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mardi 27 avril 2010

La journée de la Femme c'est tous les jours

Des 343 salopes aux 40 ans du Mouvement de Libération des Femmes en France Hommage à Delphine Seyrig (1), née à Beyrouth le 10 avril 1932, morte à Paris le 15 octobre 1990. Grande actrice, femme de culture et de réseau, activiste féministe en théorie, en pratique, et médiatique, fondatrice avec Carole Roussopolos et Ioana Wieder du Centre audiovisuel Simone de Beauvoir, en 1982 à Paris, et co-réalisatrice et réalisatrice de plusieurs films dans ce cadre (2).
Voici Le manifeste des 343 salopes en France, texte de Simone de Beauvoir dit-on, probablement intégré d’autres plumes, acte collectif d’insoumission civile qui sera suivi par le manifeste des 331 médecins solidaires déclarant qu’ils ont pratiqué des avortements (aujourd’hui introuvable sur Internet sauf information particulière). Le manifeste des femmes fut publié dans les colonnes du Nouvel Observateur n°334 du 5 avril 1971.
Le manifeste des 343 salopes pour mémoire des Droits Internationaux et des Droits de la Femme :
Un million de femmes se font avorter chaque année en France. Elles le font dans des conditions dangereuses en raison de la clandestinité à laquelle elles sont condamnées, alors que cette opération, pratiquée sous contrôle médical, est des plus simples. On fait le silence sur ces millions de femmes. Je déclare que je suis l’une d’elles. Je déclare avoir avorté. De même que nous réclamons le libre accès aux moyens anticonceptionnels, nous réclamons l’avortement libre.
Avortement
Mot qui semble exprimer et limiter une fois pour toutes le combat féministe. Être féministe, c’est lutter pour l’avortement libre et gratuit.
Avortement
C’est une affaire de bonnes femmes, quelque chose comme la cuisine, les langes, quelque chose de sale. Lutter pour obtenir l’avortement libre et gratuit, cela a l’air dérisoire ou mesquin. Toujours cette odeur d’hôpital ou de nourriture, ou de caca derrière les femmes. La complexité des émotions liées à la lutte pour l’avortement indique avec précision notre difficulté d’être, le mal que nous avons à nous persuader que cela vaut le coup de se battre pour nous. Il va de soi que nous n’avons pas comme les autres êtres humains le droit de disposer de notre corps. Pourtant notre ventre nous appartient.
L’avortement libre et gratuit n’est pas le but ultime de la lutte des femmes. Au contraire il ne correspond qu’à l’exigence la plus élémentaire, ce sans quoi le combat politique ne peut même pas commencer. Il est de nécessité vitale que les femmes récupèrent et réintègrent leur corps. Elles sont celles de qui la condition est unique dans l’histoire : les êtres humains qui, dans les sociétés modernes, n’ont pas la libre disposition de leur corps. Jusqu’à présent, seuls les esclaves ont connu cette condition.
Le scandale persiste. Chaque année 1 500 000 femmes vivent dans la honte et le désespoir. 5 000 d’entre nous meurent. Mais l’ordre moral n’en est pas bousculé. On voudrait crier.
L’avortement libre et gratuit c’est :
cesser immédiatement d’avoir honte de son corps, être libre et fière dans son corps comme tous ceux qui jusqu’ici en ont eu le plein emploi ;
ne plus avoir honte d’être une femme.
Un ego qui fout le camp en petits morceaux, c’est ce qu’éprouvent toutes les femmes qui doivent pratiquer un avortement clandestin ; être soi à tout moment, ne plus avoir cette crainte ignoble d’être “ prise ”, prise au piège, d’être double et impuissante avec une espèce de tumeur dans le ventre ; un combat enthousiasmant, dans la mesure où, si je le gagne, je commence seulement à m’appartenir en propre et non plus à l’Etat, à une famille, à un enfant dont je ne veux pas ; une étape pour parvenir au contrôle complet de la production des enfants. Les femmes comme tous les : autres producteurs ont de fait le droit absolu au contrôle de toutes leurs productions. Ce contrôle implique un changement radical des structures mentales des femmes et un changement non moins radical des structures de la société.
1. Je ferai un enfant si j’en ai envie, nulle pression morale, nulle institution, nul impératif économique ne peut m’y contraindre. Cela est mon pouvoir politique. Comme tout producteur, je peux, en attendant mieux, faire pression sur la société à travers ma production (grève d’enfants).
2. Je ferai un enfant si j’en ai envie et si la société dans laquelle je le fais naître est convenable pour moi, si elle ne fait pas de moi l’esclave de cet enfant, sa nourrice, sa bonne, sa tête de Turc. 3. Je ferai un enfant si j’en ai envie, si la société est convenable pour moi et convenable pour lui, j’en suis responsable, pas de risques de guerres, pas de travail assujetti aux cadences.
Non à la liberté surveillée
La bataille qui s’est engagée autour de l’avortement se passe au-dessus de la tête des principales intéressées, les femmes. La question de savoir si la loi doit être libéralisée, la question de savoir quels sont les cas où l’on peut se permettre l’avortement, en bref la question de l’avortement thérapeutique ne nous intéresse pas parce qu’elle ne nous concerne pas.
L’avortement thérapeutique exige de “ bonnes ” raisons pour avoir la “ permission ” d’avorter. En clair cela signifie que nous devons mériter de ne pas avoir d’enfants. Que la décision d’en avoir ou pas ne nous appartient pas plus qu’avant.
