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mardi 30 novembre 2010

Il neige...une occasion de ralentir.


Neige à Die : 2 cm ce soir mardi 30 novembre…
12 cm à Val Maravel…19 à Salle, commune de Luc en Diois…Une occasion de ralentir...

Mise à jour 21 H 6 cm à Montmaur en Diois !!

Prudence donc demain matin !!!

Divulguer toutes les infos ?


Publier des documents secrets, confidentiels, volés ou réappropriés… voila un beau débat en perspective. Yannick Barazer, administrateur et rédacteur de http://mediascitoyens-diois.blogspot.com/ avait attiré notre attention, il y a quelques mois, sur ce type d’informations et surtout les méthodes d’investigation et de divulgation. J’imagine le débat ouvert et les avis très partagés. Nous avons pris le temps (sloo-presse) de réfléchir comment cette réappropriation d’informations peut aider la réflexion de chacun et renforcer le pouvoir d’ agir de tous. Personnellement j’ y trouve une (petite) chance de démasquer les manipulations et de réoxygéner la démocratie. Mais la plume est à vous.

Claude Veyret , veyret.claude@wanadoo.fr

« Fuites ? » de Wikileaks : Des centaines de documents sortis de l’ombre…

La France est aussi visée par le flot de documents « confidentiels » américains que WikiLeaks s'apprête à rendre publics, a rapporté samedi le site français owni.fr, qui a précisé que les premières publications devraient intervenir dimanche soir.

«Entre 500 et 1.000 envois concerneraient directement la France», indique owni.fr, généralement bien informé sur ces fuites du site spécialisé Wikileaks.

Fin octobre, owni, site d'informations indépendant basé à Paris, avait réalisé l'interface permettant la consultation des 400.000 documents secrets de l'armée américaine sur la guerre en Irak rendus publics par WikiLeaks.

Selon owni, le New York Times, l'hebdomadaire allemand Der Spiegel ainsi que les quotidiens britannique Guardian, espagnol El Pais et français Le Monde, déjà partenaires de WikiLeaks lors des révélations sur l'Irak, publieront leurs premières analyses des nouveaux documents dimanche. «On s'attend toutefois à des fuites avant cette heure», a déclaré un dirigeant d'owni.

Selon le site, Der Spiegel a déjà mis en ligne des «repères chiffrés» de cette rafale de documents sur son site internet avant de les retirer quelques minutes plus tard. Et selon ces repères relayés par owni, 251.287 mémos diplomatiques, dont 16.652 classifiés «secrets», devraient être publiés.

Wikileaks a promis lundi une prochaine publication sept fois plus volumineuse que les 400.000 documents confidentiels récemment publiés sur la guerre en Irak.

Selon le département d'Etat américain, il s'agit de câbles diplomatiques émanant de ses ambassades. Ces documents à usage interne, très embarrassants pour Washington, concerneraient notamment la Russie, la Turquie, le Moyen-Orient et des pays d'Europe de l'Ouest, selon des médias locaux.

Les informations Wikileaks révèle des pratiques d'espionnage plus ou moins de Haute Technologie.

Au programme : vol de mot de passe à l'ONU, Google en la Chine, le roi d'Arabie Saoudite et les puces sous-cutanée...

Un plus pour la Démocratie

Il faudra encore du temps pour digérer les 251.287 documents du département d'Etat américain publiés par WikiLeaks ce week-end. Certains détails lèvent toutefois le voile sur des pratiques glauques d'espionnage au plus haut niveau.

L'espionnage des officiels étrangers à l'ONU

La liste tient sur plusieurs pages. Le département d'Etat américain a notamment demandé à ses diplomates et agents secrets, le 31 juillet 2009 de mettre la main sur les noms, mots de passe et clés cryptées des réseaux privés utilisés par plusieurs délégations (dont la France, la Chine, le Japon et Ban Ki-moon ( président de l’ ONU) en personne) pour leurs communications. Dans une intervention, un ancien diplomate britannique a minimisé l'importante de ces révélations, expliquant qu'il s'agissait surtout d'un «espionnage bureaucratique». John Bumgarner, de l'U.S. Cyber Consequences Unit, expliquait que «tous les pays» recourent au cyber-espionnage politico-industriel.

Base de données biométriques

Wired relève également que des diplomates, surtout en Afrique, étaient chargés de collecter des données biométriques des leaders: ADN, empreintes digitales ou encore scan de l'iris.

Google et la Chine

L'attaque contre Google en Chine, en janvier dernier avaient fait grand bruit. Le département d'Etat s'en était mêlé et le ton était monté entre Pékin et Washington. Des experts avaient pointé un doigt accusateur vers la Chine, mais à aucun moment Hillary Clinton n'avait directement mis en cause Pékin. C'est désormais chose faite : «Le Politburo chinois a dirigé l'intrusion sur les systèmes de Google, selon un contact chinois de l'Ambassade américaine. Ce hacking fait partie d'un effort de sabotage mené par les autorités gouvernementales, des experts privés en sécurité et des pirates recrutés par le gouvernement. Ils se sont introduits sur des ordinateurs du gouvernement américain et de ses alliés occidentaux, du Dalaï Lama et de grandes entreprises, depuis 2002», dit un mémo.

Les suggestions du roi d'Arabie Saoudite.

Que faire des détenus de Guantanamo, une fois qu'ils seront relâchés ? Le roi Abdallah a fait une suggestion au chef de la lutte antiterroriste américain, John Brenner, tout droit sortie d'un mauvais film d'espionnage : implanter des puces sous-cutanée pour les suivre à la trace. «Ça marche sur les chevaux et les faucons», explique-t-il. Brennan répond : «Les chevaux n'ont pas de bons avocats» et lui explique qu'une telle mesure ferait face à de nombreux obstacles juridiques aux Etats-Unis.

WikiLeaks : Bientôt des révélations sur les banques américaines

De quoi déclencher une enquête et des réformes, affirme Julian Assange...

WikiLeaks, Robin des bois des temps modernes ? Après la publication de mémos secrets sur l'Irak, l'Afghanistan et la diplomatie US, le site s'apprête à publier des documents sur une grande banque américaine. Interrogé par le magazine, le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange refuse de donner le nom de cet établissement, toujours en activité, mais dit s'attendre à ce que cette divulgation conduise à des enquêtes.

Créé en 2006, Wikileaks s'est rendu célèbre en quelques mois en publiant des milliers de notes confidentielles militaires sur l'Afghanistan et l'Irak, puis tout récemment 250.000 câbles diplomatiques du département d'Etat américain.

«Système de corruption»

«Nous avons du matériel relatif à une banque, c'est une énorme fuite. Ce n'est pas une échelle comparable aux notes sur l'Irak (400.000 documents), mais ce sont des dizaines ou des centaines de milliers de documents, selon la manière dont vous les définissez», déclare Julian Assange, qui publie l'interview sur son site.

«Cela donnera une vision interne authentique et représentative du comportement lamentable des banques au niveau de leur direction, sous un angle qui stimulera des enquêtes et des réformes, j'imagine», ajoute-t-il. «On peut appeler cela l'écosystème de la corruption. Mais c'est aussi le processus de décision ordinaire qui ferme les yeux sur et soutient des pratiques non éthiques : la supervision qui n'a pas lieu, les priorités des dirigeants, comment ils pensent satisfaire leur propre intérêt.»

Julian Assange ajoute que son site possède des documents concernant de nombreux gouvernements, dont la Russie, et des entreprises, notamment pharmaceutiques.

Julian Assange, le hacker devenu agent de renseignements du peuple. (Les rumeurs sur sa personne et sa vie privée ne nous intéresse pas ; ndlr)

En quelques mois, WikiLeaks est devenu la bête noire des Etats-Unis. Mais si le site qui met en ligne les documents les plus secrets est un travail collectif. Beaucoup voient, en ce travail, le symbole de la transparence, l’agent de renseignements au service du peuple.

