Sean Farrell qui reçoit à dîner. On le connaît, cet adorable grincheux: vous nous l'avez présenté dans La virevolte...
N.H. Rachel, Derek et ses filles ont eux aussi commencé d'exister dans
La virevolte, un roman écrit, comme celui-ci, d'abord en anglais et qui se déroule dans la même atmosphère de petite ville universitaire. A travers eux, je poursuis une vie secrète, américaine, comme si j'avais toute une histoire là-bas... Si j'étais restée aux Etats-Unis plutôt que de traverser l'Atlantique à vingt ans pour Paris, Sean, Rachel, Derek et les autres auraient été mes amis. J'aurais mené le même genre d'existence qu'eux, j'aurais été prof d'université. Jamais écrivain en tout cas!

Pourquoi?
N.H. Il fallait que je quitte ma famille, ma langue, mon monde, que je franchisse une très grande distance pour oser écrire. J'aurais pu, j'en suis certaine, mener une vie normale là-bas.

Parce que vous menez une vie anormale?
N.H. Hautement anormale. Etre seule du matin au soir ici et ne vivre qu'avec des personnes imaginaires, vous trouvez cela normal?

Sean Farrell, c'est vous?
N.H. L'un de mes alter ego plutôt.

Vous êtes nés la même année...
N.H. Et je voulais absolument que le livre paraisse avant mes quarante-huit ans parce que Sean, dans le roman, en a quarante-sept! Je me suis sentie très homme en écrivant ce roman. Les femmes y sont des personnages secondaires. Je voulais comprendre les hommes et Dieu qui en est un, la misogynie, le viol. L'un des personnag
es, Brian, est un vétéran du Vietnam. Il a participé à un viol collectif pendant la guerre. Ils sont des milliers de petits gars à chaque coin de rue aux Etats-Unis à avoir vécu ça... Je voulais l'éprouver de l'intérieur même si je suis par ailleurs capable de le dénoncer politiquement et publiquement. Je trouve très important de ne jamais être dans le militantisme lorsqu'on écrit.

Ça vous plaît de vous engloutir dans un personnage?
N.H. C'est un grand plaisir de ne plus être. Je fais un métier très égoïste qui consiste à avoir une chambre à soi, du temps à soi pour tranquillement disparaître...

En même temps, en écrivant des romans vous démultipliez votre existence...
N.H. Oui. C'est un comportement que personne n'a poussé aussi loin que R
omain Gary*. Il était si blessé par ses départs dans la vie qu'il n'a eu de cesse de changer de lieu, de nom, de milieu et d'écrire sans relâche des histoires. C'est un frère. Comme lui, j'ai eu une enfance instable, marquée par des déménagements fréquents; comme lui, j'ai eu aussi la chance de pouvoir transformer ma détresse en richesse, car l'une des manières de tirer profit de ses identités multiples, c'est de les incarner dans des personnages romanesques. Dans mon premier roman déjà, Les variations Goldberg, je dis je à la place de trente personnes différentes! En effet, je voudrais pouvoir être tout le monde...

Certes...
N.H. Même en temps qu'écrivain je suis divisée, comme Romain Gary, e
ntre deux langues, le français et l'anglais. Mais là où Gary faisait des versions différentes pour des publics différents, je tiens au contraire à ce que mon texte soit rigoureusement le même dans les deux langues. Je traduis moi-même mes romans. Pour en écrire un, il me faut un an, pour le traduire, un an aussi. J'améliore le premier texte grâce au second. André Brink, en Afrique du Sud, fait la même chose.

Vous entretenez de drôles de relations avec vos personnages. Dans Dolce agonia, vous les installez autour d'une table pour Noël, mais dès qu'un chapitre est fini, vous annoncez dans quelles circonstances l'un d'eux mourra un jour précis. A la fin du roman, vous les avez tous tués!
N.H. Tous, nous faisons semblant d'ignorer la mort alors que nous devrions être attentifs, attendris par la mortalité de chacun. J'ai voulu mettre le lecteur en position de détenir ce savoir terrible à l'insu des personnages. Ce que j'ai écrit, c'est une danse macabre. Les personnages tombent puis à nouveau sont là,
autour de la table, et nous, lecteurs, nous sommes riches d'un savoir qu'ils ne possèdent pas. Nous connaissons, au fur et à mesure du livre, le jour et l'heure de leur mort. Je trouve très jouissive cette expérience de lecture, la façon dont on commence à s'impatienter, à attendre le prochain chapitre sur la mort pour se soulager des conversations pesantes, des souvenirs évoqués par les uns et les autres autour de la table. Mais ce n'est pas moi qui les fais disparaître, c'est Dieu - personnage à part entière du roman - qui les rappelle à lui...

