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mercredi 22 septembre 2010

Dans le Fatras répréssif


Le Sénat a adopté, en un temps record (4 jours), la seconde loi « d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure » dite Loppsi II. Un « fourre-tout » incroyable, qui traite de tout : Roms, terroristes, pédophiles, détectives, video-surveillance, ventes à la sauvette, ou peines planchers. Nul n’est censé ignorer la loi, paraît-il. Sarkozy a-t-il seulement lu son propre texte ? Comme un malheur démocratique ne vient jamais seul en Sarkofrance, diverses manipulations du cours normal de notre justice ont été révélées ces derniers jours.
- Loppsi II, le fatras répressif
En mai 2009, nous évoquions le sinistre projet Loppsi II, en préparation à l’époque au sein du cabinet Alliot-Marie. Depuis, le texte s’est enrichi. L’été sécuritaire, pour nous faire oublier l’affaire Woerth/Bettencourt, est passé par là. La loi Loppsi II est un fratras de 48 articles, des dispositions, tantôt d’affichage, tantôt dangereuses, présentées comme les nouvelles garanties indispensables à notre démocratie contre la nouvelle délinquance ou les menaces terroristes.
- Vendredi 10 septembre, après quelques hésitations en commission des lois rapidement contrecarrées par l’Elysée, la loi a donc été adoptée par les sénateurs, dans une version conforme aux souhaits présidentiels.