«Subversifs internationaux» unissez vous…et dispersez vous.

Un combat fondateur : Garantissant l’anonymat à ses informateurs, Julian Assange fonde WikiLeaks en 2006. Désormais certains de ses compagnons de route, projettent de lancer des sites complémentaires. La guérilla contre la guerre de tranchée… une pratique qui a pris pas mal de conservatisme au dépourvu. Et un vieux débat selon Richard Taber : « la guérilla a pour but politique de renverser une autorité contestée par de faibles moyens très mobiles utilisant les effets de surprise et avec une forte capacité de concentration et de dispersion ».

« Le Chamois des Alpes bondit »

« La guérilla informative » est une guerre de conquête du cœur et de l’esprit. Lorsque le cœur et l’esprit sont touchés, l’animal social (zôon politikon) est acquis sans recevoir une seule balle ou un seul éclat d’obus.

La guérilla naît et se développe dans un environnement politique et à travers un combat constant pour contrôler le domaine de la mentalté politique inhérent à l’animal social qu’est l’humain. La collectivité humaine constitue l’environnement et le contexte qui orientent et délimitent les configurations et les activités possibles de la guérilla, dans la perspective de la théorie des contextes en écopolitique d’une approche écosystémique ( E.Morin). C’est en ceci que l’expression de Mao Zedong du “guérillero dans la population, comme un poisson dans l’eau” devienne claire et intelligible dans sa largeur et sa profondeur. En effet, une guérilla conquérante est celle qui correspond à une réponse appropriée au contexte socio-politique et à l’environnement physique. En effet, la guerre et la guérilla sont des formes de communication dans laquelle sont immergées différentes parties prenantes. C’est une forme de relation orientée vers un certain but.

La conception de la guérilla comme une lutte politique a placé les opérations psychologiques au rang des facteurs décisifs pour obtenir des résultats favorables. Alors, la cible à atteindre des guérilleros (résistants) est le cœur et l’esprit de la population, toute la population, les adversaires et surtout la population civile attentiste ( voire le pétainisme) dont l’adhésion ou la désertion fait la différence entre la victoire ou la défaite de la guérilla.…Mais on est déjà dans le Débat.

C.V. pour Apis

- Albert Merglen, La guerre de l'inattendu, Arthaud, Paris, 1966

- Daniel Ventre, La guerre de l'information, éd. Hermès Lavoisier, 2007.

- Daniel Ventre, Information Warfare, Wiley - ISTE, 2009.

Die 26150 : Conférence sur Tolstoî au Baradie


Conférence - La philosophie de Tolstoï

Léon Tolstoï - comte Lev Nikolaïevitch Tolstoï (en russe : Лев Николаевич Толстой) -, né le 28 août (calendrier julien)/9 septembre 1828 à Iasnaïa Poliana en Russie et mort le 7 novembre (calendrier julien)/20 novembre 1910 à Astapovo, est un des écrivains majeurs de la littérature russe, surtout par ses romans et ses nouvelles, riches d'analyse psychologique et de réflexion morale et philosophique.

Ainsi, l'une de ses grandes œuvres, Guerre et Paix (1869), est une reconstitution historique et réaliste des guerres napoléoniennes en Russie, mais c'est aussi une réflexion sur la violence inspirée par des conflits comme la guerre de Crimée (1853-1856) durant laquelle il a été mobilisé et qu'il relate dans Récits de Sébastopol.

Par ailleurs, Tolstoï entame à partir des années 1870 une quête spirituelle et religieuse qui se reflète dans ses œuvres : il multiplie alors les considérations philosophiques qu'il mêle aux événements romanesques comme dans Anna Karénine, l'histoire d'une passion dramatique dont la publication finale date de 1877, et plus encore dans Résurrection (1899), où le héros en plein débat moral rencontre la figure du Christ.

À la fin de sa vie, il devient une sorte de maître à penser prônant une vie simple et morale et combattant les institutions oppressives et les formes de violence.

Sa critique des institutions oppressives et sources de violence inspirera le Mahatma Gandhi, ainsi que Romain Rolland. Leur message sera ensuite repris par Martin Luther King, Steve Biko, Aung San Suu Kyi, Nelson Mandela et bien d'autres. Gandhi traduira de Tolstoï Lettre à un Hindou en 1908, où l'écrivain russe dénonce des actes de violence de nationalistes indiens en Afrique du Sud ; ceci amènera Gandhi et Tolstoï à correspondre jusqu'à la mort de Tolstoï. De même, Rolland publiera peu après le décès de Tolstoï sa biographie : Vie de Tolstoï.

De son côté, l'Église orthodoxe excommunie Tolstoï après la publication de son roman Résurrection.

Tolstoï anarchiste mystique.

Tolstoï s'est toujours réclamé de son héritage chrétien et a tardivement formalisé son anarchisme politique à travers l'expression d'une mystique de la liberté tout entière enracinée dans l'exemple christique. Le bien-fondé de l'autorité et de toute forme de pouvoir visant à la limitation de la liberté personnelle fut dénoncée par Tolstoï dans de nombreux articles à tonalité résolument anarchiste et motivés par une foi réfléchie dans l'injonction christique du service de l'autre. Le paradigme social dérivé de ladite règle d'or est célébré par Léon Tolstoï comme celui d'un monde voué à l'épanouissement de tous dans le respect réciproque et l'exaltation personnelle.

Ses écrits présentant quelques similitudes avec le bouddhisme influenceront les anarchistes mystiques russes du début du XXe siècle, parmi lesquels Georges Tchoulkov, Vassili Nalimov ou Alexis Solonovitch. La conjonction de ces deux dimensions, mystique et anarchiste, dans maints écrits de Tolstoï, feront forte impression sur le jeune Gandhi. Ce dernier entrera en contact avec Tolstoï, une correspondance s'ensuivra, et Gandhi se réclamera toute sa vie de la pensée de Tolstoï, dont il disait être un « disciple ».

Galerie Kaléidoscope Die (Diois)

3 décembre 2010 - 3 décembre 2010

- 14 h en seconde au Collège de Die.

- 15 h les premières du Lycée de Die.

Pour le centenaire de la mort de Léon Tolstoï.

Conférence d’Elena Vanslova.
Galerie d’art Baradie

- A 18 h Table Ronde au Bar

26150 Die

Rue Emile Laurens

Contact : - Tel : 04 75 22 00 81

Tout public

Un nouveau Préfet de Région


Un nouveau préfet de Région

Jean-François Carenco a été nommé ce mercredi en conseil des ministres préfet du Rhône et de la région Rhône-Alpes. Comme Jacques Gérault, son prédécesseur, il a un profil politique. Mais lui semble plus sensible aux problématiques sociales et écologiques. Premiers éléments de portrait d’un "gars entier".

Ils étaient huit sur les rangs pour représenter l’Etat dans la 2e région de France. C’est finalement le favori qui l’a emporté, nommé ce mercredi en conseil des ministres préfet du Rhône et de la région Rhône-Alpes. Le promu affiche un beau pedigree, diplômé de l'ENA et de HEC. Comme nombre de hauts fonctionnaires, cet homme de 58 ans a beaucoup voyagé : il a fait ses classes au tribunal administratif de Marseille, a été envoyé en Nouvelle-Calédonie, avant de devenir en 1997 préfet de Tarn-et-Garonne.

Ami de Jean-Louis Borloo

Ce poste, il l'a aussi occupé en Guadeloupe, en Haute-Savoie puis en Seine-Maritime en 2006 où il a pour la première fois été préfet de Région. Il y est resté un an avant d'occuper les mêmes fonctions à Toulouse. Mais Carenco n’est pas seulement un fonctionnaire, il a aussi un profil politique, comme l’avait Jacques Gérault, très proche de Nicolas Sarkozy. Lui est ami de Jean-Louis Borloo et l’a rejoint au ministère de l'Emploi et de la cohésion sociale en 2005 en devenant son directeur de cabinet. Et l’a suivi au ministère du Développement durable en occupant le même poste.