C'est bien gentil de la part de Dieu de nous expliquer comment il va récupérer ses ouailles...
N.H. Vous savez, il y a quelque chose d'incroyable dans la Genèse. Le premier jour, Dieu sépare la lumière des ténèbres, «Il y eut une nuit, il y eut un matin», mais ce n'est que le quatrième jour qu'il crée les étoiles, les luminaires «pour séparer la lumière des ténèbres». Donc, il n'était pas satisfait de son travail, il l'a recommencé. En le découvrant, j'ai trouvé ça formidable, comique aussi. Cela me rappelait le débat sur le narrateur-Dieu dans les années 50, celles de l'ère du soupçon. Il n'était plus question pour le romancier de tenir des positions divines, d'être omniscient, omnipotent vis-à-vis de ses personnages. Eh bien moi, en faisant de Dieu un personnage qui lit dans les pensées de tous, qui sait tout, y compris l'avenir, j'assume. Je m'arroge le droit de mettre dans mon roman ce personnage très important de l'histoire humaine. Et je le mets tel qu'on le définit: Dieu est celui qui planifie tout. Même la mort. Même si on n'
y comprend pas grand-chose.

Dieu plutôt que Barthes?
N.H. C'est Romain Gary qui, par sa magie, sa capacité d'enchantement, son inventivité, son refus de la réalité brute, m'a libérée de Barthes, de Sarraute et de Robbe-Grillet. Quand je suis arrivée à Paris, je disais à qui voulait l'entendre que j'avais envie d'écrire. Mais l'époque n'était pas à la littérature considérée comme une activité de luxe. Il fallait tout comprendre, lire Marx, Lacan et soutenir la révolution. Comme j'étais assez ignorante et conformiste, je me suis plongée avec entrain dans l'étude du structuralisme, de la psychanalyse et de la linguistique. Toutes ces théories me semblaient passionnantes même si elles n'étaient pas forcément compatibles entre elles. On peut se demander ce qui serait arrivé si la classe ouvrière avait pris le pouvoir: aurait-on continué à lire Marcel Mauss ou bien serions-nous partis aux champs?

Ah oui! On peut se le demander...
N.H. Bref, après avoir passé une quantité de temps ahurissante à lire Marx et Althusser, c'est le mouvement des femmes qui m'a ramenée à l'écriture. J'ai écrit mes tout premiers textes pour des journaux de femmes,
Sorcières et Histoires d'elles - c'étaient des comptes rendus de livres, des reportages, des textes de réflexion... Là, pour la première fois, grâce à l'amitié et à l'enthousiasme qui régnaient dans ces groupes, l'écriture est devenue pour moi un bonheur au lieu d'un douloureux défi. Mais il a fallu que Roland Barthes meure en 1980 pour que je saute le pas et écrive mon premier roman. Comme si mon surmoi théorique avait disparu avec lui. La joie absolue de dire je à la place de quelqu'un d'autre, je l'ai découverte à ce moment-là.

Fini le structuralisme? Finie la révolution?
N.H. Ce que je peux faire de plus efficace aujourd'hui, c'est écrire des livres. J'aime beaucoup cette réflexion d'Etty Hillesum dans son
Journal, et qui se trouve dans un livre de Sylvie Germain: «Il est justement de bonne économie qu'à des époques paisibles et dans des circonstances favorables des artistes d'une grande sensibilité aient le loisir de rechercher en toute sérénité la forme la plus belle et la plus propre à l'expression de leurs intuitions les plus profondes pour que ceux qui vivent des temps plus troublés, plus dévorants, puissent se réconforter à leurs créations, et qu'ils y trouvent un refuge tout prêt pour les désarrois et les questions qu'eux-mêmes ne savent ni exprimer ni résoudre, toute leur énergie étant requise par les détresses de chaque jour.»