Le principe reste qu’il est légitime de forcer les femmes à avoir des enfants.
Une modification de la loi, en permettant des exceptions à ce principe, ne ferait que le renforcer. La plus libérale des lois réglementerait encore l’usage de notre corps. L’usage de notre corps n’a pas à être réglementé. Nous ne voulons pas des tolérances, des bribes de ce que les autres humains ont de naissance : la liberté d’user de leur corps comme ils l’entendent. Nous nous opposons autant à la loi Peyret ou au projet A.N.E.A. qu’à la loi actuelle comme nous nous opposerons à toute loi qui prétendra régler d’une façon quelconque notre corps. Nous ne voulons pas une meilleure loi, nous voulons sa suppression pure et simple. Nous ne demandons pas la charité, nous voulons la justice. Nous sommes 27 000 000 rien qu’ici. 27 000 000 de “ citoyennes ” traitées comme du bétail.
Aux fascistes de tout poil — qu’ils s’avouent comme tels et nous matraquent ou qu’ils s’appellent catholiques, intégristes, démographes, médecins, experts, juristes, “ hommes responsables ”, Debré, Peyret, Lejeune, Pompidou, Chauchard, le pape — nous disons que nous les avons démasqués.
Que nous les appelons les assassins du peuple. Que nous leur interdisons d’employer le terme “ respect de la vie ” qui est une obscénité dans leur bouche. Que nous sommes 27 000 000. Que nous lutterons jusqu’au bout parce que nous ne voulons rien de plus que notre dû : la libre disposition de notre corps.
Les dix commandements de l’Etat bourgeois
Fœtus plutôt qu’être humain choisiras quand cet être humain est femelle.
Femme point n’avortera tant que Debré réclamera 100 millions de Français.
100 millions de Français tu auras, tant que ça ne te coûte rien.
Particulièrement sévère seras avec femelles pauvres ne pouvant aller en Angleterre.
Ainsi volant de chômage tu auras pour faire plaisir à tes capitalistes.
Très moraliste tu seras, car Dieu sait ce que “ nos ” femmes feraient si libres.
Fœtus tu préserveras, car plus intéressant de les tuer à 18 ans, âge de la conscription.
Grand besoin tu en auras car politique impérialiste tu poursuivras.
Toi-même contraception utiliseras, pour envoyer rares enfants à Polytechnique ou l’E.N.A. parce qu’appartement 10 pièces seulement.
Quant aux autres, pilule dénigreras, car il ne manquerait plus que ça.
La liste de signatures est un premier acte de révolte. Pour la première fois, les femmes ont décidé de lever l’interdit qui pèse sur leur ventre : des femmes du Mouvement de Libération des Femmes, du Mouvement pour la Liberté de l’Avortement, des femmes qui travaillent, des femmes au foyer.
Au Mouvement de Libération des Femmes, nous ne sommes ni un parti, ni une organisation, ni une association, et encore moins leur filiale féminine. Il s’agit là d’un mouvement historique qui ne groupe pas seulement les femmes qui viennent au M.L.F., c’est le mouvement de toutes les femmes qui, là où elles vivent, là où elles travaillent, ont décidé de prendre en main leur vie et leur libération.
Lutter contre notre oppression c’est faire éclater toutes les structures de la société et, en particulier, les plus quotidiennes. Nous ne voulons aucune part ni aucune place dans cette société qui s’est édifiée sans nous et sur notre dos.
Quand le peuple des femmes, la partie à l’ombre de l’humanité, prendra son destin en main, c’est alors qu’on pourra parler d’une révolution. Un Mouvement pour la Liberté de l’Avortement s’est constitué, qui regroupe toutes celles et ceux qui sont prêts à lutter jusqu’au bout pour l’avortement libre. Ce mouvement a pour but de susciter des groupes de quartier et d’entreprise, de coordonner une campagne d’explication et d’information, de se transformer en mouvement de masse seul capable d’imposer notre droit à disposer de nous-mêmes.
Insoumission civile et professionnelle (contre les prescriptions de l’Ordre des médecins) :
Le manifeste des 331 médecins se déclare solidaire en 1973 en disant qu’ils ont pratiqué des avortements.
C’est seulement en 1975 suite à l’action suivie du MLAC fort de ces deux manifestes d’insoumission civile signés par des personnalités de la société française, représentatifs culturels et intellectuels ou sommités médicales, et une mise au point parlementaire de décembre 1974 à janvier 1975 que la loi Giroud — Françoise Giroud étant alors ministre de la condition féminine — dite loi Weil car Simone Weil en tant que ministre de la santé la défendit avec un courage farouche face à une Chambre des députés majoritairement masculine et réactionnaire, pour l’imposer, fut adoptée par les députés, autorisant l’interruption de grossesse dans les dix premières semaines de la gestation.
Apis
Notes :
(1) Le portrait photographique de Delphine Seyrig, telle qu’on pouvait la croiser dans son quartier (place des Vosges) ou avec son compagnon Sami Frey dans une librairie du quartier des Halles, à la fin des années 70 et au début des années 80, est un document sans droit, de photographe inconnu, source fr.wikipedia.
(2) Une histoire internationale de l’art vidéo (dates et fondations), de ses normes, de ses performances, de ses artistes et documentaristes, de ses institutions, de ses productions indépendantes, de ses festivals, et du renouvellement des festivals de cinéma, dans le site Art-Vidéo-0.

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