"Capable de gros coups de gueule, comme de grandes émotions"

Son accession à la tête de la préfecture du Rhône – une promotion qui couronne sa carrière – doit beaucoup à l’ex-numéro deux du gouvernement. L’Elysée a sans doute voulu faire un geste à l’égard de Borloo en réservant une si belle porte de sortie à son ex-collaborateur. C’était aussi nécessité tant le cabinet du ministère du Développement durable a été fortement remanié, avec l’arrivée de Nathalie Kosciusko-Morizet.

Natif de la Gironde, Corenco apparaît à plusieurs titres comme un anti-Gérault. Là où l’ancien préfet semblait publiquement toujours d’humeur égale, neutre, lui est dépeint comme un "gars entier, capable de gros coups de gueule, comme de grandes émotions" , selon un collaborateur de Jean-Louis Borloo qui a travaillé à ses côtés. Il porte une attention particulière aux sujets sociaux, "à tout ce qui touche à l’humain" , quand Gérault est surtout préoccupé par l’ordre public. Bien sûr, le nouveau préfet est sensible aux enjeux de développement durable, au cœur de sa précédente mission. On peut attendre de lui une impulsion nouvelle sur les problématiques d’énergie renouvelable dans une région très nucléarisée, sur l’agriculture biologique ou les transports alors que plusieurs projets autoroutiers sont sur les rails.

Fabien Fournier

Economie Sociale et Solidaire en Rhône-Alpes

Les premiers Etats Généraux de l’économie sociale et solidaire en Rhône-Alpes

Vendredi 3 décembre 2010, à partir de 13h45 au siège du Conseil régional Rhône-Alpes 78 route de Paris à Charbonnières-les-Bains

Edito :

Le 3 décembre la CRESS Rhône-Alpes, le Conseil Régional Rhône-Alpes et le Réseau des Territoires de l’Economie Solidaire ouvrent officiellement les Etats Généraux de l’ESS en Rhône-Alpes. Ceux-ci sont initiés, au niveau national, par le Labo ESS en partenariat avec le Conseil National des CRES, la CPCA, RTES et le Mouvement pour l’Economie Solidaire ; ils constituent un rendez-vous important pour l’ESS. L’objectif des Etats Généraux est de produire des propositions émanant de l’ESS pour répondre aux enjeux de société et argumenter sur leur valeur ajoutée par comparaison avec les réponses classiques. Bref, il s’agit de promouvoir et réaliser dans les faits le potentiel d’initiatives, d’innovations et de valorisation économique que recèle l’ESS. Aussi, les Etats Généraux doivent être constitutifs d’un Projet politique de l’ESS pour la société française ; un projet s’appuyant sur des propositions économiques et sociales devant se formaliser à travers des cahiers d’espérances. Au regard des enjeux politiques économiques et sociaux à venir, nul doute que chacun comprendra l’enjeu stratégique que représente pour l’ESS ces Etats Généraux.

Aussi, mobilisons nous !

Laure Chareyre,

Présidente de la CRESS Rhône-Alpes.

CRESS Rhône-Alpes
11 rue Auguste Lacroix
69003 LYON

Tél : 04 78 09 11 97
Fax : 04 72 78 42 92
mail : info(arobase)cress-rhone-alpes.org

Urgence de délégitimer l' arme nucléaire...



Jean-Marie MULLER

508 rue du moulin

45400 - CHANTEAU

Le 28 novembre 2010

Lettre ouverte aux évêques de France

L’urgence de délégitimer l’arme nucléaire

- Permettez-moi de venir dialoguer avec vous sur un sujet dont l’enjeu me semble essentiel pour l’avenir même de notre civilisation, je veux parler de l’arme nucléaire.

- Le 8 août 1945, deux jours après l’explosion de la bombe atomique sur Hiroshima, un jour avant qu’une seconde bombe ne soit lancée sur Nagasaki, Albert Camus publie dans Combat un article dans lequel il s’indigne des « commentaires enthousiastes » qui saluent cette performance technologique. Une telle célébration lui paraît indécente. Il résume son commentaire d’une phrase : « La civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie 1. »

- Dans les dernières années de sa vie, Georges Bernanos, dont vous connaissez l’intransigeance évangélique, n’a cessé de protester contre la bombe atomique avec toute la vigueur dont il savait être capable. Intolérant, Bernanos ? Oui, en ce sens qu’il a la conviction que « la civilisation de la bombe atomique » est intolérable et que, face à elle, l’homme raisonnable ne peut qu’opposer l’objection de sa conscience : « À un monde de violence et d’injustice, au monde de la bombe atomique, on ne saurait déjà plus rien n’opposer que la révolte des consciences, du plus grand nombre de consciences possible 2. » En octobre 1946, il écrivait encore : « La barbarie polytechnique menaçante n’a plus devant elle que des consciences 3 . » Mais force est de reconnaître que l’appel de Bernanos à la révolte des consciences n’a pas été entendu. Les hommes – du moins le plus grand nombre d’entre eux - ne se sont pas révoltés, ils se sont habitués, résignés, accommodés, adaptés, soumis. Ils ont démissionné. Ils ont accepté l’inacceptable. Le petit nombre des hommes qui ont voulu résister ont dû subir, impuissants, la loi du grand nombre. Aujourd’hui, la prolifération des armes nucléaires fait peser sur l’humanité le risque de sa destruction. Cette course aux armements nucléaires est la résultante de multiples démissions : morales, intellectuelles, spirituelles et politiques. Pourtant, aucun d’entre nous ne peut croire que l’histoire des hommes soit soumise à la fatalité.

Ne nous y trompons pas : l’enjeu de l’arme nucléaire n’est pas d’abord militaire ; il est moral, il est politique et, en premier lieu, il est spirituel. Il est existentiel. Il ne s’agit pas d’abord de savoir par quels moyens nous devons défendre notre société, mais de savoir quelle société nous voulons défendre. Il s’agit de savoir quelles valeurs donnent sens à notre existence et à l’aventure humaine, et pour la défense desquelles il convient que nous prenions des risques. La menace de l’arme nucléaire, qui implique par elle-même le consentement au meurtre de millions d’innocents, est le reniement de toutes les valeurs d’humanité qui fondent notre civilisation. Par la préméditation du meurtre nucléaire, nous avons déjà nié les valeurs que nous prétendons défendre. Comment pourrions-nous, sans nier la dignité de l’humanité de l’homme, consentir au meurtre nucléaire ?

Le caractère criminel de l’emploi de l’arme nucléaire a été clairement dénoncé par la résolution de l’ONU du 24 novembre 1961. L’Assemblée Générale déclare : « Tout État qui emploie des armes nucléaires et thermonucléaires doit être considéré comme violant la Charte des Nations Unies, agissant au mépris des lois de l’Humanité et commettant un crime contre l’Humanité et la civilisation. » Vous conviendrez que la condamnation est sans appel. Face à la possibilité du crime nucléaire, l’humanité est sommée de se réveiller de son inconscience et de résister à sa barbarie intérieure. L’humanité, c’est-à-dire chacun de nous. Dès lors, ne sommes-nous pas mis au défi de défendre l’Humanité et la civilisation contre le crime nucléaire ?

Certes, la dissuasion n’est pas l’emploi de l’arme nucléaire, mais elle est l’emploi de la menace, et l’emploi de la menace comporte directement la menace de l’emploi. Dès lors que l’emploi de l’arme nucléaire serait un crime contre l’Humanité, la menace de l’emploi est déjà criminelle.