Vous ne regrettez rien?
N.H. Autant je ne regrette en rien mon engagement féministe, autant je suis critique à l'égard de mon gauchisme. J'ai participé à des actions que je réprouve, aujourd'hui, violemment. Quand je lis un livre comme
Le portail de François Bizot, qui parle des prémices du génocide au Cambodge, j'ai honte d'avoir défilé dans les rues de Paris en 1975 en scandant stupidement: «Hô, Hô, Hô Chi Minh!» Comme d'autres gauchistes irresponsables, j'ai contribué indirectement au maintien des régimes communistes dans le monde - et donc à la souffrance et à la mort de beaucoup de mes semblables. Je n'oublie jamais à quel point il est aisé d'avoir des idées, des opinions et j'ai décidé de ne m'occuper que de ce qui me concerne. J'ai défilé au côté des sans-papiers; je descendrai de la même façon dans la rue si le droit à l'avortement demain était menacé. Mais je ne signerai pas de pétitions concernant le conflit israélo-palestinien. J'ai un avis, bien sûr, mais je ne trouve pas que mon avis soit pertinent. Il y a une chose incroyable en France: c'est la propension des gens à polémiquer bruyamment. En écrivant Dolce agonia, un de mes grands plaisirs fut justement de passer d'une tête à l'autre avec aisance, en trouvant tout aussi compréhensible et aimable celui qui juge et celui qui vient d'être jugé rapidement, méchamment. Je n'aime pas la littérature sarcastique. Si l'on se donne la peine d'inventer un personnage, il faut le laisser vivre. Ce n'est pas d'invention qu'il s'agit d'ailleurs. Je me souviens d'Henry Bauchau disant qu'un personnage naît et que, dès lors qu'il est mis au monde, il a le droit d'être entier.

Eprouvez-vous de l'angoisse lorsque vous écrivez?
N.H. Si l'on écrit, ce qu'il faut, c'est être un bon écrivain. Mais, pour cela, il n'y a aucune règle. La liberté est la chose la plus difficile à assumer dans tous les arts. Et c'est la raison pour laquelle les artistes sont hautement anormaux, parce qu'ils supportent une plus forte quantité de liberté que les autres. Ce qui m'angoisse, c'est l'idée de ne pas y arriver. Cela me donne parfois des sueurs froides en pleine nuit ou me rend de mauvaise humeur avec mes enfants. Surtout, l'hypersensibilité qui me permet de faire mienne la vie des autres me rend, par contrecoup, très vulnérable aux malheurs du monde. La lecture du journal me met au bord du désespoir. Les nouvelles, je ne les absorbe qu'à partir de treize heures. D'ailleurs, je suis profondément pessimiste. Mais les pessimistes sont des hédonistes. Germaine Tillion et toute sa petite bande de Ravensbrück ont gardé une vitalité qui dépasse de loin celle des gens normaux. A la différence de nous, elles savent que c'est génial d'être en vie.

De quel pays vous sentez-vous? Quelle actualité vous concerne?
N.H. Toute personne en exil le sait: l'actualité suppose le maintenant mais pas l'ici. Vous n'avez pas la tête remplie des mêmes images que vos frères et sœurs, vous ne regardez pas le même journal de vingt heures. Cela permet de comprendre tout l'arbitraire de la question de l'identité. Car chacun s'identifie à l'actualité, comme si l'actualité du monde vue à travers le prisme de son pays devenait une affaire personnelle. Dans
Pseudo, Romain Gary raconte qu'il s'est découvert planétaire, d'une responsabilité illimitée. Il s'identifiait à la douleur de tout le monde. C'est le thème que j'ai essayé d'explorer dans L'empreinte de l'ange. Dans ce livre qui se déroule à Paris pendant la guerre d'Algérie, je sollicite les lecteurs pour qu'ils s'identifient à la douleur des personnages de plusieurs pays différents.

Dans Dolce agonia, il y a beaucoup d'affection dans la manière dont vous dépeignez vos douze convives, lorsqu'ils prennent, par exemple, discrètement leurs médicaments avant le repas...
N.H. Ils ont entre 35 et 87 ans. Deux ou trois sont dans la cinquantaine, un âge très rarement traité en littérature. «Les choses les plus importantes font défaut dans les livres qu'on écrit et qu'on enseigne. Si peu d'entre eux évoquent le déclin du désir! L'enlaidissement, la fragilité, l'effroi. La douleur qui nous obstrue la gorge», dit Rachel à la fin du roman. C'est un âge émouvant pourtant. Vous avez vécu beaucoup de choses, vous ne pouvez pas faire semblant d'être vierge et en même temps vous n'êtes pas encore croulant, même si vous commencez à perdre vos parents. C'est l'âge aussi des bilans: a-t-on réalisé ses rêves?

Avez-vous réalisé les vôtres?
N.H. La vie que j'ai dépasse de loin ce que je pouvais imaginer. Notamment du côté du succès. Je suis surprise. J'ai reçu plus que je n'escomptais, sur tous les plans. Cela ne veut pas dire que je suis heureuse, le bonheur c'est autre chose. Mais je suis très contente de la vie que je mène. C'est un régal d'être mère, la maternité ne figurait pas dans mes rêves de jeunesse. C'est comme un rêve d'être mariée depuis vingt-deux ans. Oui, je n'ai pas l'impression d'avoir mérité tout ça. C'est comme si j'avais payé tout de suite. La catastrophe a eu lieu dans l'enfance, le reste, c'est du gâteau.

