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vendredi 19 mars 2010

La journée de la Femme c'est tous les jours

Pourquoi les femmes ne s’aiment plus ?
« …Montevideo, le 2 août 2006…Luisel Ramos, une mannequin de 22 ans s’est écroulé aujourd’hui dans les coulisses d’un défilé de mode et est décédé peu après…Des proches de la jeune fille ont affirmé que depuis trois mois, elle ne se nourrissait plus que de salade et de Coke Diète. Deux semaines avant le défilé, elle avait arrêté de manger...Les premières analyses médicales ont révélé que son indice de masse corporelle (IMC) était de 14,5 au moment de sa mort. L’Organisation mondiale de la santé associe un IMC de 16 à la famine… »
« Cathy, ma décision est prise : je me fais refaire les seins à la fin de mon bac », me lance une amie lors d’une après-midi d’étude. Elle s’était plainte tant de fois sur la dimension–ou plutôt sur le peu de dimension– de sa poitrine que sa déclaration m’a à peine surprise. « Je me trouve tellement grosse ! » me lance au gym une copine qui se regarde dans le miroir depuis une demi-heure pour analyser les défauts de son corps sous tous les angles possibles. Je décide d’ignorer son commentaire. À toutes les fois où j’ai essayé de la convaincre du contraire, elle me dit que je ne faisais qu’être gentille. Je ne compte même plus le nombre de fois où j’ai entendu ce genre de reproches méprisants, venant de femmes différentes, témoignant à chaque fois d’une déception et d’un dégoût profond par rapport à leur propre corps. À tous les jours, autour de moi, je remarque des femmes qui ne cessent de rajuster leurs vêtements et, à toutes les occasions possibles, de chercher un miroir pour vérifier leur reflet. Nous voulons constamment perdre du poids, surveiller notre ligne, changer la taille de notre poitrine, corriger notre silhouette, changer notre corps, oui, le changer au complet s’il vous plaît ! Et si nous ne pouvons y arriver par nous-même, nous savons qu’aujourd’hui, la chirurgie plastique est devenue la nouvelle alternative facile et accessible.
Lorsque je nous observe, je ne peux m’empêcher de me poser la question suivante : pourquoi les femmes aujourd’hui ne s’aiment plus ?
Depuis ma tendre jeunesse, on me dit que le corps de la femme est une des plus belles « choses » qui soit. J’ai toujours cru à sa beauté mais, aujourd’hui, en jetant un coup d’œil aux images quotidiennes de femmes sur les panneaux, dans les revues et dans les films, je constate que, pour être « beau », ce corps doit subir de profonds changements. « Moins cinq kilos, moins cinq ans, en quatre semaine », lit-on sur la page couverture de la parution du numéro de mars 2008 du magazine Marie-Claire. « Les injections pour sculpter mon corps : du Botox pour les seins et de l’acide hyaluronique pour modeler les fesses, ça vous étonne ? C’est la dernière tendance en chirurgie : les hot shots promettent de nous sculpter un corps de déesse », écrit le magazine Clin d’œil dans la parution du mois d’avril 2006. Toutes les femmes, et cela m’inclut, le savent depuis un âge de plus en plus tendre : il faut souffrir pour être belle.
Selon le National Eating Disorder Information Center (www.nedic.ca), plus de 50% des femmes canadiennes de plus de quinze ans affirment vouloir changer leur apparence physique si elles le pouvaient. Ces « désirs » de changement sont le carburant des quelques 70 000 compagnies de l’industrie de la beauté, impatientes de capitaliser sur les espoirs de ces femmes. Les messages qu’elles envoient aux consommatrices sont constants et persistants : « Vous n’êtes toujours pas parfaites et vous devez encore changer votre corps. » De la pilule amaigrissante au dernier régime alimentaire miracle, leurs messages se faufilent dans nos cerveaux, modifient notre regard sur notre propre corps et sur ceux qui nous entourent. Surtout, ils nous rendent plus attentifs à des détails auparavant insignifiants et altèrent ainsi nos critères de santé et de beauté. « Si vous n’obtenez pas les résultats recherchés, c’est parce que vous n’essayez pas assez. » Et ainsi, nous dépensons plus de 4 milliards de dollars par année en Amérique du Nord dans l’espoir de toujours devenir plus belles.