Cependant, la menace de l’emploi veut être dissuasive : elle a pour finalité de conduire l’adversaire potentiel à renoncer à décider d’attaquer. L’intention de l’emploi semble perdre son caractère criminel, dès lors que celui qui l’exprime recherche de ne pas avoir à passer à l’acte. C’est pourquoi, le décideur nucléaire a la conscience tranquille. Ni la méchanceté, ni la haine, qui alimentent d’ordinaire le désir du meurtre, n’animent la menace de l’emploi de l’arme nucléaire. Là se trouve le paradoxe de la dissuasion nucléaire. Mais au cœur de ce paradoxe, il y a l’immoralité absolue de l’intention de commettre le crime absolu. Ne vous arrive-t-il pas de dire qu’avoir la ferme intention de commettre le mal, c’est déjà commettre le mal ? Seuls l’aveuglement, l’irresponsabilité et l’inconscience peuvent expliquer l’accommodement qui unit les décideurs et les citoyens.

Comment peut-il se faire que la dissuasion, dont le ressort est la menace de l’emploi, n’ait pas été universellement condamnée comme intrinsèquement immorale et totalement inacceptable si l’emploi est un crime contre l’Humanité et la civilisation ? Par quel subterfuge, quel artifice, quel faux-fuyant, quelle échappatoire, quelle casuistique, quelle escobarderie les hommes – et au premier rang desquels les clercs, de quelque obédience qu’ils soient - ont-ils pu légitimer la préméditation d’un tel crime ? Tout simplement en déliant, en découplant, en déconnectant, en désaccouplant, en désaccordant la menace et l’emploi. En niant le rapport entre l’intention dissuasive de la menace et l’acte criminel de l’emploi. En mettant à part l’emploi.

Simone Weil a décrit avec précision ce procédé de « mettre à part », de « mettre le mal à part » pour feindre de ne pas le voir et le commettre sans avoir conscience de le commettre. « On met à part sans le savoir, écrit-elle, là est précisément le danger. Ou, ce qui est pire encore, on met à part par un acte de volonté, mais un acte de volonté furtif à l’égard de soi-même. Et ensuite on ne sait plus qu’on a mis à part. On ne veut pas le savoir, et à force de ne pas vouloir le savoir on arrive à ne pas pouvoir le savoir 4. » Ainsi, au lieu de maintenir le rapport organique entre la menace et l’emploi, les hommes ont établi une séparation entre l’une et l’autre. Par cette « mise à part » de l’emploi, par cette « mise à part » du crime, l’homme se délie de toute responsabilité morale. « Ainsi, précise Simone Weil, cette faculté de mettre à part permet tous les crimes. (…) C’est ce qui permet chez les hommes des comportements tellement incohérents. » Et les hommes s’installent dans l’habitude de mettre à part le mal auquel ils consentent. Ils récusent alors avec la plus extrême vigueur toute personne qui met à jour ce mécanisme par lequel ils se trompent eux-mêmes. « Nous haïssons, note Simone Weil, les gens qui voudraient nous amener à former des rapports que nous ne voulons pas former. » C’est pourquoi, il n’est pas possible de convaincre les décideurs politiques et militaires qui légitiment l’arme nucléaire qu’ils préparent un crime.

La logique de la dissuasion implique en définitive que les décideurs politiques soient fermement déterminés à passer à l’acte. Le choix de la stratégie nucléaire constitue, au sens strict, un « terrorisme d’État ». Le lancement des bombes nucléaires qui feraient des millions de morts innocents au sein d’une population civile sans défense s’apparenterait directement à un gigantesque attentat terroriste. La menace nucléaire, elle, s’apparente directement à la prise en otage de cette population civile. Les idéologues ont construit une représentation irénique de la dissuasion nucléaire totalement éloignée de la réalité meurtrière de la menace des bombes nucléaires et de leur emploi potentiel.

Ce qui est effrayant dans la dissuasion nucléaire, au-delà des risques de mort et de destruction qu’elle fait peser sur les hommes, c’est la déraison des hommes qui s’enferment dans une logique nihiliste de mort et de destruction.

Il est certes de nombreuses questions philosophiques et politiques auxquelles nous ne saurions avoir des réponses définitives sans paraître faire preuve d’arrogance, de prétention, de présomption. La question de l’arme nucléaire n’est pas de celles-là. À l’arme nucléaire, l’homme raisonnable, l’homme moral, l’homme spirituel, l’homme sage, l’homme enfin ne peut qu’opposer un non catégorique et définitif.

Mais celui qui affiche sa certitude d’avoir raison a mauvaise réputation. On lui donne volontiers tort. Et pourtant, face à la préparation d’un crime contre l’Humanité et la civilisation, comment l’homme responsable pourrait-il douter d’avoir raison de ne pas accepter l’inacceptable ? Comment pourrait-il, dans le même mouvement de son intelligence, tout en ayant conscience qu’il aggrave son cas auprès de ses censeurs, ne pas penser que ceux qui consentent au crime nucléaire ont tort ? Cela est inéluctable.

- L’arme nucléaire est sans conteste l’une des manifestations du « mal » qui hante et tourmente et afflige l’humanité. Mais, s’il le veut, l’homme, peut avoir prise sur ce mal. S’il le veut, il peut décider de le supprimer. Il existe de nombreux problèmes dont la solution est complexe, incertaine, difficile, parfois même impossible. Mais, contrairement à l’avis des « experts » qui ont besoin de la complexité des choses pour exercer leur métier, le problème de l’arme nucléaire nous offre une solution possible : il faut « simplement » que nous décidions de vouloir y renoncer. Pour autant, il n’est pas simple de le vouloir. La décision est difficile, car de multiples raisons qui sont autant de sophismes risquent d’entraver notre volonté.

Dans le discours qu’il a prononcé à Prague le 6 avril 2009, le Président Barack Obama a « affirmé clairement et avec conviction l’engagement de l’Amérique à rechercher la paix et la sécurité dans un monde sans armes nucléaires. » Certes, tout le monde est comptable du désarmement mondial, mais quand tout le monde est comptable, personne ne se sent responsable. En tant que citoyens français, nous ne sommes pas directement responsables du désarmement mondial, mais nous le sommes entièrement du désarmement français. Dès lors, ne nous appartient-il pas de rechercher la paix et la sécurité dans une France sans armes nucléaires ?

Notre attitude du citoyen face à l’arme nucléaire engage entièrement notre responsabilité éthique vis-à-vis de l’autre homme. En consentant à la dissuasion nucléaire, nous sommes responsables des menaces qu’elle implique pour toute l’humanité aujourd’hui et demain. Nous sommes personnellement et collectivement responsables. Pour vouloir désarmer, nous ne pouvons certainement pas attendre que les autres veuillent également désarmer, que tous les autres veuillent désarmer afin que nous puissions désarmer ensemble. Tout particulièrement pour ce qui concerne le désarmement nucléaire, le principe de « multilatéralité » est un principe fallacieux. Seul le principe de l’« unilatéralité » peut nous permettre d’avoir prise sur la réalité. Nous avons l’obligation morale impérative de vouloir renoncer à l’arme nucléaire sans attendre la réciproque. L’essence même de l’obligation morale, c’est d’être unilatérale. La réciproque, ce n’est pas notre affaire. La réciproque, c’est l’affaire des autres. Notre affaire, c’est de prendre aujourd’hui la décision qui engage notre responsabilité. Notre dignité nous y oblige.

Par ailleurs, pour un État, la notion de « progressivité » n’a aucune pertinence en ce qui concerne le désarmement nucléaire. Un État peut certes réduire le nombre de ses armes nucléaires, mais réduire n’est pas désarmer. La dissuasion nucléaire est un tout qu’on accepte ou qu’on refuse. On ne peut pas l’accepter ou la refuser « plus ou moins ». Aucun compromis n’est possible. La seule question est de savoir si l’on consent ou non à l’emploi de l’arme nucléaire, si l’on assume ou non la responsabilité du crime nucléaire. Du point de vue moral, vous en conviendrez, cela n’a aucun sens de vouloir renoncer « progressivement » à préparer un crime. La notion de progressivité ne peut s’appliquer qu’au désarmement mondial, comme on parle de l’abolition « progressive » de la peine de mort au fur et à mesure que les États décident de la supprimer. Pour un État, cela n’aurait aucun sens qu’il décide de renoncer « progressivement » à la peine de mort. La seule manière pour l’État français de favoriser un désarmement mondial progressif est de décider unilatéralement de renoncer à ses armes nucléaires.