La catastrophe, c'est votre mère qui s'en va pour vivre sa vie quand vous avez six ans. Avez-vous gardé des relations avec elle?
N.H. Je ne la vois plus depuis longtemps, nos relations étaient strictement civiles et cela ne m'intéressait pas d'avoir des relations civiles avec ma mère. Je n'ai commencé à mesurer la perte que lorsque je suis devenue mère. Comment a-t-elle pu couper le lien avec trois enfants: mon frère, ma sœur et moi? C'est devenu de plus en plus opaque; en tout cas, c'est une chose qui ne se répare pas.

Elle s'est vraiment volatilisée du jour au lendemain?
N.H. Oui, elle a fondé une autre famille. Nous ne vivions plus dans le même pays. Mon père s'est installé aux Etats-Unis avec sa nouvelle femme. Le lien que j'avais, petite, avec ma mère était un lien d'absence, exclusivement nourri d'imaginaire et d'évocations à travers ses lettres, ses mots. J'en parle dans
Nord perdu... C'est pour cela que je suis devenue écrivain, parce qu'il y avait dans ma vie quelque chose d'incompréhensible qui requérait un immense et perpétuel effort d'imagination pour tenter de le comprendre. Dans La virevolte, je me suis efforcée de me mettre à la place d'une mère qui abandonne ses enfants. Ecrire permet de tout voir en face...

A condition de trouver la bonne distance...
N.H. C'est une question vitale, une question d'écrivain aussi. Chacun choisit sa distance par rapport à ses personnages. Tout est question de perspective. Où dois-je me tenir par rapport à mon univers? Le Soleil doit-il me paraître énorme ou microscopique? Et les étoiles, celles qui sont mille fois plus grandes que le Soleil, ne sont-elles pour moi que de minuscules points scintillants? Ici, dans
Dolce agonia, la pérégrination se fait de l'extérieur vers l'intérieur. Tantôt on entend ce qui est dit à table, tantôt la façon dont les propos se répercutent dans la tête de l'un ou de l'autre, tantôt ce que les mots provoquent comme souvenirs intimes. Selon mon bon plaisir. J'ai voulu avec ce livre rendre compte de la complexité du cerveau et de l'âme en prélevant parmi les milliers d'informations de nature diverse qui circulent dans un dîner certaines plutôt que d'autres.

C'est tout de même curieux qu'ils soient douze à table...
N.H. C'est un peu la Cène, oui: ils sont douze, comme les apôtres.

Sauf que Jésus est un petit bébé, le treizième invité...
N.H. Et que, comme dans les tableaux de Lorenzo Lotto, il y a une croix au-dessus de l'étable. A peine nés, ils sont déjà morts, voilà l'histoire...

On ne peut s'empêcher de penser à Bergman en lisant Dolce agonia...
N.H. Cela me touche d'autant plus que j'admire beaucoup Bergman. J'ai lu son autobiographie à Stockholm il y a tout juste un an, lors des obsèques de l'écrivain suédois Göran Tunström, qui était un grand ami. Göran savait qu'il ne ferait pas de vieux os et l'on s'était promis que celui qui survivrait finirait le livre de l'autre. C'était un rêve, bien sûr, mais un beau rêve. C'est à lui, G., que je dédie ce livre. Il m'a beaucoup marquée. J'aurais aimé écrire des choses aussi lumineuses que lui. Certains écrivains, je pense aussi à Michael Ondaatje ou à John Berger, arrivent par leurs écrits à vous plonger dans le bonheur. Moi, quand je commence un livre, je me promets de faire rire, sourire, d'offrir de l'harmonie... C'est malgré moi que j'éprouve un fort penchant pour les ténèbres alors qu'au fond, dans la vraie vie, je suis assez gaie... Au grand étonnement des libraires et des lecteurs qui s'attendent parfois à rencontrer une femme catatonique!

Catherine Argand


Quelle démocratie ?


Olivia Zemor arrêtée en Israël

La militante pro-palestinienne française Olivia Zemor a été interpellée à l’aéroport international de Ben Gourion à Tel-Aviv et empêchée d’entrer en Israël.