1. la loi créé un nouveau délit d’usurpation d’identité (cf. Article 2), puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.
2. Elle porte à dix ans d’emprisonnement et 1 000 000 d’euros d’amende la falsification de chèques ou de moyens de paiement commise en bande organisée (contre sept ans et d’une amende de 750 000 euros pour le même délit commis seul).
3. Elle prévoit la communication des adresses électroniques des cyber-pédophiles.
4. Elle étend l’identification par empreintes génétiques à « toute personne à l’encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis l’une des infractions mentionnées à l’article 706-55 » (i.e. tous les crimes et délits, et la plupart des atteintes aux biens).
5. Elle créé un fond de financement de la police scientifique, « alimenté par un versement déterminé par convention sur les biens restitués à l’assureur ayant indemnisé le vol desdits biens. »
6. Elle autorise tous les fichiers de police et de gendarmerie des données à caractère personnel ( « sans limitation d’âge ») recueillies pendant les enquêtes (y compris préliminaires, c’est-à-dire hors contrôle d’un juge d’instruction), pour n’importe quel crime, délit, ou même « trouble à la sécurité ou à la tranquillité publiques. » Les victimes pourront être fichées. Elles le sont déjà. Malgré les nombreuses polémiques sur ces fichiers, dont le fameux STIC estimé faux pour un bon tiers de ses données, les procédures de contrôle et de nettoyage sont à peine améliorées. Il faudra passer par le procureur général de la République, soumis à l’autorité du ministère, ou un magistrat désigné à cet effet pour toute modification.
7. La loi autorise aussi les « fichiers d’analyse sérielle », jugés nécessaires pour traquer les crimes et délits en séries.
8. Conséquence des dispositions précédentes, le procureur de la République, « pour l’exercice de ses fonctions », aura accès à tous ces fichiers.
9. La mise en place de videoprotection, y compris sous forme de drones, est facilitée (cf. Articles 17 et suivants) : possibilité de sous-traitance à des sociétés privées agréées, élargissement des motifs de surveillance, installation de caméras provisoires pour surveiller des manifestations, pouvoir du préfet d’imposer une video-surveillance aux communes, possibilité de transmission des données des caméras privées agréées aux polices municipales, etc...
10. La loi autorise les scanners électroniques de passagers dans les aéroports, sans stockage ni identification des visages.
11. Elle étend les sanctions prévues contre l’identification des agents secrets à « l’identification réelle ou supposée d’une personne comme source ou collaborateur d’un service spécialisé de renseignement. »
12. Elle créé un Conseil national des activités privées de sécurité, qui devra contrôler l’agrément des officines, assurer la discipline de la profession et préparer un code de déontologie. Il intègre, dans son périmètre, les sociétés de veille économique, commerciale, industrielle ou financière (hors presse).
13. La loi n° 2006‑64 du 23 janvier 2006 contre le terrorisme est complétée de diverses dispositions : l’utilisation de tous les fichiers de police et de gendarmerie (immatriculations, STIC, passeports, etc) est désormais autorisé pour réprimer et prévenir les « atteintes à l’indépendance de la Nation, à l’intégrité de son territoire, à sa sécurité, à la forme républicaine de ses institutions, aux moyens de sa défense et de sa diplomatie, à la sauvegarde de sa population en France et à l’étranger et aux éléments essentiels de son potentiel scientifique et économique. » En résumé, tout ou presque est désormais couvert !
14. La loi aggrave les peines pour les crimes commis contre des représentants de l’autorité publique : trente ans de sûreté étendu aux meurtres avec préméditation commis « en bande organisée ou avec guet-apens sur un magistrat, un fonctionnaire de la police nationale, un militaire de la gendarmerie, un membre du personnel de l’administration pénitentiaire ou toute autre personne dépositaire de l’autorité publique, à l’occasion de l’exercice ou en raison de ses fonctions ». Elle étend aussi les peines planchers aux délits les plus graves (passibles d’au moins 10 ans de prison).
15. Loppsi II étend également le port du bracelet électronique aux récidivistes condamnés à une peine de plus de cinq ans de prison et aux étrangers en voie d’expulsion pour terrorisme.
16. L’évacuation d’office des « campements illicites » de gens du voyage est rendue possible (cf. Article 32).
17. La loi étend la détention de sûreté aux condamnés ayant purgé leur peine pour crimes et délits punis de 5 ans, au lieu de 10 ans auparavant.
18. La loi autorise le ministre de l’intérieur à interdire le déplacement de supporters d’une équipe en cas de soupçons de « troubles graves pour l’ordre public. » Elle interdit également la détention de lasers dans les stades...
19. Elle autorise la comparution immédiate des mineurs sans passer par le juge des enfants pour les mineurs condamnés dans les six mois précédents pour la même infraction.
20. La loi autorise la police à utiliser les véhicules réquisitionnés en cas d’infractions graves, sans attendre le jugement.
21. Loppsi II encourage le développement de la « réserve civile » de la police et de la gendarmerie, constituée de retraités et de volontaires.
22. La loi prévoit une peine d’emprisonnement d’un an pour les étrangers n’ayant pas respecté les obligations de présentation aux services de police et aux unités de gendarmerie.
23. La loi prévoit même la publication d’un rapport, le 1er janvier prochain, sur « le coût et les inconvénients que présente le dispositif actuel d’établissement des procurations de vote, confié aux officiers de police judiciaire. » (cf. article 37ter). Rien sur les cantines scolaires ou les vaccinations obligatoires ?
24. Enfin, Loppsi II autorise le dépistage de toute maladie virale (VIH notamment) chez toute personne susceptible d’avoir contaminé un policier, magistrat ou personnel pénitentiaire.
Justice manipulée ?
En février, ce fut l’affaire des rumeurs d’adultère croisé entre Nicolas Sarkozy et Carla Bruni. Déjà à l’époque, les services de renseignement furent missionnés par le président français pour identifier l’origine des rumeurs. Que les services de l’Etat soient ainsi mobilisés séance tenante pour une affaire aussi triviale n’a choqué personne à l’UMP. Tout juste certains, à l’époque, ont-il cru bon de dénoncer « un complot de l’étranger ».
Ces derniers jours, la Direction Centrale du Renseignement Intérieur (DCRI) a de nouveau été sollicitée pour démasquer l’une des fuites de l’affaire Woerth. Son patron, Bernard Squarcini, ne s’en cache pas : « Il y a eu un éclairage DCRI ». L’expression est drôlement bien choisie. Marianne2 s’inquiétait de la « disparition » de l’un des proches conseillers de Michèle Alliot-Marie, la Garde des Sceaux : David Sénat - c’est son nom - a été effectivement viré durant l’été. Le porte parole du ministère s’en défend : « David Sénat travaillait pour la ministre depuis déjà huit ans. L’été est une excellente période pour changer d’affectation. Il était demandeur. » Selon NouvelObs.com, l’Elysée a eu la peau du conseiller, en usant de méthodes dignes d’un roman d’espionnage : « les appels passés depuis son portable administratif ont été épluchés. » Sénat a donc été reconnu coupable, sans procès ni défense, d’avoir violé le secret de l’instruction et communiqué des extraits de procès verbaux d’auditions.
- Autre sujet plus grave, on a également appris que le ministère de la justice pensait à constituer une cour d’appel spéciale pour le second procès Clearstream. Pour mémoire, Nicolas Sarkozy, pardon, le ministère public a fait appel de la relaxe de Dominique de Villepin dans cette affaire. La première présidence de la cour d’appel de Paris a confirmé le projet au Monde et à l’AFP, tout en précisant que « rien n’est encore arrêté. » Les tribunaux spéciaux ont mauvaise presse dans les Etats de droit. Et pour cause, ils sont par définition des exceptions au cours normal de la justice. La raison invoquée pour ce sinistre projet est l’encombrement des tribunaux. On n’ose imaginer les dégâts qu’un tel raisonnement pourrait engendrer s’il était étendu à l’ensemble des procès du pays. Partout les tribunaux sont encombrés. Mais on sait que Nicolas Sarkozy voudrait que cet appel soit jugé juste avant la prochaine élection présidentielle, histoire d’occuper Dominique de Villepin à autre chose que l’opposition au chef de Sarkofrance.
- Dernière révélation dans l’affaire Bettencourt, une amie de la milliardaire accuse François-Marie Banier d’avoir écrit le petit argumentaire que la milliardaire devait apprendre par coeur, fin 2008, pour son entrevue avec Nicolas Sarkozy devenu président. Lors de ce rendez-vous, Liliane Bettencourt devait demander le soutien du président dans son procès pour « abus de faiblesse » intenté par sa fille contre M. Banier. L’avocat du photographe dément. D’après l’ancienne femme de chambre de Mme Bettencourt, ce court argumentaire était ainsi rédigé : « Je vous ai soutenu pour votre élection avec plaisir, je continuerai à vous aider personnellement, j’ai des problèmes graves avec ma fille qui peuvent avoir des conséquences pour L’Oréal et donc pour l’économie du pays. » Dans les enregistrements pirates des conversations entre Patrice de Maistre et Liliane Bettencourt, on avait appris que Patrice de Maistre savait, quelques semaines à l’avance, que le procureur Philippe Courroye en charge de l’affaire allait classer sans suite la plainte de Françoise Meyer-Bettencourt en septembre 2009.

Juan

http://www.betapolitique.fr/De-Loppsi-II-aux-manipulations-de-58029.html

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