La tentation est grande de nous réfugier derrière les principes de multilatéralité et de progressivité pour nous dérober devant la décision de renoncer unilatéralement aux armes nucléaires. Ces principes sont des échappatoires que nous fabriquons pour fuir nos responsabilités.

Certes, dans le domaine de la stratégie nucléaire, l’argument moral ne convaincra probablement pas les décideurs politiques et militaires qui ne s’en soucient nullement. Dans ce domaine, un prétendu réalisme prétend toujours récuser un prétendu moralisme. Cependant, il se trouve que l’im-moralité intrinsèque de l’arme nucléaire se double de son in-faisabilité stratégique. Le simple réalisme nous oblige à reconnaître que l’arme nucléaire ne nous protège d’aucune des menaces qui peuvent peser sur notre sécurité, mais qu’elle constitue elle-même une menace. Tout particulièrement, l’arme nucléaire n’est d’aucune utilité pour protéger nos sociétés de la menace terroriste qui pèse sur elles. Ainsi, le désarmement nucléaire unilatéral satisfait aussi bien les exigences de « l’éthique de conviction » que celles de « l’éthique de responsabilité ». Et les unes sont aussi impérieuses que les autres.

Le 21 mars 2008, le Président de la République française s’est rendu à Cherbourg pour le lancement du sous-marin nucléaire nouvelle génération Le Terrible. À cette occasion, il a clairement défini la stratégie nucléaire de la France comme une stratégie d’emploi : « L’emploi de l’arme nucléaire ne serait à l’évidence concevable que dans des circonstances extrêmes de légitime défense. » En clair, cela signifie que la France envisage clairement de perpétrer, selon les termes des Nations Unies, « un crime contre l’Humanité et la civilisation ». Il poursuit : « Notre dissuasion nucléaire nous protège de toute agression d’origine étatique contre nos intérêts vitaux – d’où qu’elle vienne et quelle qu’en soit la forme. (…) Tous ceux qui menaceraient de s’en prendre à nos intérêts vitaux s’exposeraient à une riposte sévère de la France, entraînant des dommages inacceptables pour eux, hors de proportion avec leurs objectifs. » Le Président, semble-t-il, parle tranquillement de l’emploi de l’arme nucléaire en pleine inconscience de la tragédie qui en résulterait au sein de toute la communauté internationale.

Le Président précise que la France pourrait délivrer une « frappe d’avertissement » : « Nous ne pouvons exclure qu’un adversaire se méprenne sur la délimitation de nos intérêts vitaux, ou sur notre détermination à les sauvegarder. Dans le cadre de l’exercice de la dissuasion, il serait alors possible de procéder à un avertissement nucléaire, qui marquerait notre détermination. Il serait destiné à rétablir la dissuasion. » Là encore, ce premier emploi ne manquerait pas de créer une situation irréparable. Ne pensez-vous pas qu’il soit particulièrement inquiétant pour notre démocratie que de tels propos laissant entendre clairement que la France est prête à commettre un meurtre nucléaire aient pu être tenus dans la plus grande indifférence et la plus grande passivité des Français ? Pour ma part, je trouve cela véritablement désespérant.

Dans le même temps où le Président vante les mérites de l’arme nucléaire, comme symbole de la grandeur et de la puissance de la nation française, il entend faire montre d’une intransigeance absolue à l’égard des États non dotés d’armes nucléaires qui voudraient s’autoriser à en posséder. Ainsi, les cinq grandes puissances prônent l’abstinence nucléaire sans la pratiquer eux-mêmes. Avec beaucoup d’indécence, elles s’adonnent au vu et au su de tout de monde au plaisir de la prolifération verticale, elles jouissent de la possession de l’arme nucléaire tout en exigeant des autres nations qu’elles fassent vœu de continence nucléaire. Un tel comportement ne peut pas ne pas alimenter la frustration et le ressentiment des nations non nucléaires.

Que dit l’Église au sujet de la dissuasion nucléaire ? En juin 1982, dans son message à la seconde session extraordinaire des Nations Unies consacrée au désarmement, le pape Jean-Paul II a écrit cette "petite phrase" qui allait connaître un retentissement beaucoup plus grand que toutes ses prières et tous ses vœux pour la paix : "Dans les conditions actuelles, une dissuasion fondée sur l'équilibre, non certes comme une fin en soi, mais comme une étape sur la voie d'un désarmement progressif, peut encore être jugée comme moralement acceptable." Malgré sa formulation confuse et ambiguë, cette phrase ne pouvait pas ne pas être comprise comme une justification de la dissuasion nucléaire. Au demeurant, tous ceux qui en étaient les partisans n'ont pas manqué de saluer le "réalisme" du pape. Pour le reste, le fait de justifier la dissuasion nucléaire ne pouvait en aucune manière favoriser un processus de désarmement progressif… En réalité, en justifiant la menace d’un crime, la « petite phrase » de Jean-Paul II était « moralement inacceptable ». Surtout, elle n’était pas « évangéliquement acceptable »… Au demeurant, la déclaration de l’évêque de Rome fit scandale auprès de nombreux hommes de bonne volonté épris de justice et de paix… Pour ma part, je dois vous avouer que j’ai ressenti cette « petite phrase » avec une immense tristesse…

Vous vous en souvenez certainement, dans un document adopté par la Conférence épiscopale française le 8 novembre 1983 et intitulé Gagner la paix, les évêques français d’alors ont justifié en bonne et due forme la dissuasion nucléaire en reprenant à leur compte la "petite phrase" du pape. Une « note explicative » donnée à la presse par les évêques était très claire : « Une dissuasion est encore légitime. C’est pourquoi les nations peuvent légitimement préparer leur défense pour dissuader les agresseurs, même par une contre-menace nucléaire. »

Certes, nous étions au temps de la guerre froide et l’Occident prétendait se défendre contre la menace communiste. Mais, vous le savez, ce ne sont pas les armes nucléaires de l’Occident qui ont détruit le mur de Berlin. Celui-ci s’est effondré sous la pression de la résistance non-violente des femmes et des hommes des sociétés civiles de l’Est qui ont eu le courage de prendre les plus grands risques pour conquérir leur liberté.

Jean-Paul II le reconnaîtra explicitement dans son encyclique Centesimus annus publiée en mai 1991. "À peu près partout, écrit-il, on est arrivé à faire tomber un tel "bloc", un tel empire, par une lutte pacifique qui a utilisé les seules armes de la vérité et de la justice. (...) Apparemment, l'ordre européen issu de la deuxième guerre mondiale et consacré par les Accords de Yalta ne pouvait être ébranlé que par une autre guerre. Et pourtant, il s'est trouvé dépassé par l'action non-violente d'hommes qui, alors qu'ils avaient toujours refusé de céder au pouvoir de la force, ont su trouver dans chaque cas la manière efficace de rendre témoignage à la vérité. Cela a désarmé l'adversaire, car la violence a toujours besoin de se légitimer par le mensonge, de se donner l'air, même si c'est faux, de défendre un droit ou de répondre à une menace d'autrui." Le pape reconnaît ainsi que la non-violence s’est avérée être effectivement une alternative à la guerre.

À l’évidence, contrairement à ce que d’aucuns croient pouvoir affirmer, la dissuasion nucléaire n’a joué aucun rôle dans la chute de l’empire soviétique. Pendant tout le temps de la guerre froide, ce n’est pas la dissuasion nucléaire qui a maintenu la paix, c’est la paix qui a retenu et contenu la dissuasion nucléaire.