Olivia Zemor est en taule en Israël. Journaliste -longtemps à l’AFP- Olivia est en France l’irréductible militante des droits des palestiniens. Infatigable, Olivia, quand elle ne se couche pas en travers des rues, hurle, tempête, occupe, boycotte, tracte et colle à longueur de journées. Si le sort fait aux Palestiniens est sa raison de vivre, c’est que cette laïque, membre d’une gauche sans concessions, ne supporte aucune forme de racisme et d’injustice. Moins que d’autres parce que les parents de cette pasionaria athée, Moïse Zemor et Esther Esperance, sont nés juifs. Et qu’Olivia refuse, au nom de la religion de ses ancêtres, qu’on nie à tout un peuple le droit d’exister.

Présidente de la Coordination des Appels pour une Paix Juste au Proche Orient (CPJPO) et de l’association Europalestine Olivia Zemor s’est vue refuser l’entrée sur le territoire israélien, alors qu’elle arrivait là pour y rencontrer des militants du Camp de la Paix. Bien que, par le passé, elle se soit rendue une demie douzaine de fois en Israël, Olivia Zemor a été arrêtée par la police israélienne ce matin mardi 21 décembre à 5h à l’aéroport Ben Gourion de Tel Aviv. Elle a été placée en rétention administrative et privée de son téléphone. Son avocate Léa Tsemel a fait savoir que sa cliente refusait son expulsion. Disons qu’Olivia suit de bonnes traces puisque la dernière femme à avoir été ainsi emprisonnée à l’aéroport est Cynthia MC Kinney, députées américaines et prix Nobel de la Paix. Et noire de peau.

Si quelqu’un se réjouit de voir la trublionne en prison, c’est notre MAM bien aimée, si ridicule dans les oripeaux de ministre des Affaires étrangères. Alors qu’elle était garde des Sceaux (mai oui), Alliot-Marie a rédigé une note aux procureurs afin qu’ils punissent avec une extrême sévérité les citoyens appelant au boycott des produits israéliens importés en France. Quand on sait qu’Olivia était la plus engagée dans cette lutte, nul doute que MAM va se précipiter pour venir à l’aide de cette Française incarcérée à l’étranger.

C.V.


Les lobbies font pression contre les pays

OGM : Greenpeace décrypte le jeu de la diplomatie européenne révélée par Wikileaks

Comme bon nombre de curieux, l'association de défense de l'environnement Greenpeace s'est penchée sur les quelques 250.000 documents diplomatiques révélés par Wikileaks en novembre dernier. Le dossier des OGM est loin d'être vide puisque l'association met à jour les jeux diplomatiques menés sur ce sujet en Europe et notamment en France.

Ainsi dans une note , l'ambassadeur américain à Paris Craig Stapleton explique qu'un syndicat agricole français conseillerait aux Etats-Unis de prendre des mesures de rétorsions envers la France pour pousser le pays à accepter les OGM. Envoyé cette fois-ci de l'ambassade américaine espagnole, une autre note met en évidence les relations étroites qu'entretiendrait l'Espagne et les Etats-Unis et leur stratégie commune pour favoriser le développement des OGM en Europe. "Selon l'un des câbles publiés par Wikileaks, le secrétaire d'État espagnol à l'Environnement, Josep Puxeu, a demandé à l'ambassade américaine de « maintenir la pression » sur Bruxelles pour que les OGM soient favorisés, illustration pour le moins étonnante de la solidarité censée régner au sein de l'Union européenne", commente Greenpeace.

L'affaire fait d'ailleurs grand bruit en Espagne alors que l'opinion des Espagnols sur la question des OGM est majoritairement négative : selon le dernier, 50 % d'entre eux estiment qu'ils ne faut pas les encourager contre 27% d'avis favorable et 23% sans avis.

c.v.

lundi 27 décembre 2010

jeudi 23 décembre 2010

La langue de bois décryptée avec humour


Une vidéo extrait d'une conférence de Franck Lepage de la SCOP le pavé, coopérative d'éducation populaire.

http://www.youtube.com/watch?v=oNJo-E4MEk8

(relayé par Y.B pour MCD)

Die 26150 : Bientôt les Rencontres de l'Ecologie 2011


Les Rencontres de l’Ecologie au Quotidien de Die 2011

L’ Ecologie dans nos pratiques quotidiennes aux Rencontres de Die au pied du Vercors.