L’idéal de la beauté féminine demande aujourd’hui un investissement absolu de soi. Dorénavant, pour beaucoup de femmes, il représente un concours réel et quotidien entre elles pour déterminer celle qui s’investissera le plus pour atteindre cet idéal. L’émission America’s Next Top Model, une série de téléréalité hebdomadaire où une douzaine de jeunes filles sont en compétition pour remporter le titre de la future top-modèle de l’Amérique, offre une caricature parfaite de cette réalité quotidienne à laquelle les femmes sont initiées dès leur naissance. Cette émission, qui attire environ 7 millions d’auditeurs à chaque semaine, soit l’équivalent de la population du Québec, valorise et récompense la femme qui excelle le mieux dans l’obéissance aux standards de beauté. Ne faisons-nous pas de même à tous les jours en admirant davantage les femmes qui réussissent le mieux à calquer le modèle imposé et en dévalorisant celles qui n’arrive pas à s’y conformer ?
L’idée d’un corps parfait, ou plutôt d’un corps le plus mince –ou maigre– possible, est devenu une obsession pour beaucoup de filles et de femmes. Le NEDIC déclare que 75 000 personnes souffrent d’anorexie et de boulimie au Québec. Le taux d’hospitalisation pour les troubles alimentaires dans les hôpitaux généraux a augmenté de 34% chez les femmes de moins de 15 ans et de 29 % chez les femmes de 15 à 24 ans au Québec. Manifestement, la minceur ne fait pas le bonheur. Aux États-Unis, la réalité est aussi préoccupante. La recherchiste Lisa Berzins dans son rapport Dying to Be Thin a souligné que la phobie de devenir grosse est si omniprésente chez les jeunes filles qu’elles ont indiqué dans le sondage que la peur de grossir est plus effrayante que celle d’avoir le cancer, de vivre une guerre nucléaire ou de perdre ses parents.
Quelle femme ne s’est jamais inquiétée ou plainte sur un aspect ou l’ensemble de son corps ? Les femmes grandissent encore dans un monde où leur apparence leur est présentée comme étant une part essentielle d’elles-mêmes et cela, avant leur santé et leur bien-être. Partout où nous allons, partout où nous regardons, nous sommes confrontées à des images de plus en plus exigeantes de notre corps. Tout en sachant que cet idéal est inatteignable, nous acceptons d’entrer dans ce monde de rêves en nous disant qu’un « petit sacrifice » ne nous fera pas de tort. Combien de femmes ont déjà suivi ou suivent encore un régime alimentaire ? Combien l’ont fait ou le font pour l’apparence et combien pour la santé ? Quelle femme ne s’est jamais privée de nourriture pour « améliorer » son corps à un moment ou un autre de sa vie ?
Dorénavant, « être aimé » est plus important que de s’aimer soi-même. Nous prenons à cœur toutes les critiques négatives à l’égard de notre apparence et devenons méfiantes lorsque vient le temps d’accepter des commentaires positifs de la part des autres. Nos regards deviennent plus investigateurs, plus observateurs, nous poussant sans cesse à nous comparer pour nous « améliorer ». Les femmes, contrairement aux hommes, ont toujours dépensé une quantité importante d’énergie, d’argent et de temps sur leur apparence. Pendant que des hommes passent cinq minutes par jour devant le miroir, certaines femmes peuvent y rester des heures. Pendant que des hommes investissent un maximum d’un jour par mois pour s’acheter de nouveaux vêtements, plusieurs femmes le font à toutes les fins de semaine pour rester à l’affût des dernières tendances. Nous sommes concentrées à maigrir, à éviter de prendre trop d’espace, à se soustraire physiquement, à se taire face aux critiques sur nos corps, à disparaître du regard des autres, et cela jusqu’au point de devenir invisibles…
Les rêves de beauté sont si ancrés dans nos têtes que les énergies que nous y investissons nous semble nécessaires, utiles et « normales ». Mais que se passerait-il si toutes ces énergies étaient plutôt orientées vers la construction d’un meilleur monde où les femmes seraient valorisées sous toutes leurs formes ? Auront-elles toujours besoin de souffrir pour être belles ? Pourront-elles finalement concentrer leurs forces sur d’autres choses que leur apparence ? Quand pourront-elles prendre soin de leur santé et de leur bien-être ?
Selon moi, c’est seulement lorsque toutes les femmes seront bien dans leur corps, qu’elles pourront réellement s’affirmer, retrouver leur pouvoir et participer pleinement à la construction de notre monde. Mais entre temps…
« …le 15 novembre 2006…Ana Carolina Reston, une mannequin brésilienne de 21 ans, pesait 88 livres et mesurait 5’8 lorsqu’elle mourut après s’être infligée un régime consistant uniquement de pommes et de tomates… »
par Cathy Wong
le blogue personnel de l’auteure :
This is What a Feminist Looks Like

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