Au demeurant, les temps ont bien changé. Dans son message du 1er janvier 2006, pour la célébration de la journée mondiale de la paix, Benoît XVI plaide en faveur du désarmement nucléaire : « Que dire des gouvernements qui comptent sur les armes nucléaires pour garantir la sécurité de leurs pays ? Avec d’innombrables personnes de bonne volonté, on peut affirmer que cette perspective, hormis le fait qu’elle est funeste, est tout à fait fallacieuse. » Ces deux mots employés par l’évêque de Rome à propos de l’arme nucléaire sont particulièrement signifiants : « funeste » évoque des idées de mort et de malheur, tandis que « fallacieux » évoque des idées de tromperie et d’illusion.

Benoît XVI souligne que « les ressources ainsi épargnées [par le désarmement] pourront être employées en projets de développement ». Comment ne pas penser en effet que tous ces milliards dépensés pour satisfaire le désir de puissance de César et de tous ses affidés est une insulte envers les humiliés et les opprimés de l’histoire qui sont privés de leur pain quotidien ? Malheureusement, cette déclaration de l’évêque de Rome risque fort de rester lettre morte si les Églises locales des pays concernés ne font pas elles-mêmes des choix clairs et fermes en faveur du désarmement nucléaire. Vous conviendrez que, pour sa part, l’Église de France est restée jusqu’à présent remarquablement silencieuse. Faut-il interpréter ce silence à la lumière de la sagesse des nations lorsqu’elle suggère que « qui ne dit mot consent » ?

Ainsi donc, lorsque le pape a dit que la dissuasion nucléaire était « moralement acceptable », les évêques français réunis en Assemblée plénière ont tenu à relayer haut et fort la parole de l’évêque de Rome pour justifier la dissuasion nucléaire française. Cependant vous conviendrez qu’entre le « moralement acceptable» de Jean-Paul II et le « tout à fait fallacieuse » de Benoît XVI, il y a une remarquable discontinuité. Dès lors, ne pensez-vous pas que vous devez en tenir compte afin de réactualiser la parole de l’Église ? Est-il possible d’espérer que vous fassiez aujourd’hui, avec la même solennité, la même démarche que celle qui a été faite hier ? Est-il possible d’espérer que, lors d’une prochaine Assemblée plénière de l’épiscopat, vous preniez position clairement pour dire aux Français que la dissuasion nucléaire française est « tout à fait fallacieuse » et que, par conséquent, en conscience et en raison, ils doivent objecter à la préparation du meurtre nucléaire ? En opposant votre non possumus à l’État nucléaire qui exige de tous les citoyens une allégeance complice, vous ouvririez une brèche dans le mur du silence qui entoure la préparation d’un crime contre l’Humanité et la civilisation.

En mai 2010 s’est tenue à New York la huitième Conférence d’examen du Traité de non prolifération nucléaire (TNP). Dans son intervention faite le 6 mai, l’archevêque Celestino Migliore, Observateur permanent du Saint Siège aux Nations Unies, déclare : « Aussi longtemps que les armes nucléaires existeront, elles permettront et même encourageront la prolifération. (…) Les doctrines militaires qui continuent à faire confiance aux armes nucléaires comme des moyens qui assurent la défense et la sécurité ou même le pouvoir retardent de facto les processus de désarmement et de non-prolifération. (…) Le moment est venu de repenser et de changer notre perception des armes nucléaires. » Certes, mais les États se laisseront-ils convaincre par ces propos de bon sens ? Là encore, ne vous appartient-il pas, en cohérence avec ces paroles du Saint Siège, de récuser la doctrine militaire française qui fait confiance aux armes nucléaires ?

- L’histoire nous l’a amplement montré, l’Église n’est jamais aussi crédible que lorsqu’elle entre en résistance contre le pouvoir en place. Or, précisément, il y va aujourd’hui de la crédibilité du message évangélique. Comment annoncer l’Évangile de la paix à l’ombre des armes nucléaires – dans l’ombre des armes nucléaires ? Ne permettez pas que d’aucuns se désespèrent jusqu’à penser que l’arme nucléaire n’est pas l’affaire des évêques, sauf lorsqu’il s’agit de la justifier…

Bien qu’il soit chanoine d’une Église de Rome, le Président français peut facilement ne tenir aucun compte des prises de position de l’évêque de Rome, mais il lui serait beaucoup plus difficile d’ignorer le retentissement que votre propre prise de position ne manquerait pas d’avoir au sein de l’opinion publique française. Les choses étant ce qu’elles sont, dans le cadre de la laïcité propre à la République française, sur des questions qui relèvent de l’éthique universelle, les religions peuvent encore jouer un rôle décisif dans le débat démocratique. Au demeurant, point n’est besoin de croire au ciel pour comprendre que la menace nucléaire n’est pas conforme au précepte de l’amour évangélique… Et il suffit d’être athée pour être convaincu que la préparation du meurtre nucléaire est un outrage à la raison.

Le crime nucléaire est véritablement l’Abomination de la désolation au sens biblique de cette expression qui signifie la profanation d’un lieu sacré : le crime nucléaire est la profanation de maisons que les hommes ont construites sur la terre pour manger leur pain quotidien, partager leurs joies, apaiser leurs souffrances et abriter leurs espérances. Comment pourrions-nous – comment pourriez-vous - consentir à ce sacrilège ? D’autant plus que, selon toute probabilité, celles et ceux qui habitent ces maisons n’auraient aucune responsabilité dans « la menace de nos intérêts vitaux » qui aurait provoqué les frappes nucléaires dont ils seraient les innocentes victimes.

Alors que d’aucuns sont portés à laisser croire que le renoncement à l’arme nucléaire porterait atteinte à la « grandeur de la France », c’est probablement tout le contraire qui se produirait. Comment ne pas croire en effet qu’il en résulterait un surcroît de prestige pour notre pays ? « Le prestige, déclarait M. Ban Ki-moon, le Secrétaire général des Nations Unies, lors de l’allocution qu’il prononça à Hiroshima le 6 août 2010, appartient non pas à ceux qui possèdent des armes nucléaires, mais à ceux qui y renoncent. » Sans nul doute la capacité de notre pays de faire entendre sa voix dans les grands débats de la politique internationale ne serait non pas affaiblie mais fortifiée. On peut gager que partout dans le monde des femmes et des hommes salueraient la décision de la France comme un acte de courage qui leur redonne un peu d’espérance.

En définitive, l’arme nucléaire est une idole, celles et ceux qui lui rendent un culte sont des idolâtres. Et il est toujours difficile de briser les idoles. La croyance des hommes en l’arme nucléaire comme symbole de la puissance est l’un des plus formidables envoûtements auquel l’humanité ait jamais succombé. Il signifie l’aliénation de la conscience, la perversion de l’intelligence, l’asservissement de la raison, la perte de la liberté et s’apparente à un véritable ensorcellement.

Par son consentement au meurtre nucléaire, l’homme nie et renie la transcendance de son être spirituel. Par cet assentiment, il « perd son âme », comme on disait naguère. En refusant de rendre un culte idolâtre à l’arme nucléaire, l’homme redevient maître de son propre destin et il lui est alors possible de recouvrer sa part de transcendance.