Un cheminement d’ Education Populaire

Organisées par l’association Ecologie au Quotidien, les 9èmes Rencontres de l’écologie au quotidien de Die se déroulent du 21 janvier au 06 février 2011. Chaque année, une centaine d’invités et plus de 10 000 entrées (en 2010), 4000 heures de bénévolat, une cinquantaine d’associations partenaires sont les ingrédients de cette rencontre régionale originale. "Et toujours cette diversité de l’offre, conférences, débats, cinéma, concerts, théâtre, repas bio, librairie, ateliers pratiques, spectacles enfants et adultes, 20 expositions, visites d’éco-sites, animations scolaires, jeux coopératifs, etc.… qui permet de sensibiliser les publics de différentes manières" explique la chargée de mission, Anne Tesson. « De très nombreux thèmes sont abordés : solidarité Nord-Sud, Economie Sociale et Solidaire, Education à la Paix, Communication Non-Violente, transports doux, analyses critiques, transformation sociale, valorisation du territoire et de ses acteurs, Education à l’Environnement, luttes sociales, alimentation et agriculture biologiques, féminisme, médecine alternative, protection des biodiversités animales et végétales, pollutions, jeux coopératifs, relocalisation de l’économie, auto et éco-construction, énergies renouvelables, préservation des sols et de l’air, poésie, migrations humaines, peuples racines, le vieillissement, la maladie, pacifisme, précautions avec la forêt et l’eau, désobéissance civiques et permettent de toucher toutes et tous quelles que soient leurs sensibilités qui ont fait la richesse de ce festival Rhône-Alpin" conçoit une administratrice Annick Paoli .

Marier écologie sociale, écologie environnementale et écologie personnelle (Félix Guattari)

Ecologie au Quotidien présente donc les IX ème Rencontres de l’Ecologie au Quotidien du Diois autour du thème "Grandir en humanité» en écho au philosophe Patrick Viveret. « C’est un temps pour reprendre espoir et se remobiliser sur des dynamiques citoyennes sur nos territoires et participer à une véritable éducation populaire » explique Anne Tesson, chargée de mission de l’association.

« Le succès des Rencontres de l’Ecologie au Quotidien de Die, confirme l’émergence d’une société civile active sur un territoire dynamique où des convictions d’écologie, citoyenneté, fraternité et paix veulent se conjuguer avec bonheur »explique Annick de Ecologie au Quotidien.

Il y a onze ans, quelques habitants s’inquiétaient :" Pourquoi un territoire où le terreau social, agricole, écologique, culturel et artistique si fertile n’offre pas un événement de qualité à la hauteur de ses valeurs et de son identité ?". Depuis 2001, huit Rencontres de l’Ecologie au Quotidien ont esquissé des réponses. Douze à Quinze journées de mobilisation et un travail en profondeur toute l’année, d’abord des habitants et 60 associations d’éducation à l’environnement, d’éducation populaire, de protection de la nature et de défense des droits de l’homme, sont offertes chaque année à Die. Le thème "Grandir en humanité » donne le "la" à la manifestation. Chacun, pendant ces rencontres, vient faire son panier dans la diversité des actions : l’eau, l’agriculture biologique, les migrations humaines, le reboisement, économie sociale et solidaire, alerte au climat, luttes sociales, biodiversité, non violence, éco-logement, éducation à l’environnement, paysans sans terre, démocratie participative, l’ intelligence collective ...

La pluralité des intervenants permet aussi de toucher tous les publics. Réinventer « une pensée locale pour un développement local dans une réflexion globale et un développement global » s’affirme comme la colonne vertébrale de cet évènement se référant à la Formule d’ Edgar Morin.

Que mille réseaux s’épanouissent

Ainsi naissent des réseaux au cœur des Rencontres de l’Ecologie valorisant ainsi acteurs et territoire. « Plusieurs milliers de visiteurs fêtent l’Ecologie et la vie, et les organisateurs donnent une large place au débat public. En plein hiver, avec rien à vendre, l’événement aurait pourtant pu faire figure de challenge. " Nous semons, le terreau est déjà là. Information, sensibilisation, formation, échanges sont autant d’outils que les gens viennent chercher afin de s’engager dans leur quotidien. Sans prétention, nous essayons d’ensemencer des terres de solidarité, de générosité, de luttes, de conscience et de paix pour un futur vivable et désirable par tous. C’est un espace qui enrichit la démocratie...et "où le peuple est très populaire", un clin d’œil à Victor Hugo.." précise Annick Paoli.

Cette action s’inscrit dans une trame historique propre au Diois avec sa tradition d’innovation et d’accueil de nouvelles idées, technologies et savoir-faire : agriculture biologique dans les années 70, diversification des productions en particulier de plantes aromatiques, médicinales et à parfum dans les années 80 (et ses micro-entreprises), une forte présence de personnes sensibles à l’alimentation bio ( 520 familles adhérentes à la Carline soit 1800 consommateurs ), la mise en place d’une charte de territoire et agrément "d’un pays" porteur d’une identité et d’une sensibilité propres. Et finalement la labellisation comme BioVallée.