N’êtes-vous point les héritiers des Prophètes de notre Antiquité ? Ne vous appartient-il pas d’avoir l’audace d’Isaïe qui se scandalisait de voir le pays de Juda et de Jérusalem « rempli de chevaux et de chars sans nombres, rempli de faux dieux », mais qui annonçait le jour où des « peuples nombreux briseront leurs épées pour en faire des socs et leurs lances pour en faire des serpes » ? (Isaïe, 2)

- Dans la société laïque et républicaine qui est la nôtre, vous avez encore le rare privilège de pouvoir faire entendre votre voix dans la cacophonie des bruits médiatiques qui asphyxient notre démocratie. Dès lors, n’est-il pas de votre responsabilité de faire écho à la voix du jeune prophète de Nazareth qui, il y a quelque deux mille ans, a délégitimé toute violence, a demandé à ses amis de ne pas résister au mal en imitant le méchant et de remettre leur épée au fourreau ? Durant toute sa vie, avec une liberté magnifique, il a osé défier le pouvoir des puissants. Vous savez qu’il en est mort. Il eut la sagesse d’abroger la loi du talion qui continue pourtant d’être la règle de conduite des États nucléaires dont les menaces réciproques font peser sur l’humanité tout entière le risque de l’anéantissement.

- Je ne sais pas si nous sommes encore beaucoup à attendre de vous que vous fassiez écho aux paroles de compassion, de douceur, de justice et de paix que le Nazaréen fit entendre sur la Montagne des Béatitudes… Mais si vous en aviez l’audace, alors soyez sûrs que, dans ce monde malade de la violence à en mourir, ils seraient nombreux, très nombreux, parmi celles et ceux qui sont sans voix, qu’ils croient au ciel, qu’ils n‘y croient pas ou qu’ils y croient mal, à se réjouir de vous entendre parler haut et fort pour délégitimer l’arme nucléaire. Dans ce monde enténébré, vous auriez contribué à entretenir la petite flamme fragile de l’espérance.

Je vous prie de ne voir dans cette missive aucune mise en demeure. J’ai simplement voulu venir vous dire mes convictions, mes désespoirs et mes espoirs en pensant que, quelque part, vous pourriez peut-être les partager. Car, vous comme moi, vous êtes embarqués, comme dirait l’ami Pascal, et qu’il vous faut nécessairement choisir… Sauf qu’ici, il ne s’agit en rien d’un pari et que la raison peut tout déterminer…

En m’excusant pour la longueur quelque peu déraisonnable de ma lettre, je vous remercie de la bienveillance de votre attention et je vous assure de mes sentiments les plus cordiaux.

Jean-Marie Muller

Écrivain

- 1-Albert Camus, Actuelles, Chroniques 1944-1945, op. cit., p .82.

-2- Georges Bernanos, Français si vous saviez, Paris, Gallimard, 1961, p. 127.

-3- Ibid., p. 211

- 4-Simone Weil, Œuvres complètes, Tome VI, Cahiers (septembre 1941 – février 1942), Volume 2, Paris, Gallimard, 1997, p. 470-473.

Nous avons invité Jean-Marie Muller, aux Rencontres de Die, il y a quelques années. Nous le remercions de la Primauté de ce texte pour : http://mediascitoyens-diois.blogspot.com/

lundi 29 novembre 2010

Die 26150 : Travail autour de l' intelligence collective


Suite de “EcoHabiter sur notre Territoire” les 2 et 3 octobre 2010 à Eurre (26).

Un collectif d'associations se réunissant depuis huit mois a organisé un évènement autour de l'HABITAT avec Écologie au Quotidien et les Conseils Locaux de Développement du Diois et de la Vallée de la Drôme. Plus de 450 personnes y ont participé, une véritable réussite pour la Société Civile…qui a montré sa capacité à mobiliser pour travailler un samedi et dimanche. Et surtout sur le long terme. Suite aux 17 ateliers...

Un Groupe de recherche et d'animation sur l'intelligence collective est né.

Suite au "Forum Ecohabiter 26" à Eurre, et pour constituer le groupe de recherche et d'application sur l'intelligence collective (GRAIC), nous commençons avec une première journée de formation qui aura lieu à :

le dimanche 5 décembre 2010 à Die, salle des Société , Rue Joseh Reynaud.

Pour le moment cette formation est ouverte à toute personne désireuse d'expérimenter les outils de l'intelligence collective dans le but :

- de favoriser la spontanéité en groupe, la prise de responsabilité, la créativité collective

- de renforcer l'aptitude à dialoguer, coopérer, décider ensemble

- de permettre l'émergence de la conscience collective.

Le nombre de places étant limité inscrivez- vous dés maintenant !

Le prix de cette journée de formation est compris entre 40 et 50 euros.

Par la suite, nous déciderons ensemble des modalités d’organisation.

Pour vous inscrire :

- Faire un chèque d’arrhes de 30 euros, libellé au nom d’ Anne- Marie Bataille.

- Nous donner vos coordonnées :

Nom, Téléphone fixe, ou mail,

Votre lieu de départ pour covoiturage éventuel.

Besoin d’être hébergé ?

- Renvoyer le tout par courrier à l’adresse suivante : Gaika VESCO Les Nals, 26150 Montmaur en Diois

En souhaitant de tout cœur que ce groupe (GRAIC) participe au mieux vivre ensemble, et nous permette de développer des relations fraternelles.

Au plaisir de nous rencontrer.

Gaîka Vesco et Catherine Dumas.

Contact : dumas.catherine@hotmail.fr

Gaïka Vesco: 04 75 21 27 63 ou 06 30 38 07 54.

Luc en Diois 26310 : Baleti



Ville en Transition...et BioVallée en Transition


Transition écologique

Ces villes qui tentent de se libérer du pétrole

Tout le monde n’attend pas que gouvernements et chefs d’État s’entendent sur un hypothétique accord pour sauver le climat. Loin de Cancún, où se tiendra le prochain sommet sur le réchauffement climatique, des réseaux associatifs et des municipalités se lancent dans d’ambitieux programmes pour libérer leurs villes de la dépendance pétrolière. Comment font ces « villes en transition » ? Exemple à Boulder, près de Denver, aux États-Unis.

Aux pieds des montagnes Rocheuses, dans le Colorado, la ville de Boulder, tente l’impossible : se libérer du pétrole au pays des road movies, des drive in, de l’essence peu chère... et des plus grosses émissions de gaz à effet de serre par habitant au monde. L’objectif, pour les 300.000 résidents de ce bastion démocrate, est de passer d’une consommation annuelle de neuf barils de pétrole par personne, à un seul.

L’une des chevilles ouvrières de cette révolution locale s’appelle Michael Brownlee. Ancien journaliste, il a été chercher l’inspiration en Grande-Bretagne, là où est né un étrange mouvement, celui des « villes en transition ». Le concept est lancé en 2006 par un enseignant en permaculture, Rob Hopkins. Celui-ci demande à ses étudiants d’identifier les dépendances au pétrole de la ville de Kinsale, dans le Sud de l’Irlande. Dans la foulée, les chercheurs élaborent un scénario de descente énergétique ambitieux, mais réaliste, d’ici 2030. C’est de cette expérience qu’émerge le concept de « transition ». Le défi est majeur : éviter aux populations les dramatiques conséquences d’un pic pétrolier trop brutal (l’épuisement progressif des ressources pétrolières) et contribuer concrètement à la lutte contre les dérèglements climatiques, sans attendre d’hypothétiques accords internationaux. Le Manuel de Transition : De la dépendance au pétrole à la résilience locale de Rob Hopkins vient d’ailleurs d’être traduit en français (aux éditions Ecosociété avec la revue Silence).

Transition écologique rime avec processus démocratique

À son retour, Michael Brownlee lance le Transition Boulder County pour transformer cette agglomération moyenne en ville « décarbonée ». « Nous avions besoin de modèles à suivre. Le mouvement de la transition nous en fournit un », explique-t-il. Le terrain est favorable. La ville de Boulder et son comté sont déjà en pointe en matière environnementale. Dès 2002, la ville adopte la résolution dite « de Kyoto » pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre [1] puis adopte dans la foulée un plan action climat avec un budget annuel avoisinant un million de dollars. Chaque grande mesure est soumise par référendum à la population. Un premier amendement impose ainsi que 10% de l’énergie consommée provienne des énergies renouvelables. En 2006, 60% des votants approuvent l’idée d’une taxe carbone. Boulder est ainsi la première ville des États-Unis à mettre en œuvre cette fiscalité écologique. La taxe vise à financer le plan action climat de la ville et est collectée par Xcel Energy, le principal fournisseur d’électricité local.