La simplicité volontaire.

« Travailler moins et consommer moins pour vivre mieux, c’est-à-dire choisir la simplicité volontaire. Comment la mettre en oeuvre ? Comment commencer ? Comment se libérer d’Internet ? Comment travailler moins pour vivre mieux ? Vivre de façon simple à la campagne est une réalité pour la moitié de la population mondiale et reste réalisable au Nord. Des exemples sont emblématiques. La cuisine solaire est efficace même au Nord. Enfin, plutôt que d’utiliser du béton dans la construction et la rénovation, le chanvre est une alternative qui permet de faire vivre toute une filière locale de sa culture à sa mise en ouvre » esquisse Olivier Robin qui milite à l’association depuis 2002.

C’est parce que les habitants de pays comme le Burkina Fasso vivent chichement en pesant peu sur les ressources de la planète qu’un français moyen peut se permettre de consommer 8 fois plus et un américain 15 fois plus. La terre est un espace fini avec des ressources limitées. Le partage des ressources ne se fera pas sans heurts si les pays les plus nantis ne font aucun effort pour se restreindre... L’empreinte écologique (surface de planète estimée nécessaire pour assurer la production de notre nourriture, nos vêtements, notre énergie, nos recyclages de déchets et nos émissions de CO2...), vulgarisée par le WWF en 2002 à Johannesburg, fait ressortir que chaque terrien use 2,7 hectares et que si chaque humain voulait vivre comme un français, il faudrait 3 planètes et 7 planètes pour vivre comme un américain. Nous ne disposons actuellement que de la seule terre et il est utopique d’imaginer " de garder notre système de consommation-prédation actuel dans les pays riches".

« Nous devons donc nous engager volontairement vers une « sobriété heureuse » ( F.Brune) ou une « Simplicité volontaire » (P.Rabhi)... sur nos territoires. Non, la qualité de vie n’en pâtira pas : combien sont possibles les champs de la croissance des relations humaines de voisinage, amicales, familiales, associatives, de temps partagés avec nos enfants ou de temps de plaisir : musique, artistique, ballades, connaissance de la flore, faire du vélo ou des recherches sociologiques, de la relaxation ou l’apprentissage du jardinage... où 1000 fleurs peuvent nous épanouir, sans détruire, piller ou polluer... Sur nos territoires, l’exemple individuel doit être complété par l’exemplarité de collectivités locales afin de réviser nos certitudes… » conclue Anne Tesson : " Viendra un jour le temps des choses légères"...

Métamorphoser tout un Territoire

Dans le cadre des commissions constitutives (1999-2000) de l’Espace Social et Culturel de Die et du Diois, puis des "Carrefours" et plus particulièrement le " Carrefour Vie Locale" (2001-2002), des habitants du Diois se sont retrouvés régulièrement pour réfléchir " à une sensibilisation des habitants sur le thème de l’écologie ". Aujourd’hui plus de 50% des Dioises et Diois ont fréquenté les Rencontres de Die.

Après plusieurs réunions, plus que l’organisation d’une foire ou d’un festival, " c’est un travail pédagogique autour de nos gestes quotidiens envers les jeunes et les adultes et une valorisation des acteurs du Diois liés à l’écologie" qui a été choisi par le groupe "Ecologie au Quotidien". " Ecologie au Quotidien" a l’objectif de mettre en réseau des associations de l’ensemble de la vallée de la Drôme afin de mutualiser les informations, actions et projets allant dans le sens de l’Ecologie et des valeurs humanistes. Ce réseau est un enrichissement de la société civile sur nos territoires, le résultat d’une responsabilisation de ses acteurs face aux enjeux de société et une volonté de travailler en commun pour un " Mieux vivre ensemble". Une écocitoyenneté en action. A ce jour, des associations de la Communauté des Communes du Val de Drôme, de Crest, de la C.C de Saillans et de la C.C du Diois participent à la construction du projet des "Rencontres de l’Ecologie au Quotidien". Cette synergie sur les différents territoires préfigure la mobilisation de la société civile sur ce projet de "développement humain durable" et sur un espace de cohérence et de cohésion que l’on appelle « Bio-Vallée ». C’est sur l’ensemble de ces territoires que les Rencontres de l’Ecologie au Quotidien rayonnent. La commune de Die, les Communautés des Communes du Diois et du Val de Drôme, le Parc Naturel Régional du Vercors, le Conseil Général de la Drôme, la Direction Régionale de l’Environnement (DIREN), le Conseil Régional Rhône-Alpes (Biovallée®), etc… sont partenaires du projet et de l’ action.

L’espèce humaine face à son devenir

Comment se fait-il que l’humanité, en dépit des ressources planétaires suffisantes et de ses prouesses technologiques sans précédent, ne parvienne pas à faire en sorte que chaque être humain puisse se nourrir, se vêtir, s’abriter, se soigner et développer les potentialités nécessaire à son accomplissement ?

Comment se fait-il que la moitié du genre humain, constituée par le monde féminin, soit toujours subordonnée à l’arbitraire d’un masculin outrancier et violent ?

Comment se fait-il que le monde animal, à savoir les créatures compagnes de notre destin et auxquelles nous devons même notre survie à travers l’histoire, soit ravalé dans notre société d’hyper consommation à des masses ou à des fabriques de protéines ?

Comment les mammifères auxquels j’appartiens ont-ils pu se croire le droit d’exercer d’innombrables exactions sur le monde animal, domestique ou sauvage ?

Comment se fait-il que nous n’ayons pas pris conscience de la valeur inestimable de notre petite planète, oasis de vie au sein d’un désert sidéral infini, et que nous ne cessions de la piller, de la polluer, de la détruire aveuglément au lieu d’en prendre soin et d’y construire la paix et la concorde entre les peuples ?

Ces questions qui demeurent à ce jour sans réponse mettent en évidence la faillite de notre conscience et l’obscurantisme dans lequel nous évoluons en dépit de nos connaissances. C’est à tout cela que les Rencontres de Die veulent éveiller….

Pour un territoire vivant et solidaire

« Développer une éco-citoyenneté en participant à la prise de conscience que ce n’est qu’en modifiant nos modes de vie et nos comportements que nous pourrons éviter une catastrophe écologique majeure au niveau mondial. Sensibiliser et responsabiliser les jeunes et les adultes au respect de l’environnement dans les gestes quotidiens pour un "mieux vivre " sur le territoire et sur la planète. Mettre en valeur la spécificité du territoire Diois en valorisant les acteurs locaux, projets, actions et entreprises liés à la qualité environnementale. Créer une dynamique locale favorable au respect de tous et à la reconnaissance de chacun. Pour ce faire, contribuer à travers des actions conscientisantes à structurer le territoire en fédérant des associations autour de valeurs écologistes et humanistes à travers des actions locales. Développer la connaissance, auprès d’un public non averti, de l’impact des gestes individuels et des choix de consommation sur l’environnement et sur notre santé. Informer et donner des pistes pour des modes de vie plus responsables et plus écologiques. Engendrer une solidarité pour un projet commun de territoire vivant et de "haute qualité humaine". Valoriser l’Agriculture Biologique à partir de son impact sur l’environnement et sur la santé pour développer le réseau de producteurs, de consommateurs et de distributeurs de produits biologiques. Enclencher un processus de sensibilisation et d’action sur tout le territoire et l’évaluer au cours de l’année suivante. Faire travailler des partenaires ensemble sur un projet commun, avec des responsabilités partagées. Nourrir un terreau afin que germent des initiatives en matière de citoyenneté et d’écologie » précisait Thierry Geffray, alors président de la Communauté des Communes du Diois dans son discours inaugural en 2008.

Un Temps Fort au cœur de l’Hiver

Une soixantaine de bénévoles, des animateurs, des élus, des écoles se sont mobilisés autour du projet " Ecologie au Quotidien". Une restitution-évaluation de ce travail a eu lieu au printemps 2010 lors des " Rencontres de l’Ecologie au Quotidien ». Cette manifestation est organisée à la salle polyvalente de Die, dans les écoles, à l’écosite des Amanins de Crest, au cinéma, à la médiathèque, à l’Arrêt-Public lieu associatif et autres sites du Diois, du Crestois et du Vercors (Villard de Lans). Ces 15 jours sont un moment privilégié de rencontres, de retissage de lien social,de frictions des idées, de découverte du travail sur le territoire, de réappropriation de la mémoire afin de construire une identité collective forte, de redynamisation de nos énergies respectives. L’événement est un acte significatif d’engagement local et global des habitants pour la planète.

Contact :

Ecologie au Quotidien

DIE, Rhône-Alpes, France

Le Chastel 26150 DIE

Tel : 04 75 21 00 56

Courriel : ecologieauquotidien@gmail.com

Sites : www.ecologieauquotidien.fr

Blog : http://ecologieauquotidien.blogspot.com

Claude Veyret

Veyret.claude@wanadoo.fr

(Lire la suite du programme 2011, sur…

http://mediascitoyensdioisdebats.blogspot.com/2010/12/rencontres-regionales-de-l-ecologie-de.html)