La municipalité se dote également d’un plan « zéro déchet ». La ville finance des audits pour réduire la consommation d’énergie des zones résidentielles et des bureaux, subventionne un passe pour les bus et l’installation de panneaux solaires. Boulder est particulièrement impliquée dans le développement d’un réseau électrique dit « intelligent ». Dans une région qui possède la quasi-totalité des réserves américaines d’uranium, la moitié du charbon ainsi que d’importantes réserves de gaz naturel et de pétrole, il est cependant difficile de faire vraiment bouger les lignes. La compagnie Xcel Energy a ainsi été autorisée, malgré ces grands engagements, à ériger une nouvelle centrale au charbon.

Absence d’alternatives à la voiture individuelle

Pour Michael Brownlee, les différentes mesures adoptées, en se focalisant sur l’amélioration du bâti, demeurent insuffisantes. Car au royaume de la voiture individuelle, la question cruciale reste les transports. Et les alternatives à la voiture y sont quasi-inexistantes. « Une bonne partie des gens continuent de penser qu’ils peuvent aller partout où ils veulent avec leur voiture. Boulder n’a pas tenu ses promesses », regrette Glenn Morris du Woodbine ECology Center, qui travaille sur l’idée de « communautés durables » dans le Colorado.

Seul un quart de la population active travaillant à Boulder y vit. Cela signifie que trois personnes sur quatre doivent emprunter leur voiture pour se rendre sur leur lieu de travail. Un groupe de pression s’est constitué pour que le tramway dont disposait la ville soit remis en marche. Il est également envisagé, d’ici à 2014, la mise en place d’une liaison par voie ferrée entre les trois grandes cités du coin : Longmont, Boulder et Denver. « Le transport est le thème le plus difficile que nous rencontrons. Dans le domaine de l’alimentation au contraire, nous avons fait beaucoup de progrès sur une courte période », positive Michael.

Des AMAP version US

Selon Michael, l’alimentation représenterait environ 31 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre [2]. « Changer notre régime alimentaire est le chemin le plus rapide pour réduire nos émissions », estime-t-il. Tout le système industriel agricole actuel va s’effondrer parce qu’il s’appuie sur un pétrole à bas coût. Nous n’avons pas d’autre solution que de relocaliser. »

Cela tombe bien car dans la région de Boulder, la plupart des terres appartiennent au comté (juridiction territoriale entre la commune et un État). Celui-ci a proposé d’attribuer 20% de ses terres aux producteurs locaux d’ici à 2012. Le plus compliqué étant de trouver de nouveaux agriculteurs. « Le comté a créé un Conseil de la politique agricole et alimentaire dont j’ai été membre pendant deux ans, explique Michael. À partir de 2010, leur objectif est que les ménages consacrent 10% de leur budget alimentaire à la consommation de produits locaux, contre 2% aujourd’hui. « Les gouverneurs du comté ont compris l’enjeu et soutiennent notre travail par de petites subventions et des déclarations officielles. La municipalité est moins réactive. Il y est plus difficile politiquement de produire le changement. »

Quand les universités aident les paysans

À défaut de réformes venues d’en haut, une révolution silencieuse par le bas est peut-être en marche. Les adhésions aux « Community Supported Agriculture », l’équivalent Middle West de nos Associations pour le maintien d’une agriculture paysanne (AMAP), explosent dans le Colorado. Grant Farm par exemple, la première ferme ayant bénéficié d’un label bio aux États-Unis (dès 1975), compte aujourd’hui plus de 5.000 adhérents. Le marché fermier de Boulder connaît lui aussi un succès croissant. Entre deux rues engorgées par les voitures, on se bouscule entre les étals de fruits et légumes locaux.

Un partenariat est également noué entre ce marché fermier et l’université du Colorado. Celle-ci propose un programme de formations permettant l’échange entre étudiants et producteurs. Des groupes d’étudiants se sont affiliés au mouvement de la transition. Ils ont ainsi contribué à ce qu’un quart de l’alimentation fournie par la cafétéria de l’université du Colorado soit biologique. « En tant qu’organisation de transition, notre principale activité n’est pas de créer nous-mêmes des projets mais d’appuyer les citoyens dans leurs initiatives, de les mettre en réseau et de les aider à s’emparer du thème de la transition », explique Michael.

La transition écologique : un truc de bobos blancs ?

Boulder est aussi une ville riche. Le prix moyen des maisons avoisine les 600.000 dollars, une somme trois fois supérieure aux prix affichés dans le reste de l’État. Mais de grandes disparités sociales traversent la ville. Près de 10% de la population est confrontée à l’insécurité alimentaire. « La transition a un grand défi à relever sur le plan de la mixité, reconnaît Michael. Le mouvement est encore jeune. La plupart des personnes impliquées dans le processus appartiennent à la classe moyenne blanche. Je reste néanmoins convaincu que la transition peut se développer partout dès lors que les gens perçoivent l’urgence à agir. »

Fort du statut de « transition trainer », Michael parcourt le pays pour sensibiliser et créer de nouveaux groupes. Le mouvement s’étend à l’État avec Transition Colorado. À Denver, il a rencontré Dana Miller. « Ma première question a été de savoir ce que nous pouvions faire dans une ville d’un million d’habitants, raconte-t-elle.Nous n’avons toujours pas la réponse mais nous avons créé un réseau ». Ce réseau, c’est le Grow Local Colorado qui, avec le soutien de la ville, vise à développer l’agriculture urbaine à Denver. « 99 % des initiatives de transition commencent par les questions d’alimentation. C’est une entrée qui touche tout le monde, explique Dana. En général, les municipalités apportent leur appui, quel que soit le parti. Chacun y trouve un intérêt. » L’État du Colorado joue aussi sa carte verte en venant d’adopter en mars dernier une loi visant à atteindre 30% d’énergies renouvelables d’ici à 2020. Une décision qui réjouit nombre d’industriels au regard de l’immense potentiel hydroélectrique de la région.

« Le capitalisme va s’effondrer de lui-même »

Michael n’attend rien du gouvernement fédéral. N’est-il pas censé disparaître avec l’effondrement de la production de pétrole, comme le prédit le romancier James Howard Kunstler ? Difficile de se faire entendre alors que la surconsommation d’or noir règne encore en maître. Les États-Unis pourraient arriver au prochain sommet sur le climat en décembre sans avoir encore voté de dispositif contraignant de réduction d’émissions de gaz à effet de serre (GES). « Alors que le pays est le plus grand contributeur de GES par individu, on comprend mieux pourquoi le déni est plus fort ici qu’ailleurs, analyse le chef de file de la transition au Colorado. Il est donc d’autant plus important que la transition s’ancre dans ce pays et réussisse. »

Michael Brownlee ne se reconnaît pas non plus dans le mouvement de la décroissance. « L’âge de la croissance touche à sa fin, nous n’avons pas besoin de passer du temps à critiquer le système car, de toute manière, le capitalisme va s’effondrer de lui-même », assure t-il. L’essentiel pour lui est de se concentrer sur le développement de systèmes locaux permettant de répondre aux besoins fondamentaux. « La montée en puissance des initiatives locales finira par avoir un impact au niveau global, renchérit Dana. Une des choses que j’aime dans la transition, c’est que c’est une vision positive de l’avenir qui motive le passage à l’action. »

Sophie Chapelle

Notes

[1] Une réduction de 7% en 10 ans par rapport au niveau de 1990.

[2] En référence au dernier livre de l’écrivaine états-unienne Anna Lappé, Diet for a hot planet.